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Politique

COMMENTAIRE DU JOUR : Volonté de puissance

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COMMENTAIRE DU JOUR : Volonté de puissance

Le président-candidat Abdoulaye Wade a menacé mercredi 07 février dernier de mettre Amath Dansokho en prison, l’accusant au passage d’avoir détourné 14 millions de FCfa du budget de la commune de Kédougou dont il est le maire. Des menaces semblables avaient déjà été proférées, il y a quelques jours, en direction de Ousmane Tanor Dieng, Moustapha Niasse. Aidé de Macky Sall, son Premier ministre-directeur de campagne, le président-candidat avait sorti des eaux fangeuses des scandales pré-alternance, les affaires dites des licences de pêche, des passeports de Taïwan et affirmé que, n’eut été sa magnanimité certaines personnes, dont celles indexées, se seraient retrouvées derrière les barreaux de la prison de Rebeuss. 

Emprisonne t-on des gens parcequ’ils ont fauté ou au contraire parcequ’ils vous portent ombrage ? Et puis, appartient-il à un chef d’Etat d’emprisonner lorsqu’on sait qu’un tel rôle est dévolu à la justice ? Il y a assurément un quiproquo à lever pour peu qu’on veuille contenir d’éventuelles dérives susceptibles d’attenter aux libertés des personnes et des biens. Qui ne se souvient des premiers pas de l’alternance ? Profitant de la vague de propreté qui se déversait, à ce moment précis, sur les terres sénégalaises, le chef de l’Etat avait commandité des audits, comme l’y autorise la loi, mais à l’arrivée, les attentes ont été déçues, du fait du traitement discriminatoire qui en a suivi. Mbaye Diouf de la Régie des chemins de fer et Aïssatou Diagne, Abdou Aziz Tall, Bara Tall sous un autre rapport, peuvent en témoigner au moment où d’autres, dont le vol et le pillage des biens publics, parfois revendiqués, assumés, sont connus de tous, pouvaient se pavaner avec l’insolence de ceux qui se savent protégés, pour avoir tourné casaque et fait allégeance au nouveau pouvoir.

Comme par hasard le président-candidat et son Premier ministre directeur de campagne omettent d’indexer certaines autres personnes qui ont pris leur retraite politique ou changé de pâturage. Ainsi, serait-on tenté de croire que ce qui fait bouger le chef de l’Etat n’est nullement porté par l’irrépressible besoin de moralisation de la vie publique, de transparence. S’agirait-il alors du désir de flinguer des adversaires politiques à défaut de les terroriser ? A l’image de ses roitelets nègres, qui, du haut de leurs trônes de fortune, avaient droit de vie ou de mort sur leurs sujets. Sujet, le mot est lâché, dans son acception d’avilissement. Une posture qui demande cependant à être inversée lorsqu’on la décline dans une perspective républicaine. Il ne s’agira plus d’un sujet mais d’un acteur, faiseur de roi. En un mot, un citoyen. Aussi, lorsque de tels propos sortent de la bouche du chef de l’Etat, on ne peut qu’avoir froid dans le dos, tout en se demandant s’il ne s’est pas trompé de lieu et d’époque.

En cette première décade de février 2007, le Sénégal qui a connu sa première alternance démocratique aspire certainement à aller plus loin, à tourner le dos définitivement aux gestions nombrilistes et patrimoniales du pouvoir. Aussi, au-delà de la nécessaire moralisation de la vie publique se pose t-il la centralité du débat éthique, en un mot celui de la bonne gouvernance. Parcequ’en démocratie la dévolution du pouvoir s’effectue par le biais des urnes, elle fait de l’élu, un serviteur sous le contrôle de ses mandants. Ce qui oblige à l’émergence de pouvoirs séparés, d’une opposition, d’une presse, d’une opinion publique fortes.

Il s’agit en dernière instance de contenir la volonté de puissance qui, portée par un ego surdimensionné peut déborder dans une sorte d’ivresse capable de basculer dans ce moment où, on se pense père fouettard ayant autorité absolue sur sa progéniture. L’acception wolof « Maye sene Baye », récemment utilisée par le président dans une adresse à la nation, même enrobée d’un zeste de tendresse affective, appelle à la vigilance républicaine pour la simple raison qu’il ne s’agit nullement d’une affaire de famille, mais bien de l’Etat, ou le chef, à date échue, doit se retrouver en face des citoyens électeurs qui vont juger ou non de l’opportunité de continuer le bail contracté avec lui. Tout le contraire d’un papa qui, bon ou mauvais, renié ou adulé, reste un papa. C’est là une différence radicale.

Alors, de grâce, rangeons aux magasins des accessoires inutiles certains propos qui n’honorent pas les personnes qui les avancent, encore moins le Sénégal, dans sa volonté d’ancrage dans la modernité démocratique. Profiter de sa position au niveau de l’Etat pour menacer de jeter en prison des adversaires politiques, instrumentaliser la justice, c’est en derrière instance fragiliser la démocratie.



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