Contrairement à ce qui semble être une évidence, certaines épouses d’émigrés sénégalais sont tenaillées par la pauvreté. Une enquête réalisée dans la région de Louga, où le taux d’émigrés est très important, révèle que les épouses de «modou modou» vivent dans des conditions moins enviables que celles des femmes de résidents. Dans ce terroir, le statut d’épouse d’émigré confère une certaine position sociale, mais dans les faits ce statut est moins enviable.
Les épouses d’émigrés ont tendance à abandonner leurs activités génératrices de revenus qu’elles exerçaient avant avant le mariage. Une certaine considération dans les zones rurales voudrait que le statut d’épouse d’émigré ne soit pas compatible avec un certain type d’activités. Il s’agit, par exemple, de la vente des cacahuettes, des fruits et des légumes au marché. Et pourtant, les sommes d’argent qu’ envoient les époux émigrés à leur femmes sont extrêmement dérisoires.
Elles perçoivent, en moyenne, 15.000 francs par mois
D’aprèsThierno Mbaye, assistant au Groupe d’études et de recherche sur les migrations, qui a réalisé une enquête dans la région de Louga, la moyenne des transferts d’argent est de 15.000 francs Cfa par mois. La somme la plus importante que le chercheur a pu trouver et qui est unique au niveau de la population enquêtée est de 35.000 francs Cfa.
«La migration, contrairement à ce que certains pensent appauvrit les dames dès l’instant qu’elles n’acceptent plus de continuer certains types d’activités parce qu’elles ont un mari à l’étranger », commentent M. Mbaye dans une interview avec Kanal 150.
Pour le doctorant, ce rejet de certains types d’occupations «constitue un handicap et un facteur d’appauvrissement que les les décideurs politiques ne prennent pas en compte». Ainsi le chercheur suggère que, pour tout projet de développement visant à aider les femmes, toutes y soient inclues.
«Tous les programmes, toutes les politiques de développement ou de réduction de la pauvreté doivent s’intéresser à toutes les femmes dans ces terroirs». Cela parce que la situation des épouses des résidents est parfois de loin meilleure que celle des épouses d’ émigrés.
Les pratiques ostentatoires, l’autre problème
Louga, malgré son fort taux d’émigrés, n’est pas la région la moins affectée par la pauvreté au Sénégal. Et malheureusement, les femmes abandonnent leurs activités pour « des sommes symboliques » que leur envoient leurs époux. «On pense que dans la région de Louga, la pauvreté est moins prégnante que partout ailleurs au Sénégal. Cela est lié à un certain nombre de pratique ostentatoire», indique M. Mbaye.
Pour certaines femmes, le statut d’épouses de «modou modou» doit se traduire dans le port vestimentaire et le mode de vie. Ainsi, elles n’hésitent pas dépenser tout l’argent envoyer par l’époux dans l’habillement et dans les cérémonies (mariage, baptême, et même funérailles), histoire de se faire remarquer.
Il critique le fait que «les politiques migratoires en Afrique ne s’intéressent qu’aux migrants qui réussissent, qui envoient de l’argent tandis que plus de 50% de ceux qui partent sombrent dans la galère».
C’est pourquoi, il invite les gouvernants à une prise de conscience afin de chercher à comprendre et à prendre en charge «les migrants qui ne résussisent pas». Cela devra se faire dans une démarche désintéressée et non empreinte à de ‘’populisme ou d’opportunisme».
« Les migrants et leurs conditions n’intéressent pas les gouvernants. Ils ne sont pas (non plus) intéressés par une véritable politique nationale migratoire qui aura sa place dans le développement national. Tout ce qui les intéressent ce sont les fonds qui sont (de l’Union européenne) et comment faire pour les capter», pense le chercheur
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