Partis pour remettre un mémorandum au président de la République sur la gestion financière du Sénégal, les membres de cette association de sénégalais vivant à Paris se sont retrouvés dans un véritable traquenard, roués de coups jusqu’au sang. Leur chargé des relations extérieures, Ibrahima Dieng, explique à Seneweb News le déroulement de cette journée de folie, après avoir déposé une plainte contre les auteurs de cette barbarie.
Remettre un mémorandum
«Le samedi 12 décembre l’association « vision alternative pour le Sénégal » a organisé une manifestation devant la résidence de M. Abdoulaye Wade sise au 23, rue vineuse à Paris 16ème arrondissement. M. Wade, qui était alors présent, procédait à des audiences de militants de son parti. Cette manifestation venait en droite ligne après la marche organisée par l’association le 6 novembre 2009 dernier devant les locaux du FMI à Paris suite à l’affaire Segura, affaire qui a jeté l’opprobre sur les institutions du Sénégal ainsi que sur tous les enfants de ce pays. Cette manifestation avait par ailleurs connu un succès retentissant grâce à la présence massive de Sénégalais vivant en France, qui ont rejoint spontanément cette action initiée par Vision alternative pour le Sénégal. Lors de cette manifestation du 6 novembre, un mémorandum a été remis au représentant du FMI à Paris, mémorandum dans lequel, notre association a tenu à réitérer sa vision de la bonne gouvernance, notamment sur la question de la corruption qui atteint des sommets ahurissants au Sénégal depuis quelques années. La présence de Mr Wade ce 12 décembre à Paris constituait pour nous l’occasion de parachever cette action en lui soumettant notre vision sur les actes qui doivent constituer les bases d’un état de droit, juste et respectueux des vertus qui sied à toute république. Un état où les citoyens ne seront plus spoliés par une élite mercantile, arrimée à une longue caravane de la corruption comme on a pu le constater de façon risible depuis l’avènement de M. Wade au pouvoir».
Tout est parti d’un «mémorandum»
«Lorsque nous sommes arrivés ce samedi 12 décembre 2009 au 23 rue vineuse à Paris dans le 16eme à 17h10, nous avons trouvé sur place M. Meissa Touré qui, quoique étant un étudiant, est détenteur d’un passeport diplomatique en qualité de chargé de mission pour le compte de M. Wade à Paris. Nous lui avons donc fait part de notre volonté de remettre à M. Wade le mémorandum que nous avions préparé à cette occasion. Après une longue discussion aux allures tout à fait cordiales, M. Touré nous a demandé de patienter le temps qu’il aille s’enquérir des dispositions de M. Wade à recevoir le dit mémorandum. Après quinze minutes d’absence, M. Touré est venu nous rejoindre sur le trottoir, et sans crier gare s’en est pris à un de nos camarades à qui il a assené plusieurs coups de poing à la surprise générale. Concomitamment, plusieurs gardes du corps et deux gendarmes sénégalais sont sortis de la résidence de M. Wade pour s’en prendre aux manifestants présents sur la voie publique. Avec le recul et au vu du film des événements qui précédent, il nous est apparu clairement qu’il s’agissait d’un acte prémédité. Lors de ces échauffourées trois de nos camarades ont été blessés dont un grièvement et qui a été conduit immédiatement à l’hôpital Georges Pompidou par les services d’urgences assistés par forces de sécurités de la police Française qui, il faut le dire, sont intervenus très rapidement pour rétablir le calme. »
Meissa Touré placé en garde à vue…
« Profitant de l’accalmie induite par l’arrivée de la police, les gendarmes sénégalais ainsi que les calots bleus de M. Wade se sont éclipsés et ont pu se refugier dans l’enceinte de la résidence. Cependant M. Meissa Touré n’a pas eu cette chance, car il a été appréhendé par la police et placé en garde à vue pour voie de fait et violence volontaire. Nous nous sommes ainsi rendus au commissariat de police rue de la faisanderie paris 16eme, sur place nous avons pu déposer des plaintes contre toutes les personnes impliquées dans cet acte de barbarie. Pour la majorité des membres de notre association présents lors de cette manifestation, la surprise a été totale, car personne ne s’attendait à pareil déferlement de violence a priori gratuite. J’ai moi-même été frappé à plusieurs reprises par un des gardes du corps de M. Wade à qui je tentais vainement d’expliquer le caractère pacifique de notre action. Nous venions tout