Samedi 27 Avril, 2024 á Dakar
Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Contribution

OPINION - EMIGRATION CLANDESTINE : Les souffrances d’une jeunesse laissée à elle même

Single Post
OPINION - EMIGRATION CLANDESTINE : Les souffrances d’une jeunesse laissée à elle même

Les accords passés entre le Sénégal et l’Espagne qui insistent sur les « mesures sécuritaires communes » pour empêcher les candidats à l’émigration de joindre l’autre rive, vont résoudre plusieurs préoccupations.

Une préoccupation légitime du gouvernement espagnole qui n’en peut plus de servir de refuge à une jeunesse étrangère désemparée.
Une préoccupation de nos gouvernants qui ne veulent plus voir ces images sur l’émigration salir l’image d’un pays dont ils crient partout son émergence (le Sénégal au sommet).
Une préoccupation des émigrés légaux qui font les frais de l’entêtement de leur frère de race et qui continuent de subir, avec acuité, des considérations racistes dans leur pays d’accueil.
Une préoccupation de certains nantis qui, ne pouvant changer de nationalité ou de couleur de peau, pestent, de voir certains de leur compatriotes les mettre dans des situation inconfortables, une fois en vacance chez l’ami blanc.

Cependant, une volonté de gommer les images de la « honte » par tous les moyens semble anesthésiée une réflexion plus sereine et plus approfondie sur ce phénomène de l’émigration clandestine. Vouloir stopper l’émigration clandestine en traquant les candidats avec des hélicoptères et des scooters de plage et en les déferant au parquet n’est pas la solution idoine. C’est là appliquer une fausse solution à un vrai problème.
Ce qu’il faudra peut être crier sur tous les toits pour se faire entendre est que l’émigration clandestine n’est qu’une manifestation d’une volonté de s’en sortir et de vivre décemment pour la plupart des candidats. A défaut de pouvoir quitter le pays, d’autres solutions peuvent être empruntées et elles ne seront pas forcément moins dangereuses.

Le fait de vouloir dissuader les jeunes à emprunter les voix du suicide doit donc être sous-tendu par une politique de maintien aux pays prenant en considération leurs inquiétudes. Des solutions alternatives qui puissent prendre en compte leurs vraies préoccupations par une démarche participative, doivent être envisagées. Il faudra associer les jeunes à leur propre problème en créant des cadres de concertation.

Le plan REVA qui veut être imposé ne fait pas rêver. Les candidats à l’immigration savent déjà les difficultés de la terre. Ils ont laissé chez eux des parents cultivateurs qui sont encore détenteurs de bons impayés ou qui ont des difficultés pour écouler leurs produits à des prix raisonnables.

En lieu et place de solutions alternatives crédibles, les candidats à l’émigration sont très souvent attaqués et une volonté manifeste de les vouer aux gémonies est tout le temps affichée par les autorités
L’argument souvent servi est que ces jeunes ne « sont pas démunis » ou qu’ils « sont pressés de réussir » histoire de montrer que ces images ne se justifient pas

Le ministre de la Jeunesse dans le soleil du 22 août 2006 déclare : « Les jeunes en partance à l'extérieur ne sont pas pauvres lorsqu'ils peuvent verser 500.000 F aux passeurs et avoir 500.000 F d'argent de poche »
La question que le ministres de Wade refuse de se poser à haute voix est de savoir combien de temps le jeune émigré clandestin a consacré pour réunir cette somme et surtout dans quelles conditions ?

Les vendeurs à la sauvette à sandaga peuvent faire des années pour réunir cette somme. Des années de cache-cache avec la police, des années de location dans des conditions difficiles avec des dizaines de personnes dans une chambre à la médina, des années de privation de tout genre, privation de fréquenter les jeunes filles de leur âge, privation d’aller en boite comme le font des jeunes de leur âge, privation d’acheter des habits à la mode, privation de manger à leur faim (un repas à la descente suffit) etc. Mais également des années de sacrifices. Sacrifices pour envoyer de l’argent à la famille resté au village malgré les difficultés, sacrifices pour héberger un cousin venu tout frais du village sans revenus, sacrifices pour soutenir une petite sœur qui loge avec d’autres et qui ne parviens pas encore à trouver du travail…

C’est très aisé de se trouver sur un piédestal et vouloir juger ces jeunes. Que leur demande t-on au juste ? c’est certainement, de continuer à subir les même difficultés, à fournir les mêmes sacrifices, à subir les même contraintes sans être sure qu’il ne feront jamais les frais d’agents de police qui peuvent en un jour tout embarquer. Ils auraient certainement souhaité qu’ils continuent de revendiquer en privé, de s’apitoyer sur leur sort tant qu’ils le voudront dans l’intimité de leur chambre mais qu’ils n’ameutent pas le monde qu’ils ne salissent pas l’image reluisant d’un sénégal « au sommet. ».

