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Cadre - Des études très chères : Des entreprises du savoir

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Cadre - Des études très chères : Des entreprises du savoir

 

Les écoles privées de commerce poussent comme des champignons dans les quartiers résidentiels de Dakar et attirent un nombre d’étudiants en croissance exponentielle. Et pour cause, l’université publique, dont l’image est bien écornée et les moyens réduits à la portion congrue, n’offre ni place ni formation dans le domaine, tandis qu’un nombre sans cesse élevé de jeunes bacheliers veulent s’orienter vers ces filières porteuses.

Le nombre d’étudiants ayant choisi de poursuivre, une fois le bac en poche, leurs études dans un établissement privé d’enseignement supérieur (Epes) plutôt qu’à l’université, a été multiplié par 26 en 10 ans. C’est là un des constats que dresse le rapport sur «L’enseignement supérieur privé au Sénégal» rédigé par Moustapha Tamba de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad). D’un demi-millier d’individus en 1994, répartis sur 4 écoles, on est passé en 2004, à environ 13 000 étudiants et 48 Epes reconnus par l’Etat. Le privé capte désormais près de 20% du total des effectifs du supérieur et en une décennie, c’est une véritable révolution qui a bouleversé le paysage de l’enseignement supérieur au Sénégal. Les dénominations de ces établissements varient au gré de l’imagination de leurs dirigeants. Institut, Ecoles et Hautes Ecoles, ou encore universités internationales, chacun y va de son appelation, mais il n’existe guère de critère rigoureux pour justifier touts ces qualificatifs. Fondés avec des capitaux privés nationaux ou provenant de l’étranger, ces Epes sont de plus protéiformes. Il peut s’agir d’écoles 100% sénégalaises ou de filiales de groupes étrangers. Parmi les écoles de management, on notera par exemple le cas d’Eticca qui est une antenne de l’école de commerce française 3A, ou la Suffolk University, directement liée à l’université américaine du même nom, basée à Boston. Elles se présentent parfois aussi sous forme de réseau d’écoles disposant de centres disséminés sur tout le continent et entre lesquels l’étudiant peut se transférer. C’est le cas notamment de l’Heci dont la maison-mère est au Maroc. Au-delà de cette diversité de structures, ces Epes ont un point commun, ce sont des entreprises.

Selection financiere et sociale Ils sont payants et ne bénéficient que de soutiens extérieurs marginaux. Ils recrutent leurs étudiants et leurs enseignants, font de la publicité et cherchent bien sûr à être rentables. Enfin ils se livrent une concurrence acharnée sur le marché, avec pour ultime objectif d’attirer les meilleurs ‘clients’, c’est-à-dire les élèves les plus brillants. Et le marché, précisément, est en plein boom. Les générations nées dans les années 1970 et 1980, décennies de forte croissance démographique, sont arrivées massivement au niveau du baccalauréat à partir des années 1990. Si bien sûr, tous n’ont pas poursuivi loin leur formation, M. Tamba note tout de même que «les élèves ont été vraisemblablement plus nombreux à poursuivre des études supérieures que par le passé». Face à ce raz-de-marée d’étudiants en puissance, les moyens mis à la disposition du système universitaire n’ont pas suivi. La crise des années 80 et 90 (année blanche en 1988, année invalide en 1994) a en effet considérablement terni l’image de l’université, et «depuis ces périodes, toutes les années sont perturbées par des mouvements de grève, installant ainsi un climat délétère dans les universités», constate M. Tamba. La situation ne s’est guère améliorée depuis. La réforme de 1994 s’est inscrite dans un contexte de crise économique dont les cycles ont été ponctués par la mise en œuvre des Programmes d’ajustement structurel (Pas)». Selon lui, ce programme adopté sous la pression de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, se résume à «une réduction des parts des universités dans les allocations budgétaires au profit de l’enseignement de base, réduction des effectifs et révision des modes d’accès (numerus clausus dans les facultés)». Le privé semble ainsi jouer un rôle de soupape, en accueillant le trop-plein d’étudiants que les universités plus ou moins délaissées ne parviennent pas à digérer. Quoi qu’il en soit, le bachelier sénégalais, qui comme un nombre croissant de ses pairs, souhaite recevoir une formation en commerce et en gestion, n’a aujourd’hui pratiquement pas d’autres alternatives que de jeter son dévolu sur l’une de ces écoles. A l’exception de l’Institut Supérieur de Gestion (Isg), qui dépend de l’Ucad, les seules formations aux disciplines du management de l’entreprise sont celles du privé, les universités d’Etat étant focalisées sur le très académique enseignement des sciences économiques. C’est d’ailleurs à la formation aux métiers du tertiaire que près de 90% des Epes ont fait leur vocation. Pourtant n’entre pas qui veut. Sélectives sur le plan scolaire, puisqu’elle ne recrutent que les meilleurs candidats, les écoles de commerces le sont aussi socialement. Avec des frais de scolarité généralement situés entre 600 000 et 1 million 200 mille francs Cfa, les Epes recrutent un public privilégié. M. Tamba, qui a enseigné dans l’une d’entre elles pendant près de 5 ans, note d’ailleurs «que la majeure partie des étudiants vient d’origine sociale aisée (avocats, chefs d’entreprises, gros commerçants, cadres de l’Administration et du privé, médecins, professeurs, officiers supérieurs de l’Armée, banquiers, etc.)» et souligne finalement que «les Epes ne sont pas fréquentés par n’importe qui».

DES DIFFICULTES A SE FAIRE LEUR PLACE

Malgré leur succès et le quasi-monopole qu’elles détiennent dans certaines formations telles que le management, les Epes ont encore bien du mal s’intégrer au circuit officiel de l’enseignement supérieur. Après avoir voté la loi 94-82 du 23 décembre 1994 portant statut des établissements d’enseignement privé, le ministère de l’Education nationale met en place le 2 mai 1995, un accord-cadre pour la promotion de l’enseignement supérieur privé. Cet accord n’est jamais entré en vigueur et les acteurs du secteur sont toujours dans l’attente de la mise en application de ce cadre de travail qui doit permettre l’harmonisation des diplômes, la normalisation des filières et surtout une subvention gouvernementale à ces filières.



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