Marrakech accueille, du 14 au 16 avril, la troisième édition du GITEX Africa. En ce premier jour, il ne suffisait que d’un pas dans les allées de cet événement pour sentir battre le pouls de l’innovation africaine. Et parmi les battements les plus audibles, celui du Sénégal, venu en force et bien décidé à peser dans la balance continentale du numérique.
«?Vous avez dit délégation sénégalaise assez nombreuse. Oui, nous sommes bien représentés en effet. Nous avons à peu près 50 entreprises qui sont ici à Marrakech pour la Gitex 3?», a affirmé l’ambassadrice du Sénégal au Royaume du Maroc, manifestement fière de l’engagement national. Elle précise?: «?Nous avons de grandes entreprises sénégalaises dans le domaine du numérique. Nous avons nos sociétés nationales. Nous avons la partie officielle parce que nous avons une participation gouvernementale ».
Au cœur de cette mobilisation se dessine un objectif clair?qui est d’exposer les avancées sénégalaises, tisser des alliances et faire rayonner un écosystème en pleine mutation, structuré autour d’une ambition désormais affichée : le New Deal Technologique.
Cette dynamique, impulsée par l’État et portée par le secteur privé, a trouvé à la GITEX un terrain fertile. Aïssatou Jeanne Sy Ndiaye, directrice des TIC au ministère de la Communication, de l’Information et du Numérique, précise l’enjeu?: «?Ce GITEX Africa est un rendez-vous de l’innovation et de la technologie. Nous sommes venus non seulement accompagner nos start-upers et notre secteur privé local, mais aussi nouer des partenariats stratégiques ». Elle défend une vision souveraine et inclusive du numérique, où le partenariat se construit sur une logique «?gagnant-gagnant?» : «?La technologie est ramenée au Sénégal par les partenaires. Et ces partenaires-là en profitent pour former le capital humain et laisser cette technologie-là pour non seulement maîtriser les risques, mais maîtriser aussi les dépendances technologiques ».
Sur le terrain, les entreprises sénégalaises déploient leurs solutions. ODS, acteur de la digitalisation des services publics, met en avant ses plateformes de signature électronique, comme l’explique son directeur général, Daniel Sarr : « ?Nous avons plusieurs types de solutions que nous appliquons. Et la solution phare que nous présentons, c’est vraiment un portail développeur pour permettre d’accéder à toutes les solutions de signature électronique?». L’ambition est claire : se positionner à l’échelle régionale, voire continentale, et accompagner d’autres États, comme la Côte d’Ivoire ou le Bénin, « sur des projets d’envergure?».
Autre figure de proue de cette délégation, Henri Ousmane Gueye, cofondateur d’Eyone Médical et lauréat du prestigieux concours Africa Business Heroes 2024. Il mise sur la continuité. «?Effectivement, c’est dans la continuité de la victoire qu’on a eue au Africa Business Heroes. […] Pour nous, c’est de valoriser cette victoire?», confie-t-il. Sa solution?: un carnet de santé numérique universel, qui permettrait à un patient de se déplacer d’un pays à l’autre avec ses données médicales intégrées. «?Notre rêve ultime est d’avoir un patient qui quitte le Sénégal, qui vient au Maroc, qui va au Mali, au Côte d’Ivoire, qui se déplace toujours avec son carnet de santé numérique ».
Dans les couloirs de l’événement, le mot «?partenariat?» résonne comme un refrain. Maïssa Ndiaye, directeur commercial d’Ages Logiciels Services, l’assume sans détour?: «?Ce que nous voulons, c’est un peu marquer notre présence dans les autres pays de la sous-région. […] Ce que nous voulons, c’est de nouer des partenariats, parce que derrière, il y a des solutions complémentaires que nous remarquons déjà avec nos amis de la sous-région ».
Même élan chez Sidy Aidara, fondateur de Sassoumane Cosmetics, qui introduit l’univers de la beauté dans l’équation technologique. Sa marque 100 % sénégalaise mise sur la personnalisation et l’innovation?: «?Le client peut entrer sur le site, prendre sa photo, et en fonction des informations qu’il aura remplies, tels le lieu où il vit, ou bien son type de peau, l’application va lui générer des produits?». L’idée est de concevoir des cosmétiques sur mesure, formulés pour les pays tropicaux, en exploitant les ressources locales telles que le fruit de baobab plus connu sous le nom de « Bouye », riche de propriétés antiseptiques et antibiotiques.
Cette présence multiple, articulée autour d’une même ambition, s’inscrit dans une logique de rayonnement. «?L’idée, à travers cette exposition, c’est de montrer l’importance du secteur au niveau national, mais aussi les innovations qui sont développées par nos startups », comme le rappelle l’ambassadrice du Sénégal.
À Marrakech, le Sénégal n’est pas seulement venu participer. Il est venu affirmer une stratégie, renforcer des alliances, inspirer et s’inspirer.
Auteur: Moustapha TOUMBOU et Oumar SAMB (Envoyés spéciaux)
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