L'Afrique face à la prophétie de Smith : la réalité inconfortable, vingt ans après
Il y a plus de deux décennies, en 2003, la parution de "Négrologie : pourquoi l'Afrique meurt" par Stephen Smith a créé une onde de choc, soulevant une tempête d'indignation et de débats passionnés. Smith dressait un portrait apocalyptique de l'Afrique subsaharienne, qu'il décrivait comme un continent s'engageant dans un "suicide" par des blocages socioculturels internes et l'échec structurel de ses élites. Certes, la dureté de ses propos et certaines phrases controversées ont inévitablement conduit à des accusations de pessimisme excessif, voire de racisme larvé, déclenchant une littérature d'afro-optimisme vigoureuse, souvent nécessaire pour rééquilibrer la perspective.
Pourtant, à l'heure où nous observons l'évolution du continent, il devient impossible d'occulter une vérité inconfortable : Smith avait raison sur bien des maux persistants qui entravent la pleine émergence africaine.
La description la plus frappante de Smith était celle de l'effondrement de l'État. Il affirmait que l'État africain ressemblait à un « “grenier” phagocyté par la famille du Président ou une “caverne d'Ali Baba” qui attise les convoitises, sans légitimité ».
Aujourd'hui, cette image résonne avec une actualité douloureuse. La corruption demeure l'un des fléaux majeurs. Des milliards sont détournés chaque année, privant les populations d'infrastructures vitales. Les services publics (hôpitaux, écoles), censés être le socle de toute nation moderne, restent désespérément en ruine dans de nombreux pays, prouvant que l'administration est toujours, dans les faits, souvent déstructurée.
De même, la fuite des élites et des cerveaux s’est intensifiée. Les meilleurs ingénieurs, médecins et universitaires sont toujours poussés à l'émigration, cherchant un avenir et une dignité professionnelle hors du continent. Ce phénomène aggrave le manque de ressources humaines qualifiées et hypothèque notre capacité à construire un développement autonome. La perspective du « suicide » de Smith n’est peut-être pas une fatalité, mais elle reste une menace.
Le point le plus essentiel de la thèse de Smith, souvent noyé par l'émotion, concernait la responsabilité interne face aux malheurs. L'histoire coloniale est un fait, une blessure. Mais, comme le craignait Smith, nous sommes encore et toujours rongés par un ressentiment colonial qui fige l'analyse et nourrit la culture du bouc émissaire.
Cette attitude se manifeste de manière criante sur la scène internationale. Lors des Assemblées Générales de l'ONU, l'on observe parfois un défilé de victimisation chez certains dirigeants africains, dont le discours est encore centré sur les réparations et la dénonciation du passé. Pendant ce temps, leurs homologues asiatiques ou sud-américains – issus, eux aussi, d'anciennes nations coloniales ou dominées – avancent avec force, tracent leur propre voie, sûrs de leur identité et de leurs capacités à surmonter les obstacles par l'action interne.
Il est crucial de nuancer notre regard. L'afro-optimisme n'est pas une chimère. Des pôles de croissance émergent, la démocratie progresse par à-coups, et une jeunesse entrepreneuriale, décomplexée et connectée, prend les rênes.
Toutefois, la plus grande erreur serait d'utiliser ces lueurs pour masquer les défis fondamentaux soulevés par Smith : la corruption, la mal-gouvernance (qui engendre des guerres civiles et des meurtres de masse) et l'incapacité à forger des institutions légitimes au service du bien public plutôt que du clan.
L'héritage amer de Smith est qu'il nous oblige, au-delà de la colère qu'il a suscitée, à regarder la réalité en face : le véritable pouvoir de transformation réside dans la déconstruction du "grenier" de l'État et le rejet définitif de la culture du bouc émissaire. C'est seulement en assumant la pleine responsabilité de notre destin que l'Afrique pourra survivre et triompher.
Commentaires (25)
Notre responsabiloité est totale et entière sur ce qui se passe dans ce continent. Les élites cherchent toujours à profiter du 'grenier' pendant que la masse se cherche en permanence un messie pour, par un coup de baguette, la sortir de la misère. Sa misère est d'abord et avant tout culturelle et indivduelle.
Regardons nous en face ! La colonisation est terminée depuis plus d'un demi siecle et nos colons se sont emancipés de nous et de nos richesses supposees.
Certes ils nont pqs voulu couper le cordon, se sucrqnr encore pendant des decennies avec la complicité complexés de leurs relais. Mais qui veit s'affranchir y parvient.
Wade avait decidé de rompre avec la surprésence de Bolloré. Il y est parvenu. Rappelons qu'au début des années 2000 ce groupe gerait tous les ports d'Afrique francophone et la logistique par transport ferroviaire des conteneurs. Sans crier à "Bolloré Degage" wade a juste pris la decision courageuse de le faire concurrencer par Dubai Port World. D'ailleurs toutes les questions de fausse traque des biens mal acquis contre son fils Karim viennent de ce camouflet. A laeroport egalement, toute la position dominante francaise a ete cassée par Wade avant que Macky ne soit obligé de contracter avec les Saoudiens et les Turcs pour terminer laeroport Diass et le faire fonctionner.
