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Leçon et questionnements au sujet de l’émeute du 3 mars au Sénégal (Par Mme Gaye Mariame Diouf)

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Leçon et questionnements au sujet de l’émeute du 3 mars au Sénégal (Par Mme Gaye Mariame Diouf)

L’émeute du 3 mars a surpris. Comment une malheureuse histoire de mœurs a pu déclencher tant de violences ? Tant de fois des faits divers similaires sont publiées dans les journaux. La justice les a réglés sans bruit.

Dans le cas présent, la légitimité de la justice a été un sujet de controverse. Le contexte économique, social et sanitaire du corona virus avait déjà suscité un mécontentement et un malaise des populations confirmé par la presse écrite et en ligne.

Des biens publics et privés ont été pillés voire incendiés. Ces comportements ont été inattendus. La violence a sévi. Des jeunes sont morts. Qu’est ce qui a conduit à l’émeute ? Quelle leçon faut-il en tirer ? 

  1. Les facteurs déclencheurs de l’émeute


  1. Un fait divers

Le fait divers a opposé une citoyenne à un citoyen leader d’un parti politique dans un cadre illicite et sans norme de sécurité (service offert à l’heure du couvre-feu).


  1. Le débat sur la légitimité des procédures justiciaires


A priori, la justice est neutre et équitable pour tous les citoyens. Et si le vice biaisait ce précepte, ce serait l’apocalypse. Un débat sur la légitimité des procédures judiciaires remet en question son application et met le doute dans la confiance de nos populations en nos institutions. Le citoyen simple est encore étonné qu’un fait divers amène un tel débat.

Dans un pays où la constitution et la loi sont bien assises, il appartient aux intellectuels, aux journalistes et aux bonnes volontés de mener les réflexions qui rendent la justice impartiale et transparente. Ils surveillent alors, tous actes qui dérogent à sa rédaction et son application correctes. De ce fait le pouvoir a peur de transgresser et les acquis démocratiques évoluent positivement.

Dans le cas de cette émeute, le débat sur la légitimité de la procédure judiciaire a été un des facteurs déclencheur.


  1. Un contexte 

Une situation de malaise général a sévi un an après le début de la pandémie du corona virus. Il est noté une crise proche d’une récession dans des secteurs d’activité comme le tourisme, Commerce…etc. 

Les échanges internationaux et l’exécution des projets d’investissements ont été ralentis. 

Les mesures restrictives et le couvre-feu ont gêné le secteur informel (dibiterie, vendeuse de couscous, Fondé…etc). 

Les émigrés n’ont plus eu les mêmes moyens financiers d’envoyer de l’argent. 

Le chômage a explosé. Les business ont marché moins bien.

La pauvreté s’est installée et intensifiée.

La pression a été forte et pesante, d’autant plus qu’une bonne partie de la population avait un avis mitigé sur l’existence du virus. 

Les problèmes qui existaient déjà avant la pandémie tel que le chômage a été amplifiés. La population silencieuse a eu un ras le bol. 


  1. Un mécontentement des populations et des moyens d’échange nouveaux

Le peuple affamé a profité de cet évènement pour piller, incendier et exprimer sa colère. Ce qui a étonné, c’était surtout la mobilisation des populations, la spontanéité des actions, leur vitesse de propagation et leur niveau de dispersion géographique.

Les canaux de communication tels que les réseaux sociaux ont dû être sûrement largement utilisés.

Personne n’avait de visibilité sur ce qui allait se passer. 

La police s’est opposée. L’état s’est prononcé. La violence a explosé.

Les réseaux sociaux se sont révélés aux sénégalais comme des médias à haute audience avec des niveaux de pollution et mode d’assimilation de l’information encore inconnus de tous.


  1. Les communications des politiques


Le discours de l’émissaire de l’état loin de calmer les esprits, les a heurtés tandis que celui du leader du pastef a communiqué l’image de l’homme de la situation.

Le peuple, sous la préssion de la pauvreté amplifiée par la pandémie avait porté ses propres doléances et contestations dans la rue. Les politiques ont cafouillés.

Le méli-mélo avait pris le dessus sur la cohérence. 

Le sens de l’éthique, du respect des institutions et des valeurs n’a pas pesé. Le peuple s’est déchaîné. Les raisons réelles du soulèvement de la population n’ont pas été identifiées. En réalité, L’état n’avait aucun moyen de jauger les situations.


  1. Qui étaient les manifestants ?


Les manifestants étaient surtout des jeunes qui contestaient la culpabilité du leader du pastef ou qui sortaient pour crier leur insatisfaction pour des raisons économiques. 


  1. Quelles conséquences ?


  1. Pertes

La perte est financière. Elle est humaine. Elle dégrade notre crédibilité internationale remet en question nos valeurs, désavoue le comportement des jeunes et celui des politiques.


