OFFRES DE RETOUR - Wade «déterre» Idy, Fada et Dias qu’il avait bannis : Coûts et risques d’une opération

Wade déterre électoralement ses ex-fils qu’il avait enterrés politiquement. Après l’audience avec l’ancien Premier ministre et ex-n°2 du Parti démocratique sénégalais (Pds), c’était au tour de Jean-Paul Dias et Modou Diagne Fada d’être les hôtes du locataire du Palais Léopold Sédar Senghor.

En recevant, en 24 heures, ces différentes personnalités politiques, toutes excommuniées du Pds à des périodes différentes et pour des motifs divers, Me Abdoulaye Wade ne cache pas l’ambition qu’il nourrit aujourd’hui de les voir réintégrer la maison libérale. Ces appels au retour à la maison «natale», au sens politique du terme, interviennent dans un contexte de grands enjeux électoraux, marqués, entre autres, par des actes posés pour reporter les élections, en découplant la présidentielle des législatives qui avaient été prévues le 25 février 2007.

Cependant, la perspective des retrouvailles entre le Président Wade et ses trois hommes politiques risque fort bien de se heurter à certains obstacles et pas des moindres. Les conditions dans lesquelles certains d’entre eux, notamment Idrissa Seck et Jean-Paul Dias et Modou Diagne Fada, dans une moindre mesure, les ont conduits à se tracer d’autres espaces d’expression, en alliance avec d’autres segments politiques ou de la société civile. En effet, Idrissa Seck et Jean-Paul Dias se sont retrouvés ensemble dans la coalition Jamm-ji avec le Parti socialiste (Ps) de Ousmane Tanor Dieng et la Ligue démocratique/Mouvement pour le parti du travail (Ld/Mpt) du Pr Abdoulaye Bathily. Quant à Modou Diagne Fada, sans avoir totalement fermé la porte du soutien à la candidature de Me Wade à la prochaine présidentielle, l’enfant de Darou Moukhty a mis sur pied avec d’autres entités politiques et individualités la coalition Waar Wi pour briguer le suffrage des Sénégalais aux législatives. Il n’est pas par conséquent envisageable que le seul registre affectif d’un retour à la maison libérale suffise pour ces trois leaders politiques. Toute éventualité de leur retour va se solder par des garanties solides, en termes d’intégration à des postes stratégiques au sein du Pds et de l’appareil d’Etat.

On ne voit pas autrement la perspective, pour Idrissa Seck, Modou Diagne Fada et Jean-Paul Dias, de renoncer aux carrières politiques qu’ils se sont tracées, dans un contexte d’une succession à Wade, inscrite logiquement et humainement, dans le moyen et le court terme. Autrement, non seulement, ils mettraient en péril leur crédit personnel et politique, mais ils risquent aussi de s’aliéner à la fois certains de leurs militants et de leurs alliés politiques.

DEGATS COLLATERAUX

Sur un autre registre, le retour de ces ex-fils bannis par leur «père» et par leur parti n’est pas sans entraîner des dégâts électoraux et politiques collatéraux, sous l’angle de la gestion des libéraux de la cinquième colonne, notamment la galaxie de l’actuel Premier ministre, qui est jusqu’à preuve du contraire l’homme désigné pour manager la campagne électorale de Me Wade. Des dégâts collatéraux également sur le front des transhumants qui avaient «volé» les places à ces fils ex-communiés que Wade appelle aujourd’hui à ses côtés.

Or, aussi bien les libéraux de la cinquième colonne que les transhumants ont eu toute la latitude pendant la première magistrature de Wade d’infiltrer les appareils du Pds et de l’Etat. Leur mise à l’écart au profit d’un éventuel retour au bercail libéral comporte un risque électoral et un énorme coût politique que le candidat à sa propre succession -si toutefois, cette ambition wadienne est maintenue- aura bien du mal à supporter. Il est difficile d’envisager une cohabitation soft entre Idrissa Seck, Jean-Paul Dias et Modou Fada d’une part, avec les faucons du Palais et les transhumants d’autre part.

Autant dire que la théorie du retour à la maison libérale n’est pas aussi simple et simpliste que certaines postures plus émotionnelles que politiques veulent le laisser entendre. Comme quoi, il n’est pas toujours facile et évident de faire du neuf avec du vieux. Amateurs de jeux politiques, faites vos mises !