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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Politique

ENQUETE SUR UN PROJET POLITIQUE : Le « Plan Jaxaay » serait-il un outil secret de campagne électorale?

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ENQUETE SUR UN PROJET POLITIQUE : Le « Plan Jaxaay » serait-il un outil secret de campagne électorale?

Wade en est conscient : exécuté à temps, le « Plan Jaxaay » sera une arme de campagne électorale redoutable. Tout le contraire de ce qui se passerait si le projet n’est pas concrétisé dans les délais. Mais entre frustrations, lobbying, zones d’ombre, lenteurs, réunions houleuses, l’« Aigle » a perdu beaucoup de plumes. Enquête sur un envol difficile.

Dakar est sous les eaux, les sinistrés se comptent par milliers, les protestations se multiplient et le régime est dépassé par les événements. À tel point que Me Wade, alors en guerre ouverte avec son ancien Premier ministre Idrissa Seck, en prison, ne voit pas d’inconvénient à ce que Hassan Fares, propriétaire de Kirène, arrêté puis blanchi pour complicité d’atteinte à la sûreté de l’Etat avec le maire de Thiès, vienne au secours des sinistrés, en collaboration avec le ministère de la Santé. Fils du Président, et président de l’Agence nationale de l’organisation de la conférence islamique (Anoci) Karim Wade n’hésite pas à prendre discrètement un hélicoptère pour survoler Dakar et proposer par la suite un plan de sortie de crise à son père. On était effectivement en crise. Dépassé, Wade cogite. C’est ainsi qu’il convoque la télévision nationale pour une adresse à la Nation. Vu la situation, le Président Wade décide de coupler les élections pour concrétiser ce qu’il appelle le « Plan Jaxaay », qui sera financé à hauteur de 52 milliards. L’opposition rue dans les brancards, dénonce des dessous politiciens, mais le Président n’en a cure. Quelques jours seulement après cette annonce, il pose un jalon important. L’Etat du Sénégal avait signé un contrat avec une entreprise malaisienne gérée par des Sénégalais. Ces derniers devaient construire 70.000 logements à travers tout le Sénégal. D’ailleurs, des maisons témoins ont été même construites à Diamniadio. Wade reçoit les Malaisiens et leur demande d’arrêter tout : il y a urgence, selon lui. Il leur demande de délocaliser certains des logements qu’ils devaient construire et les met en contact avec la Sn/Hlm qui leur fournit très rapidement 3 000 parcelles viabilisées. Les promoteurs sénégalais grincent les dents : Wade leur donne 1 000 terrains dont les 30 % seront « affectés », après étude, à Ilico Sagef, de Maguette Diop. Tout allait donc bien dans le meilleur des mondes et « l’Aigle » était prêt à s’envoler.

Assane Diagne et Omar Sarr dans le dossier

Dès l’annonce du « Plan Jaxaay », Wade aiguise les appétits : tout le monde veut gérer un budget de 52 milliards. C’est le ministre de la Construction et de l’Habitat, Omar Sarr, qui s’investit. Croyant que l’Agence en charge du projet sera mise sous sa tutelle, il s’active. Ses services n’hésitent pas à commencer des visites de terrain durant lesquelles le budget du ministère est grignoté. De son côté, le ministre de l’Urbanisme et de l’Aménagement du territoire, Assane Diagne, croit dur comme fer que l’Agence lui reviendra de droit. La Primature claque la langue, mais se retire : le Programme national de lutte contre la pauvreté (Pndl) suffit. Coup de théâtre : début octobre 2006, Me Wade signe un décret, nomme un de ses conseillers, Ababacar Diallo, directeur général et place l’Agence sous la tutelle de la Présidence. Assane Diagne qui voit le morceau lui filer entre les doigts est chargé de « coordonner » les travaux de l’Agence. Après deux, trois, puis quatre réunions, Assane Diagne décide de se retirer. « Je vois que je n’ai plus rien à coordonner », aurait-il dit lors d’une réunion en présence d’Ababacar Diallo et de ses directeurs. Les jours passent et ne se ressemblent pas. Le directeur de l’Agence est en pourparlers avec les promoteurs. Ces derniers réclament une exonération des matériaux qu’ils devront importer. En lieu et place, il leur est proposé une...subvention. Après quelques embrouilles avec ces mêmes promoteurs, Ababacar Diallo est sur la corde raide. Recevant les promoteurs, le Président annonce son intention de se séparer du jeune directeur général, puis se rétracte.