  1. Une anarchie plus qu’une révolution

L’histoire raconte que toutes les fois où la pauvreté ou l’injustice ont atteint un seuil insupportable, à maturité, de nouvelles idées naissaient de la situation.

Selon la qualité des porteurs, elles pouvaient soit produire de grands faits menant en révolutions ou dégénérer en un tâtonnement incohérent et anarchique.

Ces révolutions ont pu être sociale, industrielle, culturelle et politique. 

Elles ont marqué des mutations qui ont grandi la société et l’ont transformé positivement en société de référence. 

L’anarchie a constamment blesse la société, elle l’a toujours réduite à sa plus petite expression. Elle a été chaque fois un évènement sans valeur ajouté, au contraire, elle a dégradé les acquis et dévalorisé la dignité humaine.

Les conséquences de l’émeute ont semblé plus proches d’une anarchie qu’une révolution.

La disproportion et la démesure avaient pris le pas sur le raisonnement. Tout ce qu’on a pu retenir est regrettable.

  1. Les leçons à tirer de l’émeute


  1. faire évoluer le comportement de notre jeunesse 


Nous nous efforçons d’inculquer à nos enfants une formation sociale, spirituelle et scolaire. Nous leur communiquons des valeurs.

Ils acquièrent de l’expérience en se frottant à leur environnement et s’enrichissent. Ils murissent. 

Les niveaux d’appropriation et de capacité de progression sont d’abord individuel et conditionnés par des stimulateurs, opportunités et symboles.

La jeunesse est créative et prodige lorsque les opportunités sont multiples, les stimulateurs actifs et que ses symboles se réfèrent à des valeurs fondamentales. Elle est alors vertueuse et pleine de bon sens même en face des difficultés parce qu’elle est responsable.

Ici le droit à la formation limite les facteurs de hasard, et les impondérables. Les opportunités de développements individuelles favorisent l’emploi.

Les stimulateurs motivent. Et les symboles canalisent les pensées.

Dans le cadre de cette émeute, on a eu affaire à une jeunesse imprévisible.

Une réflexion sur l’éducation des jeunes, leur comportement, les politiques et stratégies qui leur sont dévolues est à explorer.

Mes pensées vont à la biographie de Monsieur Amadou Mactar Mbow. Il rencontre Mr Blaise Diagne qui devient pour lui un stimulateur et lui ouvre une opportunité d’étudier. 

Il a une formation sociale forte fondée sur des valeurs.

« Mon enfance a été une enfance de vertu dans une société difficile » a-t-il répondu à la question du journaliste : « votre enfance a-t-il été un éden ? »

Ses capacités individuelles ont sûrement concouru à réaliser son parcours exceptionnel.

Certains diront : « il a eu de la chance ». D’autres y verront la main de DIEU. C’était son destin.

L’exceptionnel et le prodige pourrait aussi être démultiplier du fait de la main de l’homme par une contribution positive de la famille, de la société et de l’état de façon plus globale, l’ensemble en symbiose.


  1. Accompagnement des transformations sociales et technologiques 


Aux sciences sociales et politiques, aux économistes, aux scientifiques, aux guides spirituels aux gardiens de la tradition, à toutes les bonnes volontés, Il appartient d’alimenter la réflexion pour un meilleur accompagnement de notre jeunesse.

Les TIC ont été démocratisés. Aux états Unis, ces réseaux ont été les principaux outils qui ont porté D Trump à la victoire. Ailleurs, aussi ces mêmes outils ont opéré pour mener à une insurrection ou révolution comme dans le cas présent. Le fait est que leur pouvoir ne dépend pas des structures de l’état et peut échapper à son contrôle.

La singularité du Sénégal est le pouvoir des guides religieux. Il exerce une pression forte sur les consciences populaires et a les aptitudes de les ramener à la sérénité.

Ce formidable pouvoir de pression a arrêté l’émeute et sauver le pays.

Aujourd’hui ni les sociologues, ni les politiques ne connaissent le comportement des populations à travers les réseaux sociaux. Ils sont un lieu d’échange où la communication est forte, neutre et tout le monde a accès à la prise de parole. Il n’y a pas de filtre. Il n’y a pas de censure.

Les mécontentements des populations, leur avis et suggestions y sont exposé à l’insu de l’état souvent et au bonheur de n’importe quel manipulateur ou de tout autre politique.

L’usage des réseaux mérite une meilleure visibilité pour une meilleure connaissance des usagers et de leur besoin.

Dans ce sens, un accompagnement de taille de la transformation des usages est incontournable.


  1. Comportement des politiques


Le combat politique, dans une ère de communication, de l’information et de la technologie peut uniquement s’articuler autour d’idées pertinentes, fortes et constructives.

Les défis ne manquent pas. Ce sont les solutions qui tardent.

