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La souveraineté économique, « un mythe politique face à la dépendance structurelle », selon Pr Amath Ndiaye

Auteur: Seneweb News

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 Dans une analyse intitulée « La souveraineté économique : entre mythe politique et dépendance structurelle », Pr Amath Ndiaye, économiste et Professeur à la FASEG-UCAD, décortique la notion de souveraineté économique, souvent invoquée dans les discours politiques, notamment au Sénégal. Il argue que, bien qu’attrayante sur le plan symbolique, elle reste largement illusoire dans un monde interdépendant, plaidant pour des concepts plus opérationnels comme le développement endogène.
Un concept politiquement mobilisateur mais économiquement irréalisable
Pr Ndiaye souligne que la souveraineté, concept juridique et politique désignant l’indépendance d’un État, est difficilement transposable à l’économie. « Dans un espace économique globalisé, transfrontalier et intégré, aucun État ne peut revendiquer une souveraineté absolue », écrit-il. Il rappelle que les économies modernes reposent sur des flux transnationaux de biens, capitaux, technologies et informations, rendant l’autonomie totale illusoire. Plutôt que de souveraineté économique, il propose de parler de «développement endogène », « autosuffisance sectorielle » et « sécurité économique », des notions plus pragmatiques.
Les limites de l’autosuffisance : une leçon historique
Pr Ndiaye revient sur les théories de David Ricardo au XIXe siècle, qui démontrait que l’autosuffisance en blé de l’Angleterre augmentait les coûts de production et nuisait à sa compétitivité industrielle. Ricardo prônait l’importation de blé à bas prix pour stabiliser les salaires et renforcer l’industrie, posant les bases des avantages comparatifs. Cet exemple historique illustre, selon Pr Ndiaye, les limites d’une quête d’autosuffisance absolue dans un monde interdépendant.
L’économiste cite des cas empiriques pour appuyer son propos : 
 
- Le Japon, une puissance industrielle, importe 100 % de son pétrole, gaz et charbon, et 40 % de son alimentation. 
 
- Le Royaume-Uni post-Brexit, qui a cherché à reprendre sa souveraineté économique, subit une croissance faible (0,1 % en 2023 contre 2,3 % en 2015), une inflation élevée (11,1 % en octobre 2022 contre 0,4 % en 2016), une chute des exportations vers l’UE (de 216 Md£ en 2019 à 177 Md£ en 2024) et une dépréciation de la livre sterling d’environ 10 %.
- Les pays africains, bien que souverains politiquement, restent dépendants des dettes extérieures et des marchés mondiaux des matières premières.
Le développement endogène comme alternative
Pr Ndiaye propose le développement endogène comme une approche réaliste, compatible avec la mondialisation. Ce modèle repose sur l’intégration stratégique dans les chaînes de valeur mondiales tout en maximisant la valeur ajoutée nationale. Il vise à renforcer le tissu productif interne par une meilleure articulation des secteurs, sans prôner l’autarcie. « Le développement endogène est intelligent et ouvert. Il s’appuie sur des facteurs exogènes – capitaux, technologies, savoir-faire – pour dynamiser l’économie nationale », explique Pr Ndiaye, s’opposant ainsi au chauvinisme économique ou au mercantilisme moderne, comme celui prôné par l’administration Trump.
Pour les États africains, Pr Ndiaye recommande une mutualisation des stratégies sectorielles à l’échelle régionale pour accroître leur résilience et leur influence internationale. Cette approche élargie intègre des dimensions économiques, diplomatiques et régionales, renforçant la sécurité économique face aux crises globales.
Auteur: Seneweb News

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