C’était à la veille de Noël, le 23 décembre dernier, lorsque les gorilles du Président tirèrent sur un jeune Sénégalais, un marcheur qui ne demandait que des lendemains meilleurs, en compagnie de ses camarades, déçus par l’alternance.
Il n’est nullement question, ici, de verser dans le sensationnel, en rappelant à nous mêmes et aux autres, la disparition d’un compatriote, Sina sidibé, qui a perdu la vie au cours d’une marche de protestation dans les artères de la ville de Kédougou. C’était à la veille de Noël, à l’heure où Papi Noël se pavanait tranquillement dans les airs, multipliant les voyages planétaires, entre Dakar et Paris, alors que les jeunes attendaient de lui, des cadeaux et des câlins, même si des vandales avaient profité de la marche pour s’attaquer aux symboles de l’Etat, ce qui est condamnable. Vous vous rappelez sans doute les propos du ministre de l’Information d’alors, Aziz Sow, qui déclarait, à la radio comme à la télé, que la victime, Sina Sidibé, avait été piétinée par les manifestants. Les démentis apportés à ce sujet par le légiste, qui confirma que le jeune Sina avait été victime d’une balle, jetèrent le discrédit sur un ministre, et par delà, toute une équipe gouvernementale et tout un Etat. Nous avons encore en mémoire, l’intervention de Mme Wade, qui reprochait aux jeunes, « d’être allés trop loin ». Suite aux sorties dans la presse des ministres de l’Intérieur et des Forces armées d’alors, Cheikh Tidiane Sy et Bécaye Diop, qui avaient promis de « faire toute la lumière sur ces incidents », les auteurs de cette bavure ont-ils été sanctionnés à juste titre, comme cela se passe dans une république où les institutions fonctionnent? Encore faut-il qu’on soit dans un Etat, digne de ce nom, qui revendique le monopole de la violence légitime, un Etat qui n’accepterait pas de botter en touche devant des groupes d’individus qui se croient tout permis, sous prétexte que ni la police ni la gendarmerie ne bougeront le petit doigt pour intervenir. Les menaces de mort à l’endroit de Madiambal Diagne, directeur du groupe « Avenirs Communications », publiées dans la presse le 9 avril 2008, en sont l’illustration. L’histoire se répète, me direz-vous, avec les auteurs du saccage des locaux de Walf, toujours libres comme l’albatros, et vaquant tranquillement à leurs occupations, à l’image des agresseurs de Pape Cheikh Fall, qui, dans le cadre de son travail de journaliste, en 2006, a failli succomber à son attaque à coups de barres et de câbles de fer par des individus que la police et la gendarmerie sénégalaise ont reconnus dans leur enquête sans pour autant mettre la main sur eux. Le cas de Talla Sylla est encore là, Boubacar Kambel dieng et Kara Thioune, tabassés et humiliés dans les locaux d’un stade, par des agents de la Brigade Polyvalente, la liste est loin d’être exhaustive. Voilà le Sénégal d’Abdoulaye Wade, un « Etat de droit » où n’importe quel citoyen, du jour au lendemain, peut devenir un Talla Sylla, un Kambel ou un Sina. Reste aux personnes éprises de paix et de justice sociale, de se consoler avec des larmes, parce chaque chose à une fin, et l’impunité ne saurait durer. La liberté, comme la justice, ne s’offre pas, elle s’arrache, et elle a un prix. Repose en paix, Sina, et que la terre de Kédougou te soit légère.
Momar Mbaye
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