simplement de faire l’amère expérience de la sauvagerie dont pouvaient faire preuve les nervis de M. Wade et leurs acolytes. Nous étions d’autant plus indignés que c’était des gendarmes sénégalais en tenue qui venaient agresser des citoyens sur la voie publique, voie publique sur laquelle ils n’avaient aucune souveraineté faisant fi de toutes les conventions internationales. Cette indignation s’est rependue naturellement chez tous les riverains de la rue vineuse, car il faut le souligner, plusieurs habitants sont descendus spontanément dans la rue pour rappeler à leur gênant voisin en l’occurrence M. Wade, les règles de base qui régissent toute démocratie notamment la liberté d’expression et le droit à la manifestation. Ce samedi 12 décembre au soir, l’état Sénégalais s’est cru tenu de se fendre d’un communiqué officiel dans lequel il était question « d’échauffourées entre des étudiants du PDS à Paris et des étudiants de l’opposition »
Vision alternative pour le Sénégal est une association apolitique
«Il est opportun pour nous de rétablir la vérité et signifier à tous les sénégalais que notre association qui est apolitique, est constituée dans sa majorité de cadres Sénégalais vivant en France. Ses membres sont de toutes obédiences religieuses, politiques ou culturelles. Nos actions vont aussi bien vers la société civile, que vers l’élite politique à qui nous soumettons nos réflexions dans le but d’insuffler une nouvelle vision de la gouvernance et des relations sociales face au drame de la pauvreté au Sénégal, et de l’incurie qui règne chez nos dirigeants. Ainsi, lors de cette manifestation, étaient présents un consultant en communication, un médecin, un ingénieur en pont et chaussée, un avocat, un manager de la grande distribution, un Pharmacien et d’autres professionnels tous travaillant pour leur compte, ou pour le compte de sociétés françaises ou étrangères. Donc ce mensonge ne pouvait être toléré d’autant que ce communiqué tentait de faire l’amalgame entre le fait que M. Meissa Toure soit étudiant et diplomate en même temps (vous jugeriez vous-même d’une telle opportunité) ».
Soulever ce linceul et dire tout simplement à «vos fossoyeurs» que vous êtes encore vivants
Cet avalanche de violence en plein cœur de Paris nous offusque certes, mais n’entame en rien notre détermination. Le pacte qui été posé lors de la fondation de notre mouvement est parti d’un constat simple. La plus part des Sénégalais vivant à l’étranger se sont jusque là dévoués à aider leurs familles restés au pays en leur envoyant de l’argent. De par cet acte ils espèrent conjurer cette pauvreté ambiante qui ne fait qu’empirer. Il était donc venu le moment de se poser des questions sur l’origine intrinsèque de cette misère. Les facteurs macro économiques mis à part, il est apparu très vite que cette pauvreté était surtout due à une fracture sociale qui de jour en jour se transformait en un gouffre. Il faut donc rétablir les égalités et redonner confiance à toutes ces masses laborieuses spoliées. C’est de notre point de vue la seule façon d’aborder le problème de la pauvreté au Sénégal en agissant d’abord sur nous-mêmes, mais aussi donner des gages à tous nos partenaires de par le monde, en leur signifiant notre réelle volonté de nous extirper de cette situation dans laquelle on languit depuis prés d’un demi siècle d’indépendance. J’exhorte donc tous les sénégalais à refuser la fatalité et de se battre pour vivre autrement et mieux parce que c'est possible. Quand on n’est pas d’accord on dit non. J’ai eu l’occasion de par mes fonctions, de travailler dans beaucoup de pays à travers le monde, surtout dans des pays pauvres, et je peux témoigner que malgré une situation défavorable, la plus part de ces peuples ont réussi à tourner la page des handicaps internes pour ensuite s’attaquer au marché mondial, qui nous est aujourd’hui fermé à nous Sénégalais et autres pays africains. Si aujourd’hui la majorité des sénégalais ont du mal à trouver 50 ou 100 francs CFA le matin pour s’acheter un sachet de lait ou de café pour leur petit déjeuner, il n’en demeure pas moins qu’ils voient passer des flottes de 4X4 rutilants soulevant leur poussière qui tel un linceul vient couvrir cette humanité oubliée et délaissée. Chers compatriotes, parents et amis je vous appelle donc à soulever ce linceul et dire tout simplement à vos fossoyeurs que vous êtes encore vivants.
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