Les processus de passation de marché sont considérés comme un élément important dans l’évaluation du niveau de compétence d’une administration, et aussi bien que de l’honnêteté des fonctionnaires d’un pays. Engagé dans un processus de transparence de ses comptes publics, le Sénégal a entrepris de former son administration à la mise en œuvre de son nouveau Code des marchés. Mais le rapport d’audit réalisé un an après l’entrée en service dudit code, démontre que le chemin est encore long pour en finir avec la corruption.
Le Sénégal a voulu, il y a environ quatre ans, se doter d’un Code des marchés publics considéré comme favorisant la transparence. Cependant, il semble que beaucoup d’efforts doivent encore être réalisés par les différents démembrements de l’Administration pour adopter et mettre en application les dispositions du Code. Un rapport d’audit a posteriori, du cabinet Kpmg Audit Sénégal, épingle les pratiques de passation de marchés dans certains départements ministériels, et montre que, pour l’année 2003 du moins, ces pratiques n’étaient pas en adéquation avec les dispositions du Code des marchés publics (Cmp).
Le rapport, datant du 4 novembre de l’année 2005, avait selon ses auteurs, «pour objectif principal, au sein des ministères chargés de l’Education, de la Santé, de l’Hydraulique, de l’Habitat, de l’Equipement et de l’Economie et des Finances, de vérifier le processus de passation des marchés selon l’actuel code des marchés publics pour les contrats signés entre le 1er janvier 2003 et le 31 décembre 2003, afin de mesurer le degré de respect des dispositions et procédures édictées par le code». Les ministères ciblés l’ont été sur la base de l’importante quantité des marchés qu’ils passent annuellement.
L’audit devait servir pour eux, de test, après un appui institutionnel des bailleurs de fonds, de l’application de l’article 246 du Code en question. Cet article porte sur les audits externes et réglemente les conditions de transparence et de régularité des procédures d’élaboration, de passation et d’exécution des marchés publics. C’est donc en toute bonne volonté que les administrations concernées se sont soumises à cet audit, après une forte pression du ministre de l’Economie et des Finances. Les auditeurs ont reçu des documents concernant des marchés passés pour plus de 44,8 milliards de francs Cfa. Ils précisent cependant avoir analysé des contrats représentant une dépense de plus de 25,9 milliards de francs.
Le document relève de manière générale, des carences importantes en matière d’expression des besoins, des conditions et critères de sélection et d’attribution des marchés, des lenteurs dans les procédures de dépouillement, et des négligences dans le suivi des délais d’exécution des contrats, entre autres. Les recommandations qu’il porte sur des points importants, indiquent dans le même temps, la légèreté des systèmes en vigueur dans les procédures de passation de marchés de l’administration. Et aucune des structures concernées n’est épargnée par les remarques de l’auditeur. S’agissant par exemple de la plus connue des profanes, la Commission nationale des contrats de l’administration, Kpmg déplore que, pour une structure chargée de contrôler les procédures de passation des marchés publics, ainsi que de donner un avis, favorable ou défavorable aux propositions d’attribution de marchés, en plus de diffuser la liste des entreprises et des fournisseurs ayant failli aux clauses des marchés, «la Cnca ne dispose pas d’une liste exhaustive des marchés autorisés par ministère. Elle disposerait, selon ses responsables, d’une liste manuscrite établie sur la base des marchés examinés par elle lors de ses réunions». Ce qui fait que les auditeurs n’ont pu avoir de la Cnca la liste des marchés autorisés et passés au titre de l’exercice 2003, ni la liste des réclamations effectuées par les soumissionnaires au cours de l’exercice en question.
En ce qui concerne le Bureau des marchés (Bm), attaché à la Direction générale des finances (Dgf), du ministère de l’Economie et des Finances (Mef), ou les Missions de contrôle interne (Mci) de chaque ministère, les auditeurs souhaitent leur réforme et le contrôle de leur fonctionnement effectif. Parmi les cas de carence du Bureau des marchés, le rapport indique que «les marchés figurant sur la liste qui nous a été transmise ne sont pas numérotés alors que c’est le Bm qui est en charge de la numérotation des marchés… Le rapport annuel au titre de l’exercice 2003 du bureau prévu par le Cmp, n’a pas été mis à notre disposition au cours de notre mission». Plus intéressant encore, si l’on ose dire, le cabinet d’audit relève que certains marchés ont été notifiés parfois plusieurs semaines après l’établissement du bordereau de notification, et que la date de réception par le fournisseur n’est pas toujours mentionnée.
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