Avant tous les grands marchés routiers etaient francais. Aujourdhui sur ce segment nous avons chinois, turcs, senegalais etc...
Il faut repenser l'Afrique. Cela passe par se decomplexer dabord (un cerveau est un cerveau) puis par etre realiste en sachant ce quon a et ce quon est obligé daller chercher. Ce ne sont pas des slogans a la kemi seba ou guy marius ou nathalie qui vont nous sortir de l'orniere. Jai lu hier Guy fustiger le coup detat en guinee Bissau apres setre fait photograohier avec assimi et ibrahim traoré. Jai juste rigolé
L’Islam a bon dos ! plein de pays musulmans s’en sortent économiquement sans rien renoncer de leurs cultures. J’ai l’impression que vous confondez Islam et utilisation malhonnête de la religion à des fins personnelles, exercice favori au Sénégal.
C'est la faute à des dirigeants qui n'ont pas la légitimité ni les compétences pour gérer un état .Meme gérer leur famille ces dirigeants incapables de gérer leurs propres familles . La taille du fonctionnariat est tellement grand que tout développement est impossible . Au Sénégal , les fonctionnaires représentent autour de 200000 : Toute dette contractée ,sert en réalité à payer ces gens dont les compétences laissent à désirer . Je propose qu'on demande à ces fonctionnaires ,à ces détourneurs de fonds publics , à ces gens qui ont pris l'état comme un grenier au profit de leur famille , à ces gens qui tripatouillent les élections , à tous ces gens là de payer la dette du Sénégal qui dit on , sélève 118% du produit intérieur brut .
Nos sois disant élites ont reproduit un état colonial étranger dont ils ne maitrisent ni les contours , ni les subtilités , maitrisent cependant les finalités : détourner l'argent et laisser les populations crever de faim ,de maladies ,de soif .
Le fait que soit marginalisée , piétinée ,reléguée au second plan ne gène absolument pas nos dirigeants . La mal gouvernance , est toujours source d'instabilité : au soudan, les guerres des grands lacs, le sahel ,la corne de l'Afrique au total 40 conflits sont actifs en Afrique . ça ne s'arrète jamais . Sans parler des coup d'états constitutionnels en Guinée Bissao , au Cameroun ou Paul Biya 92 ans est proclamé vainqueur des élections Présidentielles .
En fait l' Afrique des élites donne raison à ces détracteurs : Stephan Smith, à Roger Garody , à Hegel à Paul Bert et j'en passe ; pour ces gens là , jamais l'Afrique ne se développera pas parce les Africains sont vaniteux , égoistes , cupides et sont de grands enfants qui auront toujours besoin d'tere guidés par un maitre c'est à dire le maitre blanc . Cette assertion semble vraie car depuis les années 1960 , aucun pays francophone ne s'est illustré en matière de développement . Au contraire c'est la corruption , la mal gouvernance , la prédation éhontée des ressources , les coup d'états constitutionnels pour se maintenir indéfiniment au pouvoir .
Oui le mal est en nous , cessons d'accuser les autres et ce n'est meme pas courageux de notre part
Des solutions existent : abandonner l'état colonial et le remplacer par un état africain c'est à dire un état issu de nos valeurs de respect de l'autre : gérer la chose publique avec un consensus large qui implique toutes les couches de la société
Toutes les décisions seraient discutées sur la place publique : justice économie , santé . Toute corruption serait traitée avec la plus grande fermeté.
Cet état africain gardera le principe démocratique comme ça a toujours été : élection , désignation sur la base de l'intégrité morale de la personne .
L'état africain sera surtout incarné par des hommes et des femmes formés moralement pour construire ,un Sénégal nouveau ,une Afrique nouvelle à l'image des pays asiatiques , latino américains
L'état colonial est un état néfaste pour nous car il nous a toujours appris à comment voler , détourner l'argent public ,à former des politiciens qui n'ont aucune formation à tripatouiller les élections et finalement à instaurer l'instabilité ,la corruption et le refus du développement . Quel Bilan l'Afrique peut elle exhiber après plus de 60 ans " d'indépendance" ?
Pas grand chose
Avant de résoudre les problèmes de l’Afrique, ne devrions-nous pas commencer par chez nous. Que chaque pays africain concerné (autant dire tous) fasse le boulot et, seulement après, on pourra poser la question d’un continent à réorganiser pour une communauté d’états. Fédérer des pays bordéliques c’est possible mais est-ce souhaitable et raisonnable ?
Il n'y a que vous les africains qui pouvaient faire quelque chose, n'attendez rien des autres... Par respect je n'en dirai pas plus !
Dans quelle famille, un enfant est le mieux préparé ?:
-famille polygame élastique et flou , où 2 femmes sont mise en concurrence , se surveillent dans le foyer , personne n'explique rien , même aux enfants , on doit interpréter, les enfants sont des ressources ( dot, corvée, salaire, carrière de fotballeur) , pas d'héritage etc Les garçons s'éduquent entre pairs ...
_famille avec 2 parents bien identifiés scolarisés un min , avec souvent des grand-parents, qui parlent expliquent et guident les enfants, et essaient de transmettre un héritage un bien
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