El Hadj MBODJI (Constitutionnaliste) : ‘C'est révolu l'élection du président de la République au 1er tour’

Le Pr El Hadj Mbodji dégage en touche toute idée d'élection du président de la République au premier tour. Le constitutionnaliste a fait cette déclaration à l'Université Gaston Berger de Saint-Louis où il animait une conférence sur le thème ‘le rôle du juge électoral’, initiée par le collectif des élèves et étudiants de la Ca 2007.

(Correspondance) - ‘Mathématiquement, matériellement, il est impossible de retrouver un candidat qui recueille, sur sa personne, le suffrage d'un électeur sénégalais sur deux. Ce n'est pas possible. Les rapports de force, pour ces élections, sont tels qu'aucun candidat ne peut être élu au premier tour’. Ainsi parlait à l'Ugb de Saint-Louis, le Pr El Hadj Mbodji qui explique que, ‘dans le système de parti dominant, ce qui prévalait jusqu'à l'alternance est que le parti au pouvoir avait une majorité sociologique qui lui permettait d'avoir la majorité électorale. Mais ce qu'on constate, depuis l'alternance, c'est une certaine dispersion des forces politiques, ce qui débouche sur un certain équilibrage en ce qui concerne les partis politiques’.

Prenant exemple sur la France, où, selon le conférencier, le scrutin majoritaire à deux tours avait été introduit en 1962, de 1965 à l'an 2000, aucun président français n'a été élu au premier tour, y compris le général De Gaulle, El Hadj Mbodji d'affirmer que ‘c'est fini, c'est définitivement révolu, au Sénégal, l'élection d'un président de la République au premier tour’. La magistrature est le poumon du processus électoral. Il est fondamental que le juge soit indépendant, soutient le Pr El Hadj Mbodji qui précise, par ailleurs, que ‘l'indépendance est un état d'esprit, tout dépend de la personnalité de l'individu qui exerce la fonction de juge’. L'agrégé de droit public et de sciences politiques de laisser entendre que ‘le juge ne doit jamais trancher en fonction des opportunités du moment, mais parce qu'il est intimement convaincu. Le juge doit être au-dessus de tout soupçon parce que c'est de lui que dépend le devenir d'une société, il incarne la confiance, le respect, la crédibilité du système démocratique’.

En outre, le Pr El Hadj Mbodji a expliqué, à l'occasion de son face-à-face avec les étudiants progressistes, que le présent processus n'est pas consensuel. Selon El Hadj Mbodji, si les élections de mars 2000 ont débouché sur l'alternance, c'est parce que le processus d'alors était fiable, consensuel, patiemment bâti et élaboré par tous les acteurs politiques à partir de la concertation de 1988, à partir de la table ronde présidée par le président Kéba Mbaye en 1991-1992 et à partir de la concertation de 1997.

Toutes les règles qui président à la désignation des titulaires de rôles politiques, ont été arrêtées d'un commun accord des différents acteurs politiques. Or, regrette le Pr Mbodji, force est de constater que, depuis l'avènement de l'alternance, on assiste à une politique de ‘la taboula rasa’ avec la refonte totale du fichier électoral, la numérisation et biométrisation des cartes d'électeur sans le consensus et les études préalables. Récemment, des modifications ont été apportées à la loi électorale en pleine campagne électorale, ce qui va à l'encontre du consensus qui est indispensable à consolidation de la démocratie.