Calendar icon
Wednesday 03 September, 2025
Weather icon
á Dakar
Close icon
Se connecter

[Focus] Les ressorts du déclin de l'Influence française en Afrique

Auteur: Moustapha TOUMBOU

image

[Focus] Les ressorts du déclin de l'Influence française en Afrique

Les relations entre la France et ses anciennes colonies africaines connaissent une mutation perceptible et profonde. La perception négative croissante de la France se manifeste à travers diverses manifestations, déclarations et confrontations politiques. Mais derrière cette perception médiatique se cachent des nuances qui méritent une analyse approfondie. Cheikh Guèye, géographe, chercheur et secrétaire permanent du Rapport alternatif sur l’Afrique (Rasa), apporte son éclairage sur ces dynamiques évolutives.
Une Influence en mutation
Dans un entretien exclusif avec Le Point Afrique, Cheikh Guèye expose les nuances de la perte d'influence de la France en Afrique. "Oui, clairement, elle perd du terrain, mais ce n’est pas nouveau", explique-t-il. Il souligne que la France est passée d'une position dominante historique à un rôle plus contesté sur la scène internationale, en particulier dans ses anciennes colonies. L'enseignement par la langue française, la diplomatie, la culture et l'information continuent néanmoins de maintenir une influence dans ces régions.
Reproches et ruptures
Les reproches envers la France sont variés et souvent profonds. En plus des soucis d’ingérence dans les processus électoraux ou la gestion économique de certains États, le pays de Marianne voit son image s’écorner un peu plus chaque jour pour diverses raisons. "De ne pas vouloir changer d’époque, de posture et de politique", déclare Cheikh Guèye, faisant référence à une résistance à s'adapter aux nouvelles réalités en Afrique. Les générations actuelles, inondées d'informations sur l'évolution mondiale, exigent des ruptures profondes. Le contrôle persistant des pouvoirs africains, la présence militaire excessive et la politique migratoire restrictive sont autant de points de discorde d’après le géographe. 
Vers une hostilité économique ?
L'hostilité économique est pour l'instant circonscrite, selon Cheikh Guèye. Les dirigeants africains continuent de travailler avec les institutions financières et les entreprises françaises. Cependant, les jeunes franges de la population et certaines classes politiques voient en ces dirigeants des relais de l'impérialisme français. Le rejet de la Françafrique est à la base de nouvelles forces politiques en émergence, potentiellement capables d'accéder au pouvoir et d'entraîner des tensions économiques accrues. « De nouvelles forces politiques naissent autour du rejet de la Françafrique et leur popularité grandit rapidement. Elles pourraient accéder au pouvoir dans les prochaines années et ceci pourrait déclencher une véritable hostilité économique, voire une chasse aux biens français », émet-il comme avertissement.
Manifestations et Symbolisme
L'hostilité envers la France se manifeste parfois de manière violente. C’était le cas au Sénégal où les intérêts français avaient été vandalisés à l’exemple d’Auchan. De même qu’au Niger avec l’attaque qu’a subi l’ambassade de France de la part des locaux sur fond de slogan anti-français. "Les manifestants répondent par la symbolique qui consiste à montrer du doigt le pays qui leur pose problème en s’attaquant et en pillant les enseignes françaises", explique Cheikh Guèye. Il interprète cette opposition « symbolique » comme la traduction d’un rejet de l'impérialisme français en Afrique de l'Ouest.
Passé Colonial et Perspective d'Avenir
La source de l'hostilité politique réside principalement dans la politique française plutôt que dans la France en tant que pays ou peuple de l’avis du géographe. Les jeunes Africains se reconnaissent dans un sentiment anti-impérialiste et anticolonial. La mémoire des injustices passées, comme l'esclavage et la colonisation, ainsi que les modalités actuelles de domination, alimentent ce ressentiment. Pour Cheikh Guèye, une reconnexion sincère avec ce passé est essentielle pour redéfinir les relations entre les jeunes Africains et les anciennes puissances coloniales.
Vers de Nouvelles Alternatives
Les pays concurrents comme la Russie offrent aux anciennes colonies africaines la possibilité de diversifier leurs partenariats, réduisant ainsi la dépendance à la France. "L’idée de pré carré français disparaît en lien avec les offensives des autres pays", explique Cheikh Guèye. Les relations franco-africaines évoluent dans un contexte géopolitique en mutation, offrant de nouvelles alternatives et défiant les schémas mentaux passés.
Auteur: Moustapha TOUMBOU

Commentaires (0)

Participer à la Discussion