Où sont passés les 52 milliards de Fcfa ?

Le jeudi 14 avril, lors de la réunion du Conseil des ministres, le Président annonce qu’il va réunir le corps électoral le 25 février prochain. Seul hic : lui Wade, qui avait dit que le couplage des élections allait servir à financer le « Plan Jaxaay » se retrouvait avec zéro maison alors que les élections approchaient de plus en plus. Si les élections viennent et que les chantiers ne sont pas sortis de terre, ce serait là un sacré sujet de campagne pour l’opposition à qui l’histoire donnera raison. Et le Président de s’emporter en plein conseil des ministres. Tous les membres du gouvernement concernés de près ou de loin par le « Plan Jaxaay » seront sérieusement tancés. Sitôt la rencontre du conseil des ministres terminée, le Président appelle tous ces ministres au Palais et par la même occasion, convie Ababacar Diallo à la rencontre qui dure trois heures. Le directeur général de l’Agence d’exécution commet l’erreur de se présenter seul à la rencontre, sans ses directeurs. Me Wade lui pose des questions très pointues. Avant de « tirer » sur lui. Le relais est donné par la suite au Pm qui, recevant Ababacar Diallo à la Primature, « dégaine » sur lui. Une rencontre houleuse qui ne présage rien de bon. Et les 52 milliards de Fcfa devant permettre le fonctionnement de l’Agence dans tout ça, et qui constituent les retombées du couplage des élections ? Ils ne tomberont que...quelques jours après cette rencontre. Mais des 52 milliards annoncés, l’Agence reçoit une « avance » qu’on peut allégrement qualifier de miettes. Que se passe-t-il ? L’affaire est sensible et aucune bouche ne veut s’ouvrir par rapport à cette question. La situation est si délicate que parmi les promoteurs, certains demandent « une avance ». Ce que refuse l’Agence qui exige une caution au niveau de la Banque de l’habitat du Sénégal.

Les vérités de Me Wade aux Malaisiens

Le Président est en colère. Très. Il évoque sa volonté de « virer » les Malaisiens comme nous le révélions récemment. Ces derniers n’ont même pas commencé les travaux. À la publication de l’article de Ababacar Diallo croit savoir que ce dernier mène une bataille ardue pour avoir l’Agence sous sa tutelle. De leur côté, les Malaisiens ne veulent pas que ce marché leur file entre les doigts. Après plusieurs jours de lobbying intense, ils réussissent à se faire recevoir hier, par le Président de la République, Me Abdoulaye Wade. Une audience qui s’est tenue dans la matinée. Durant cette rencontre, Me Wade, avec son franc-parler, leur dit ses quatre vérités. Toute honte bue, les Malaisiens réussissent cependant à avoir une seconde chance. Dès la sortie de leur audience avec le Président, ils rallient l’Agence chargée de l’exécution du « Plan Jaxaay » dont le siège se trouve derrière la maison de Cheikh Béthio Thioune, sur l’ancienne piste de l’aéroport. Ragaillardi par la position du chef de l’Etat, le directeur de l’Agence leur dit durant leur rencontre de plusieurs heures, qu’il n’était pas question que leurs prix soient plus élevés que ceux des « locaux ». Les Malaisiens promettent de réfléchir dans les meilleurs délais. Le temps joue contre eux.

Une arme de campagne pour Me Wade

Une promesse étant une promesse, surtout venant d’un chef de l’Etat, le « Plan Jaxaay » est certes un projet social venant en aide aux sinistrés des inondations, mais il est aussi une opération politique. En effet, si les autorités réussissent dans les délais à le mettre sur pied avant les élections et surtout avant le prochain hivernage ce serait un bon point de campagne pour Me Wade. Surtout qu’il a décidé de subventionner chaque maison à hauteur d’un millions cinq cents mille francs Cfa (1 500 000), comme révélé par le Premier ministre lors d’un conseil interministériel. Mais ne pas réaliser le « Plan Jaxaay » dans les délais, serait un désastre électoral pour le régime d’autant qu’il concerne, entre autres, la banlieue, où le Parti démocratique Sénégalais (Pds) compte beaucoup de partisans. Conscient que ce « Plan Jaxaay », exécuté dans les délais, sera un bon sujet de campagne, le Président a donné des instructions pour qu’il s’étale sur tout le territoire national. Une décision risquée, surtout avec les lenteurs notées jusqu’ici dans l’exécution du projet.



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