FÊTE DU 14 JUILLET AU SÉNÉGAL : Quand Jean Christophe Rufin fait ses adieux

La fête nationale du 14 juillet a été célébrée hier par l’ambassade de France au Sénégal. La cérémonie a été marquée par l’annonce du départ de l’ambassadeur Jean-Christophe Rufin. Le diplomate s’en va après avoir marqué le Sénégal. Tant du point de vue de son style, dans ses relations avec les autorités du Sénégal, que par la qualité des relations jugées « cordiales » qu’il entretient avec bon nombre de nos concitoyens.

La communauté française au Sénégal a fêté hier le 14 juillet, fête nationale de la France. A cette occasion, l’ambassadeur de la France au Sénégal a organisé un cocktail dînatoire dans les jardins de sa résidence, au Cap Manuel. Une occasion saisie par le diplomate et académicien pour annoncer son départ. En prenant la parole que M. Jean Christophe Rufin a fait ses adieux en soutenant que c’est le dernier 14 juillet qu’il va fêter au Sénégal. Non sans revenir sur les trois années qu’il a passées au Sénégal et les faits qui ont marqué son passage au pays de la Téranga. Rufin a magnifié l’hospitalité «des Sénégalais qui vous accueillent à bras ouverts, mais qui ne s’ouvrent pas à vous facilement». L’ambassadeur de France au Sénégal a aussi relevé la propension qu’ont certains Sénégalais à s’enquérir du temps qui lui reste à passer dans notre pays. C’est la preuve, dira-t-il, qu’il n’a pas toujours été le bienvenu au Sénégal pendant tout le temps qu’il y est resté. Et à ce propos, il reconnaît que quand il est arrivé, il s’est permis de parler avec franchise et sans langue de bois sur des questions qui concernent le Sénégal. Mais on lui a très vite fait comprendre que ce n’est pas comme cela qu’il devait opérer. Mais estime-t-il, il a réussi « à se faire entendre sans parler», car le Sénégal est un pays où tout est possible.

Rufin va garder néanmoins de bons souvenirs du Sénégal. Du fait justement du rôle qu’il a joué dans la coopération bilatérale entre les deux pays, mais aussi dans la promotion de la nouvelle image de la France qu’il a véhiculée au Sénégal, en particulier, et en Afrique, en général. Il a annoncé de grands projets que la France a décidé de réaliser au Sénégal. Une preuve, dira-t-il, de la vitalité des rapports entre les deux pays. Pour finir, il a félicité Me Abdoulaye Wade de sa médiation réussie dans le conflit mauritanien. Après son speech, M. Cheikh Tidiane Gadio a pris la parole pour le féliciter au nom du président de la République, mais aussi pour magnifier le travail qu’il a effectué au Sénégal. Et il souhaite que son départ ne soit pas effectif, et que si tel était le cas, que son remplaçant soit une personne de sa dimension.

Pas très connu dans les milieux populaires au Sénégal, Jean Christophe Rufin jouit d’une bonne image au sein de l’intelligentsia sénégalaise. Auteur de plusieurs ouvrages, culturellement métissé, il est vu dans le monde des Lettres comme un homme de plume « profond ».

Comment Rufin a marqué le Sénégal

«Au Sénégal, il est très difficile de garder des secrets. Tout le monde sait tout, ou tout le monde croit tout savoir, donc dit n’importe quoi et donc nous préférions dire les choses comme elles sont. Le dire de façon transparente.» Ces propos de Jean Christophe Rufin, ambassadeur de la France au Sénégal, tenus à l’occasion de la cérémonie de signature d’un prêt de 82 milliards de FCfa de la France au Sénégal, au ministère de l’Economie et des Finances, avait fait sensation. Aux yeux de nombre de Sénégalais voire ailleurs, c’était déplacés.

Sokhna Dieng Mbacké, 7e vice-présidente du Sénat, était montée au créneau pour réclamer des «excuses publiques». M. Rufin avait répondu en signalant que ces propos n’étaient qu’un trait d’humour. Mais aussi qu’il ne faut pas que «ces polémiques détournent des vraies questions». Il s’en était est suivi un vaste débat sur la question. Et des rumeurs ont couru faisant état d’une lettre que le Quai d’Orsay aurait reçue du gouvernement sénégalais lui demandant de rappeler leur ambassadeur. Le chef de la diplomatie sénégalaise avait alors démentir cette information.

A la suite de ses sorties, des Sénégalais ont vite fait de l’accuser de s’immiscer dans la politique intérieure sénégalaise. Surtout lorsqu’il a décidé de remettre une distinction à Macky Sall, alors combattu au sein du Pds. Là aussi, le diplomate français avait répondu en soutenant que «ceux qui prétendraient que la France veut s’immiscer dans la politique intérieure sénégalaise en vous (Macky Sall) remettant cette distinction se trompent lourdement». Dans cette mise au point diplomatique, M. Rufin va déclarer que ceux qui tenteront de considérer la distinction de Macky Sall comme un choix de la France dans la bataille de succession de Wade auront fait une «interprétation hasardeuse».