Ces jeunes n’ont--il pas le droit d’avoir un foyer, de subvenir convenablement aux besoins de leurs familles, n’ont-il pas le droit de mettre plus tard leurs enfants à l’école de créer les conditions de leur maintien, n’ont-il pas le droit de faire parvenir l’électricité dans leur demeure, de mettre un robinet à la maison pour réduire les conditions difficiles dans lesquelles vivent leurs mamans et leurs tantes ?

Ils n’ont pas demandé à devenir tous, de jeunes ministre-millionnaires. Ils veulent un minimum pour vivre décemment, avec dignité.

Nos autorités sont entrain de s’appesantir sur des réponses très simplistes et inadéquates en ce qui concerne le phénomène de l’émigration clandestine.
Malheureusement, ceux qui nous gouvernent sont plus préoccupés par la pérennisation d’une image virtuelle jalousement sauvegardée que par des séries d’actions conséquentes visant à corriger la triste réalité. Même une simple campagne de sensibilisation sur les risques du voyage et sur les réalités de la vie en Europe tarde à être campée d’une manière effective. Beaucoup de sénégalais n’auraient jamais mesurés l’ampleur des dégâts si les médias étrangers n’avaient pas joués le rôle de transmetteurs de nos réalités occultées, par la diffusion d’images très révélatrice du désarroi d’une jeunesse malmenée.
Avec notre télévision nationale, c’est à croire qu’au Sénégal, il n y’a de jeunes que ceux qui ont acceptés de porter des tee-shirts à l’effigie du maître et qui se présentent le long des artères pour acclamer et danser. Ceux là sont montrés en gros plans et leur prestation rediffusées à longueur d’émissions, au même moment où d’autres encore, majoritaires, qui croupissent dans un chômage endémique et dans des problèmes de survie sont royalement ignorés et laissés à eux même. Une télévision qui, en définitive, ne véhicule que l’état d’esprit des autorités
Déjà dès les premières annonces de la mort de centaines de sénégalais sur la route de l’émigration, Wade a fait la sourde oreille pour faire de sa fête (remise du prix Houphouët Boigny) une réussite. Des millions de francs ont été dépensés pour augmenter le degré d’applaudimètre à l’UNESCO. S’il en était resté là on pouvait peut être comprendre mais une fois revenu au pays le prix a été fêté, beaucoup fêté et encore fêté devant la douleur des familles victimes de l’émigration clandestine.

Dans une émission sur antenne 2, Abdou Diouf disait, alors qu’il était président en exercice « si les pays riches ne nous aident pas, aucune gendarmerie, aucune police, aucune armée ne pourra contenir une ruée vers l’occident »

Après 2000, Wade dans l’une de ses visites en Italie a déclaré à nos compatriotes sur place : « j’ai demandé à certains qui voulaient me donner de l’argent, d’attendre parce qu’au Sénégal il y’a assez d’argent. Notre problème c’est comment l’utiliser »

Le voeux de Diouf s’est exaucé mais à un moment où le pouvoir a changé de mains.
Avec l’argent dont il ne savait quoi faire, Wade a préféré s’occuper de la réussite de ses fêtes, de la bonne santé financière de son parti et de ses proches laissant en rade une jeunesse désemparée qui a tout œuvré pour son élection à la magistrature suprême.

L’émigration clandestine n’est pas une solution pour un pays qui compte sur ses ressources humaines pour se développer mais c’est malheureusement une solution pour ceux qui préfèrent la mort dans une action de survie à la mort à petit feu dans leur propre pays.

Il faudra d’abord les considérer et les comprendre pour pouvoir les aider.

<50>[email protected]



0 Commentaires

Participer à la Discussion

  • Nous vous prions d'etre courtois.
  • N'envoyez pas de message ayant un ton agressif ou insultant.
  • N'envoyez pas de message inutile.
  • Pas de messages répétitifs, ou de hors sujéts.
  • Attaques personnelles. Vous pouvez critiquer une idée, mais pas d'attaques personnelles SVP. Ceci inclut tout message à contenu diffamatoire, vulgaire, violent, ne respectant pas la vie privée, sexuel ou en violation avec la loi. Ces messages seront supprimés.
  • Pas de publicité. Ce forum n'est pas un espace publicitaire gratuit.
  • Pas de majuscules. Tout message inscrit entièrement en majuscule sera supprimé.
Auteur: Commentaire : Poster mon commentaire

Repondre á un commentaire...

Auteur Commentaire : Poster ma reponse

ON EN PARLE

Banner 01

Seneweb Radio

  • RFM Radio
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • SUD FM
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • Zik-FM
    Ecoutez le meilleur de la radio

Newsletter Subscribe

Get the Latest Posts & Articles in Your Email