Pour les profanes et ceux qui suivent de loin, cette actualité, rappeler les noms des derniers grands lauréats connus est une véritable prouesse, tant l’évènement semble être totalement sorti des carnets et des agendas officiels. Du côté des chercheurs autres inventeurs et chercheurs, la raison est simple. Elle est dans le manque d’intérêt que les ministères de tutelle (l’Industrie pour l’innovation technologique et l’invention et la Recherche Scientifique) accordent à l’évènement. D’autres sources révèlent que l’instabilité à la tête des ministères, depuis quelques années, a fait qu’aucun dossier sur la question n’a été mené à terme. Il a été signalé que le dernier ministre de la Recherche scientifique, Mme Yaye Kène Gassama DIA, avait, selon des sources émanant des milieux des sciences de la recherche, un projet sur le retour de ce Grand Prix. Mais, elle est partie du ministère, sans qu’on ait réellement expliqué aux gens du secteur, pourquoi elle a précipitamment quitté les lieux.
Tout cela n’explique pas pour autant le flou qui entoure d’une part, le secteur de l’innovation et de l’invention et d’autre part celui des sciences en général. Mais aussi, il se pose la question de l’articulation entre recherche scientifique et politique de développement au Sénégal. D’ailleurs, aujourd’hui en donnant la priorité aux biocarburants, l’Etat a semblé avoir choisi un seul secteur, celui de l’énergie avant qu’il ne soit rattrapé avec les conséquences liées à la crise pétrolière qui se profile, aux questions des coûts des denrées de première nécessité et aux besoins de recentrage de la recherche agricole et agro-alimentaire. Dans ce pays où les centres de recherche pour le développement de la science et la vulgarisation des produits issus de ces environnements ne manquent pas, les chercheurs ont fini de faire le constat alarmant que le président Abdoulaye Wade et ses gouvernements successifs n’ont pas de politique globale de relance de la recherche.
Ce qui a fait dire récemment au Dr Isabelle Niang Diop, géologue et Maître assistant à l’Université de Dakar que « Le produit de nos consultations ne fait pas partie du dictionnaire politique au Sénégal ». Face au même constat, beaucoup d’acteurs du secteur ont sans doute oublié que c’est une équipe Centre du riz pour l’Afrique (Adrao) qui avait remporté le dernier Grand prix du Chef de l’Etat pour les sciences au cours d’une cérémonie solennelle présidée par le président Wade, le 30 juin 2003. cela grâce à l’invention d’une batteuse-vanneuse mise au point pour réduire le travail des femmes qui passaient des heures à décortiquer le grain de riz. Depuis, c’est le désert au moment même où le président de la République parle d’idées et de projets novateurs comme l’Observatoire sahélo-saharien, de muraille verte pour lutter contre l’avancée du désert. La biennale des sciences aussi…
Au niveau de l’Institut Sénégalais de Recherches Agricoles et Agro-alimentaires, comme dans les domaines des biotechnologies de pointe qui sont à la mode, l’Etat n’a pas de stratégie. Il semble agir au coup par coup. Oublié dans le Baol, le Centre national de recherches agronomiques de Bambey (Cnra), a pâti de ce fait ; et aujourd’hui, nombre de chercheurs de l’Isra, comme du Cnra sont partis à la retraite, avec leur savoir et leur travail sans avoir vu venir des autorités, une réelle volonté de les associer à une politique de développement de la recherche. Même cas de figure dans le secteur de l’invention et des innovations technologiques. Pour dire que le timide effort fait par l’Etat avant les années 2000, n’a guère été maintenu avec l’arrivée du président Wade.
Pour preuve, malgré la naissance de l’Académie des Sciences et Techniques du Sénégal, on a vu disparaître subitement, la Biennale des Sciences de Dakar. Un moment d’échanges, de collaboration et de partenariat scientifique comme aime à le souligner le Professeur Amadou Lamine Ndiaye, ancien président de la Biennale. Le rappel de tous ces confirme en quelque sorte, un réel mépris pour les sciences. Il met aussi en exergue, le manque de vision des autorités actuelles du Sénégal qui semblent avoir privilégié autre chose que la promotion et le soutien à la recherche.
Dans un tel contexte, n’est-ce pas, utopique de vouloir organiser un Grand Prix du Chef de l’Etat pour les Sciences auquel, les chercheurs, lassés de bosser tout seul dans leur laboratoire, ne semblent plus croire.
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