Quelque fois les diagnostiques ne sont même pas posés, et les axes de réflexion non plus. L’adéquation entre les politiques dédiées aux jeunes, l’éducation sociale et scolaire est un impondérable.. 

Nous avons à éviter les fausses voies, les pertes de temps inutiles, la distraction.

C’est dire que toute bataille ne peut se gagner que par la structuration des idées véhiculées, leur pertinence, leur capacité à s’appliquer, s’adapter et à apporter de la valeur à chaque Sénégalais et au monde.

C’est cela que nous attendons des politiques et des intellectuels. 

Dans le cas contraire, c’est une bataille stérile, non avenue et seulement guidée par la démagogie et l’ignorance.


  1. La paix au Sénégal, une richesse non alliénable


Certains sénégalais sont contents quand ils ont leur pain du jour, sont en bonne santé, en sécurité et ont l’espoir que leur famille a un avenir.

Le premier levier de cette possibilité est un espace de vie harmonieux.

La paix est l’ultime garantie de l’harmonie.

Il n’est donc pas question de confisquer la paix au Sénégalais. Chaque sénégalais doit y veiller en permanence. Elle est revêtue d’un caractère non aliénable.

La paix, avant les ressources tel que le pétrole aujourd’hui a été la plus belle richesse du Sénégal. Elle a fait sa renommée et sa notoriété. 

Elle a permis sa prospérité et l’a rendu attrayant aux investisseurs. 

Dans la paix la démocratie s’est exercée et a été propulsée au point de faire du Sénégal une référence.

Alors nous voulons la paix, rien que la paix.

Les contributeurs positifs sont invités à une meilleure analyse des dissensions d’origine sociales, leurs évaluations aux fins de jauger leurs causes véritables et d’y apporter des réponses. Ce qui n’a rien à voir avec la multitude d’éthnies au Sénégal.

Au contraire c’est une force.

A ceux qui ont soulevé la polémique sur le racisme ethnique dans le cadre de cette affaire, nous pensons que le facteur de dissension sociale ethnique n’a pas été vraiment prépondérant. La dissonance ethnique n’est heureusement pas une réalité sénégalaise. Historiquement, les plaisanteries de cousinage entre ethnies sont restées une barrière importante, infranchissable. Et que cette barrière ait eu des origines mythiques ou pas, elle a traversé des générations et a été préservé. Elle a constitué un facteur d’équilibre naturel et un ciment qui a fait le pont entre les ethnies. Ainsi chaque ethnie regarde l’autre avec l’œil de l’intouchable. L’ethnie  cousine est l’hôte de marque et est plébiscitée certes avec moquerie, mais une moquerie sous-tendue par une grande gentillesse. Le cousinage par ethnie revêt dès lors un caractère sacré. C’est tout simplement parfait. Laissons les choses là où elles sont.



5 Commentaires

  1. Auteur

    Guilé De Ndangalma

    En Avril, 2021 (12:53 PM)
    Très belle contribution, Madame, superbe constat. Mais on ne peut pas renvoyer dos à dos pouvoir et manifestants. En Afrique, de façon générale et plus particulièrement dans le cas du Senegal de Macky Sall, c'est le pouvoir qui y est la source des problèmes par sa stratégie de confiscation du pouvoir et le catalyseur des événements par des actes qu'ils posent (élimination d'adversaires politiques sous des prétextes fallacieux, rétention de cartes d'électeurs, et maintenant complot contre un adversaires politique). By the way, je constate que c'est maintenant seulement que Macky Sal a parlé de la menace que constitue le débat ethnique, alors qu'il n'avait pas condamné Alioune Dembourou Sow lorsque ce dernier a appelé le Hal Pulaar à sortir les machettes si on voulait empêchait Macky de solliciter un 3ème mandat. La meilleure pédagogie procède de l'exemple.
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  2. Auteur

    En Avril, 2021 (13:55 PM)
    Bonjour Guile,

    Je vous remercie de votre avis, le fait de poser bien nos problèmes dans de vraies débats intellectuels fondés sur un argumentaire éprouvé est la meilleure façon de transcender nos differents. Je crois beaucoup à la richesse de notre ressource humaine et à sa capacité de faire de grandes choses.
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    Auteur

    Guilé De Ndangalma

    En Avril, 2021 (16:32 PM)
    @13:55PM: Boolé ci "De Ndangalma", car il parait que Guilé désigne égalrmrnt tout "yaboy" qui se fait passer pour un "thiof"..
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    Auteur

    En Avril, 2021 (00:05 AM)
    C’est Sonko qui a politisé une affaire de viol et appelé au Mortal combat. Il est le principal responsable.
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    Auteur

    Massamba Thioye

    En Avril, 2021 (11:42 AM)
    Très bon article Marieme. Félicitations.
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