Crise casamançaise : Bennoo demande à Wade d’initier une grande concertation nationale et citoyenne

La Conférence des leaders de Bennoo Siggil Senegaal, dans une déclaration, demande au Président de la République d’initier une grande concertation nationale et citoyenne sur la Casamance pour redynamiser le processus de paix, en y conviant toutes les forces vives du pays sans exclusive. Sununews vous livre l’intégralité de la déclaration

1. La recrudescence actuelle des hostilités en Casamance vient rappeler aux populations sénégalaises la persistance dramatique d’un conflit qui affecte douloureusement le Sénégal tout entier depuis plus d’un quart de siècle. Cette situation de « ni paix, ni guerre » ou de « paix armée », est grosse de tous les risques pour la Casamance, le Sénégal dans son ensemble et toute la sous région. Les vols, les braquages récurrents, les assassinats ciblés, les affrontements entre combattants du MFDC et soldats sénégalais, les handicaps ou les décès causés par les mines anti-personnel, les opportunités de développement perdues, les multiples ravages aux plans social et psychologique, témoignent de l’insécurité, des souffrances indicibles et des angoisses dans lesquelles vivent les populations de Casamance, ainsi que du grave tort causé par ce conflit aux fils et filles du Sénégal tout entier.

2. Depuis 1982, les gouvernements successifs du Sénégal n’ont pas réussi, malgré les multiples tentatives, à établir une solution définitive de sortie de crise, porteuse d’un règlement pacifique, juste et durable. Maître Abdoulaye Wade avait promis de résoudre ce conflit en 100 jours ; 3650 jours après, le constat est clair : Abdoulaye Wade a échoué. Sa méthode basée sur la division, la corruption, la nomination de Messieurs Casamance dotés de valises d’argent, n’a abouti qu’à l’assassinat de personnalités politiques, à la mort de soldats, de rebelles et de civils innocents, ainsi qu’à une méfiance généralisée et à un enlisement dangereux, d’où il urge de se sortir dans la plus grande lucidité. De plus, la répartition inadéquate des investissements publics- par exemple les centaines de milliards investis dans la Corniche de Dakar- fait qu’en dix ans de régime SOPI, le front du désenclavement de la Casamance, ainsi que le développement d’activités structurantes au bénéfice des populations, n’ont pas véritablement progressé.

Cette crise du Sénégal en Casamance vient nous rappeler les relations multiformes entre Gambiens, Sénégalais et Bissau Guinéens. Plus précisément, le conflit en Casamance a confirmé d’une certaine manière que le sort des trois pays est intimement lié. Faut-il rappeler que la lutte de libération du PAIGC avait donné l’occasion d’une fraternité d’armes entre combattants Bissau Guinéens et populations sénégalaises, dans un contexte de lutte anticoloniale ? La Casamance, à ce titre, a souffert le martyre. Ce fut le cas avec les événements douloureux survenus dans des localités comme Samine et Santhiaba Manjack. Aujourd’hui nous ne pouvons ni ne devons ignorer ces réalités qui s’expriment sous des formes variées dans l’évolution du conflit en Casamance. Signalons du reste que dans les années 90, la Guinée Bissau a servi de partie garante des accords entre le MFDC et l’Etat du Sénégal en mai 1991 et en juillet 1993, tandis que Banjul, capitale de la Gambie, a abrité en 1999 des assises du MFDC avec la société civile casamançaise. Avec l’avènement du régime SOPI, Wade a décrété l’exclusion de la Gambie et de la Guinée Bissau de la gestion du conflit, alors que la situation ne cesse de se détériorer en Casamance. 3. Il convient humblement à présent, à partir d’une analyse lucide des causes profondes du conflit, de son évolution ainsi que des actes posés jusqu’ici par les différents acteurs, d’avancer avec détermination, réalisme et esprit de suite vers une solution négociée de sortie de crise, pour aboutir à une paix effective et durable, conformément aux appels répétés lancés par les différents guides religieux toutes confessions et toutes confréries confondues, les organisations de la société civile, les forces vives de la nation et toutes les populations. A cet égard, l’implication de la Guinée Bissau et de la Gambie par un effort d’accompagnement du Sénégal dans le respect de la souveraineté des Etats, nous apparait à la fois opportune et nécessaire. C’est le lieu, pour Bennoo Siggil Senegaal, de saluer le travail effectué par la Commission des Assises Nationales chargée de la question Casamance et d’apporter son soutien à la proposition de lancement prochain d’une grande initiative sur la Casamance lors de la présentation publique du Rapport spécial de ladite Commission.

En vérité il ne sert à rien, bien au contraire, de clamer à la face de l’opinion nationale et internationale, comme viennent de le faire trompeusement le Président Wade et son farfelu Ministre conseiller Farba Senghor, l’existence de négociations prétendument menées avec César Atout Badiatte, un des commandants du maquis, déclarations vite démenties du reste par ce dernier lui-même ! C’est pourquoi, la Conférence des leaders de Bennoo Siggil Senegaal demande au Président de la République d’initier une grande concertation nationale et citoyenne sur la Casamance pour redynamiser le processus de paix, en y conviant toutes les forces vives du pays sans exclusive.

Dans le même ordre d’idées, elle lance un appel pressant au MFDC, aussi bien aile politique que militaire, pour l’exhorter à créer en son sein les conditions lui permettant de parler d’une seule voix, dans le cadre de négociations sérieuses, efficaces et fructueuses avec le gouvernement du Sénégal.

La Conférence des leaders engage également toutes les forces politiques et sociales, les organisations de la société civile, les personnalités patriotiques, le peuple sénégalais tout entier dans ses différents segments, à prendre à bras le corps le conflit en Casamance comme une question nationale majeure, qui requiert la participation active de tous et toutes en vue de son juste règlement.

Bennoo Siggil Senegaal réaffirme son attachement à la préservation de l’intégrité territoriale du Sénégal, au renforcement de son unité nationale, dans la pleine prise en compte de sa pluralité, qui s’exprime à travers sa diversité géographique, historique, ethnique, religieuse, socioculturelle, politique et économique. En même temps, conscient des enjeux et défis qui interpellent notre continent, Bennoo Siggil Senegaal encourage tout pas réel fait en avant en faveur de l’unité africaine, de l’intégration sous régionale et régionale, notamment dans le cadre de la CEDEAO, en tant que voie incontournable pour prévenir l’instabilité et l’insécurité permanentes, promouvoir la paix, la démocratie et le développement au service des populations africaines.

Fait à Dakar le 25 Mars 2010

La Conférence des leaders de Bennoo Siggil Senegaal