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Groupe SEDIMA contre les communautés Ndengler-Djilakh : Un conflit opposant le droit foncier moderne au droit foncier coutumier (Par Malcom)

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Groupe SEDIMA contre les communautés Ndengler-Djilakh : Un conflit opposant le droit foncier moderne au droit foncier coutumier (Par Malcom)
La superficie des terres faisant l'objet du conflit entre l'entreprise SEDIMA représentée par son PDG, Babacar Ngom et les communautés de Ndengler et de Djilakh est enregistrée dans le régime du domaine national. Ce régime, résulte de la réforme foncière de 1964 suites aux conclusions de l'étude faite sur le régime coutumier. Quatre-vingt-quinze pour cent des terres appartiennent au domaine national, les 5% restants sont répartis entre l'État et les tiers privés. La loi sur le domaine national pose un problème en ce sens qu'elle ne prévoit ni la transmissibilité, ni l'aliénabilité, encore moins la cessibilité des terres. Ce qui veut dire que ceux qui sont considérés comme les propriétaires ne disposent pas de droits réels, en l'occurrence les habitants de Ndengler et de Djilakh. Or, les pratiques courantes font que ceux qui cultivent les terres de façon régulière considèrent que celles-ci leur appartiennent, que ce sont leurs terres, les terres de leurs parents, grands-parents ou arrières-grands parents. Au demeurant, si on se réfère aux éclairages fournis par le PDG du Sedima lors de sa sortie du jeudi 09 juillet 2020, mentionnant avoir effectué toutes les procédures administratives d'acquisition de la superficie de terre ayant aboutit à l'obtention d'un titre foncier, est, par conséquent considéré comme le véritable propriétaire du foncier cité. Sedima qui a procède au déboisement et au débroussaillage de ces 300 ha qui font parti de l'espace dite "les terres de la zone des terroirs du domaine national" selon l'article 8 de loi relative au domaine national. Ces zones de terroir en référence toujours à l'article 8 sont régulièrement exploitées pour la culture, l'élevage ou l'habitat rural. Mais aucune de ces activités énumérées précédemment n'est constatée sur la superficie des terres en conflit. Au vu de cette situation, sur le plan juridique, ces terres n'appartiennent pas aux paysans de Ndengler ou de Djilakh. Pour être propriétaire, il faut impérativement détenir l'un des documents légaux, le bail ou le titre foncier.

Par ailleurs, l'article 8 de la loi relative au domaine national dit "la superficie des terres de la zone des terroirs sont affectées aux membres des communautés rurales qui assurent leur mise en valeur et les exploitent sous le contrôle de l'État et conformément aux lois et règlements"

Au regard de cette disposition, les questions qu'on doit se poser sont les suivantes : ces terres du domaine national avaient-elles déjà été affectées aux paysans de Ndengler ou de Djilakh? Ces terres ont-elles déjà été mises en valeur et exploitées sous la supervision des pouvoirs publics conformément aux dispositions contenues dans l'article 8 de la loi sur le domaine national de 1964? Pourquoi ce conflit survient aujourd'hui? Les paysans de Ndengler et Djilakh prétendant être les légitimes propriétaires de ces terres, ont attendu plusieurs années, depuis la délibération jusqu'à la délivrance du titre foncier au Groupe Sédima, pour manifester aujourd'hui leurs désaccords. Il aurait fallu contester l'occupation du site dès le début si on se considère léser dans ses droits et prérogatives.

Autre aspect important à souligner dans ce conflit. Si le groupe Sedima a acquis la superficie de terres dans l'objectif d'y réaliser des activités avicoles ou d'agriculture, pourquoi aller chercher un titre foncier et non se limiter seulement à un bail emphytéotique de 50 à 99 ans. Le titre foncier octroyé ne cache-t-il pas une volonté manifeste de vouloir morceler la superficie des 300 ha en terrains à usage d'habitation. On espère que ces terres vont être utilisées uniquement pour des activités avicoles ou d'agriculture. Car cette superficie, au départ est un titre foncier non inventorié qui se trouve dans l'espace des communautés rurales et qui sont des terres à vocation agricole régies par les préfectures ou les sous-préfectures. Elles ne peuvent théoriquement pas être cédées à des tiers! Sauf si la mise en valeur est constatée : construction d'un mur de clôture ou d'un bâtiment. C'est là où se situe le fond du problème : ces superficies comme celles concernées par le conflit sont mal enregistrées et font souvent l'objet de contestation sur l'origine de la propriété. Sous cet angle, il est vrai que l'État du Sénégal est responsable de cette situation.

Ce conflit foncier peut être vu sous l'anglet d'un différend qui oppose le droit foncier coutumier représenté par les paysans de Ndengler et de Djiilakh et le droit foncier moderne symbolisé par l'octroi du titre foncier au groupe Sédima. Avant la colonisation l'octroi des terres reposait sur la coutume dont les responsables étaient les chefs coutumiers. Le droit d'user de la terre était reconnu de manière informelle par la communauté. Cela égalait en quelque sorte à ce qu'on appelle "un cadastre social"

Le colonisateur a essayé de corriger ce système, de le formaliser. Il a introduit le concept de propriété privée et de titre foncier. Cette doctrine basée sur l'écrit, a été maintenue après les indépendances et coexiste actuellement avec la coutume. Deux mondes, qui souvent s'ignorent. Car les populations rurales à l'instar de celles de Ndengler ou de DJilakh se préoccupent peu, sauf lorsque leurs terres sont menacées, de disposer d'un titre. De la même façon, l'État Sénégalais ne reconnaît généralement pas le droit foncier issue de la coutume. Dans notre pays, les terres sans titres (95% du territoire) sont intégrées dans le "Domaine National". Un domaine qui n'appartient normalement ni à l'État, ni aux usagers, mais à la Nation.

La grande majorité des paysans de Ndengler ou de Djilakh et de manière générale même du Sénégal, cultivent les terres dont ils se considèrent propriétaires, mais ne disposent pas d'un droit de propriété légal et garanti. Seul un droit d'usage leur est reconnu. Une situation ambiguë, surtout lorsque l'état conserve le droit d'incorporer ces terres dans son domaine privé pour raison d'utilité publique.

Malcom


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