Liberté de la presse : En sept ans, le Sénégal recule de 42 places

Le classement mondial de la liberté de la presse de l’année 2009 a été publié le 20 octobre dernier par l’Association des journalistes ‘Reporters sans frontières’. Ce rapport épingle encore une fois, les fossoyeurs de la liberté de la presse. Le Sénégal qui était naguère cité en exemple en Afrique subsaharienne en matière de respect de la liberté de la presse, perd ainsi trois places, passant du 86e au 89e rang par rapport à l’année dernière.

Le classement mondial de la liberté de la presse pour l’année 2009 vient de sortir. Et comme on pouvait s’y attendre, le Sénégal qui faisait naguère figure de pionnier, dans ce domaine, en Afrique sub-saharienne, a encore reculé cette année. Il passe ainsi de la 86e place en 2008 au 89e rang. Ce recul démontre la dégradation de la situation de la liberté de la presse dans notre pays qui occupait, il y a sept ans, la 47e place de ce classement. Les multiples convocations des journalistes par la Division des investigations criminelles (Dic), au cours de ces douze derniers mois, et l’emprisonnement du directeur de publication du quotidien 24 Heures Chrono, El Malick Seck, y sont certainement pour quelque chose. Ce classement qui est établi, chaque année, par ‘Reporters sans frontière’, prend en compte les violations de la liberté de la presse commises entre le 1er septembre 2008 et le 31 août 2009.

Pour ce huitième classement mondial, c’est le Ghana qui occupe le peloton de tête des pays africains où la liberté de la presse semble être mieux respectée. Il occupe ainsi le 27e rang alors que le Mali et l’Afrique du Sud, également cités en exemple, se retrouvent respectivement aux 31e et 33e places. Ces trois pays qui honorent l’Afrique, constituent l’exception qui confirme la règle. Dans ce sombre tableau, la Guinée-Bissau (92e) perd aussi des places. Mais, elle fait mieux que la Guinée (100e) et la Gambie (137e).

Le Sénégal et la Guinée risquent d’ailleurs d’être épinglés, de nouveau, par Rsf dans son prochain classement. Le rapport 2009 n’ayant pas pris en compte les dernières entraves à la liberté de la presse observées dans ces deux pays, au cours de ces deux derniers mois. On peut citer, entre autres, la récente attaque contre le Groupe Wal Fadjri par une bande d’illuminés et les persécutions auxquelles sont soumis les journalistes guinéens depuis le massacre au Stade du 28 septembre par la junte militaire.

Paradoxalement, le Cap vert (44e), la Namibie (36e) et le Bénin (79e) qui sont aussi cités en exemple en Afrique en matière de respect de la liberté de la presse, font bonne figure devant le Sénégal. Ailleurs en Afrique, la situation des journalistes n’est guère meilleure. C’est le cas notamment en Mauritanie (102e), en Côte d’Ivoire (104e), au Zimbabwe (136e), au Niger (139e) et en République démocratique du Congo (147e). Le géant de l’Afrique, en l’occurrence le Nigeria, donne aussi un très mauvais exemple dans ce domaine. Il occupe la 135e place tandis que l’Erythrée (175e) se retrouve au dernier rang du peloton dans ce classement mondial.

L’Europe qui a toujours été considérée comme un modèle en matière de respect de la liberté de la presse, est aussi en net recul. De nombreux pays du vieux continent sont descendus cette année, dans le classement, même si les quatorze premières places de ce rapport sont toujours occupées par des Etats européens. Le Danemark occupe ainsi le premier rang. Il est suivi par la Finlande (2e), l’Irlande (3e), la Norvège (4e) et la Suède (5e). Des pays comme l’Estonie (6e), les Pays-Bas (7e), la Suisse (8e), l’Island (9e), la Lituanie (10e), la Belgique (11e), Malte (12e), l’Autriche (13e) et la Lettonie (14e) parviennent aussi à tirer leur épingle du jeu. En revanche, des grandes démocraties européennes comme la France (43e), la Slovaquie (46e) et… l’Italie (49e) continuent leur descente, perdant ainsi respectivement huit, trente-sept et cinq places par rapport à l’année dernière. Elles se font distancer par des jeunes démocraties africaines (Mali, Afrique du Sud et Ghana) et sud-américaines (Uruguay, Trinidad et Tobago). ‘De nombreux journalistes sont encore menacés physiquement en Italie, en Espagne (45e), mais aussi dans les Balkans, notamment en Croatie’, souligne ainsi ce rapport de ‘Reporters sans frontières’.

Les Etats-Unis enregistrent la plus forte progression dans ce domaine, sans nul doute, grâce à l’effet Obama. Ils remontent de 16 places, passant du 36e au 20e rang par rapport au classement de l’année dernière. Cette progression s’explique par l’attitude du président Barak Obama qui affiche une attitude moins belliqueuse à l’égard de la presse que son prédécesseur. Il convient toutefois de préciser que cette remontée ne concerne que l’état de la liberté de la presse sur le territoire américain. Si on considère l’attitude de l’Administration américaine en Irak et en Afghanistan, les Etats-Unis se retrouvent seulement à la 105e place du classement. De nombreux journalistes ont été, en effet, blessés ou détenus dans ce deux pays par l’armée américaine.

‘La liberté de la presse doit être défendue partout dans le monde, avec la même force et la même exigence’, a déclaré Jean-François Julliard, à l’occasion de la publication de ce huitième classement mondial de la liberté de la presse par ‘Reporters sans frontières’ (Rsf), le 20 octobre dernier.

Israël enregistre le plus grand recul en 2009. Il perd quarante-sept places et se retrouve au 93e rang. Cette chute spectaculaire s’explique, en partie, par la récente opération militaire ‘Plomb durci’ menée par l’armée israélienne contre la bande de Gaza. Ce qui fait ainsi perdre à l’Etat hébreux son statut de premier pays du Moyen-Orient où la liberté de la presse est le mieux respectée. Il se retrouve ainsi derrière le Koweït (60e) et les Emirats arabes unis (86e). A noter qu’une vingtaine de journalistes avaient été blessés et trois autres tués par Tsahal lors de cette offensive contre la bande de Gaza alors qu’ils couvraient le conflit.