Dans un entretien accordé à L'Observateur, Moubarack Lô, ancien conseiller économique sous l'ancien régime, tire la sonnette d'alarme après la troisième dégradation de la note souveraine du Sénégal en sept mois. Il appelle à un plan de redressement crédible, à la transparence budgétaire, à l’apaisement politique et à une gouvernance axée sur la performance.
Selon lui, restaurer la confiance des marchés financiers exige patience et constance : «?Il ne faut pas espérer et il ne faut pas chercher non plus à créer un changement rapide, c’est-à-dire vouloir tout de suite changer la trajectoire. Il faut savoir être patient, garder son cap et travailler.?»
Le spécialiste estime qu’un plan d’action rigoureux pourrait inverser la tendance : «?Si aujourd’hui le gouvernement annonce un plan de redressement et de relance, publie de solides données sur les comptes publics agréées par le FMI, qui lui délivre un satisfecit officiel pour ses efforts de transparence [...] dans ce cas-là, les perceptions des marchés financiers et des agences de notation peuvent radicalement changer dans un horizon de six mois à un an. Tel doit être la perspective du Gouvernement.?»
L'interlocuteur du journal insiste sur la nécessité de dépasser les tensions politiciennes : «?Le plus important est qu’ils se mettent au travail, en laissant la politique politicienne aux vestiaires, ainsi que les petites querelles avec les chroniqueurs et les acteurs de l’opposition.?»
Dans une logique d’apaisement, il préconise des mesures fortes : «?Je suggère, dans un souci d’apaisement, que toutes les personnes emprisonnées pour des délits d’opinion soient libérées et qu’une paix des braves voie le jour dans ce pays, que les débats d’idées prennent le pas sur les attaques personnelles, que chacun respecte les institutions et que les pouvoirs publics acceptent d’être critiqués et mis sous pression pour réaliser des performances.?»
«Attention aux tensions au sommet de l’État»
L’économiste met aussi en garde contre les divisions internes : «?Si les tensions perceptibles entre le Président et le Premier ministre devraient perdurer, cela serait fatal pour l’économie du pays.?»
Enfin, il appelle les responsables politiques à recentrer leurs actions sur l’intérêt général : «?Le développement, c’est effectuer chaque jour un pas supplémentaire non réalisé jusqu’ici, mais non pas demeurer sur place en se jetant l’anathème de part et d’autre. Seul le peuple y perd, et il ne le mérite pas. Les hommes et femmes politiques doivent éviter de se voir considérés comme la cause principale du mal-développement national, oublier leurs personnes et leurs intérêts immédiats, et se positionner plutôt comme des moteurs et des modèles dans l’engagement sincère de l’émergence de notre pays.?»
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