Le gouvernement du Sénégal a publié, avec un retard notable, le rapport d’exécution budgétaire du premier trimestre 2025. Un document pourtant attendu, censé offrir une visibilité sur l’état des finances publiques du pays. Ce décalage, injustifié, heurte les principes fondamentaux de transparence et de redevabilité en matière de gestion publique, constate l'ancien juge Ibrahima Hamidou Dème.
La ponctualité dans la publication des rapports officiels est une exigence de la bonne gouvernance. Elle ne relève pas d’une simple formalité administrative mais constitue une obligation démocratique. Dans une République moderne, les citoyens doivent avoir un accès régulier, fiable et clair à l’information sur la gestion de leurs ressources.
Au-delà du retard, un problème plus structurel se pose : la manière dont cette information est diffusée.
"Mais au-delà du retard, on constate qu’on se contente encore de diffuser un document technique à la presse, sans aucune explication destinée au grand public, sans aucune pédagogie institutionnelle. Comme je l’avais déjà souligné dans une contribution publiée le 21 février 2025 à propos du rapport de la Cour des comptes, lorsqu’on publie des documents techniques pour informer les citoyens, il faut les rendre intelligibles, compréhensibles et accessibles", note juge Déme.
Les rapports budgétaires sont souvent rédigés dans un langage hautement technique, réservé aux spécialistes et experts. Cela crée une distance démocratique : les citoyens, pourtant concernés au premier chef, se retrouvent exclus de la compréhension des décisions qui les impactent.
Ainsi pour juge Dème, la transparence ne se résume pas à la simple mise à disposition de documents en ligne. Elle suppose un effort actif pour rendre l’information intelligible, accessible et utile au débat public. À défaut, la publication de ces documents reste un exercice formel, sans portée réelle sur la conscience citoyenne ni sur le contrôle populaire.
"C’est pourquoi je propose que chaque publication d’un rapport public qu’il s’agisse d’un rapport d’exécution budgétaire, d’un audit ou d’un rapport émanant des corps de contrôle soit systématiquement accompagnée d’une conférence de presse explicative dans laquelle les autorités compétentes présentent les points essentiels, répondent aux questions des journalistes et communiquent également dans les langues nationales. Une telle démarche renforcerait la transparence, la confiance publique et l’appropriation citoyenne de l’action de l’État. La démocratie ne se résume pas à la simple diffusion de l’information ; elle exige aussi sa vulgarisation pour nourrir le débat public. Il est temps de passer de la publication formelle à la pédagogie républicaine", affirme-t-il.
Commentaires (0)
Participer à la Discussion