Alors que les monnaies numériques de banque centrale (CBDC) gagnent du terrain à l’échelle mondiale, l’e-CFA, projet porté par la BCEAO, reste encore à l’état embryonnaire dans l’Union économique et monétaire ouest-africaine. Lancée à titre expérimental, la version digitale du franc CFA n’a toujours pas dépassé sa phase pilote, et les perspectives de généralisation restent floues.
Sur le papier, l’objectif est clair. Il s’agit de moderniser les systèmes de paiement, renforcer l’inclusion financière et réduire les coûts des transactions dans une région où la bancarisation reste faible. L’e-CFA permettrait d’offrir un accès élargi à une monnaie fiable, sans passer par les canaux bancaires traditionnels. Mais dans les faits, l’ambition bute sur des freins persistants.
Les infrastructures numériques restent inégalement réparties, les cadres réglementaires encore insuffisants et les enjeux de cybersécurité préoccupent. De plus, les banques commerciales perçoivent parfois ces projets comme une menace pour leur modèle économique, ce qui freine leur collaboration active. Le manque de transparence sur les modalités techniques du projet ajoute à la confusion.
Dans un contexte où le débat monétaire prend une dimension symbolique forte, l’e-CFA illustre les tensions entre modernisation technologique et inertie institutionnelle. La BCEAO avance prudemment, consciente qu’un faux pas pourrait fragiliser davantage la crédibilité du franc CFA, déjà largement contesté dans plusieurs pays membres.
Le ralentissement du projet soulève une question plus large. Peut-on se contenter d’un outil numérique sans repenser les fondements politiques et économiques du cadre monétaire ouest-africain ? Car derrière l’innovation, c’est la souveraineté monétaire qui reste en suspens. Et sans réponse claire, la version digitale du CFA risque de n’être qu’un ravalement technologique d’un système toujours aussi centralisé.
Commentaires (0)
Participer à la Discussion