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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Politique

Imam Mbaye Niang accuse : ‘ Le Ps nous a utilisés comme escaliers pour revenir au pouvoir ’

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Imam Mbaye Niang accuse : ‘ Le Ps nous a utilisés comme escaliers pour revenir au pouvoir ’
Mbaye Niang, on peut, sans risque de se tromper, s’attendre à ce que la Coalition Benno Siggil Senegaal vive des moments difficiles dans les jours ou mois à venir. Des coups bas à d'autres formes de combines politiques, depuis la naissance de Benno Siggil Sénégaal, la constitution des listes d'investitures jusqu'à la répartition des responsabilités, au lendemain de la victoire, rien n'a été laissé au hasard par le président du Mrds. Entretien !

Wal Fadjri : Les partis membres de Benno Siggil Senegaal ont fêté ensemble la victoire mais, à l'installation des bureaux des collectivités locales, des voix se sont élevées pour dénoncer des injustices en son sein. Que s'est-il réellement passé ?

Mbaye Niang : Pour comprendre les problèmes que vivent certains partis membres de Benno Siggil Senegaal, il est utile de faire un peu sa genèse. Benno Siggil Senegaal est né d’une union entre deux coalitions : Benno waluu askan wi, regroupant une dizaine de partis et quelques organisations de la société civile, et la coalition Front Siggil Sénégal. Et ce sont les éléments de Benno waluu askan wi qui sont allés vers le Front Siggil Sénégal pour leur proposer la création de Benno Siggil Senegaal. Une initiative qui est venue, il faut le dire, du leader du Jëf jël, Talla Sylla. C’est lui qui a réuni certains leaders (Cheikh Bamba Dièye et Mamadou Lamine Diallo du mouvement Tekki) pour entreprendre des démarches dans le but de créer un rapprochement entre les deux coalitions. J’ai été, également, commis en tant que responsable du Mrds pour la même démarche. Et c’est à la sortie de ces démarches qu’une rencontre a eu lieu entre les responsables des deux coalitions. De là, est née l’idée de former une grande coalition. Nous avons amené notre Benno et eux le Siggil ce qui a donné Benno Siggil Senegal.

L'objectif visé, initialement, dans la création de cette coalition, c'était essentiellement d'arrêter le projet monarchique de Wade. Parce que nous savions, déjà, que le fait que le nom du fils de Wade figure dans les listes proportionnelles de la Coalition Sopi, vise à l'installer à la tête de la mairie de Dakar. Et de la mairie, il serait très facile, par décret, de le nommer président du Sénat. Et tout le monde sait que notre constitution prévoit que le président du Sénat, en cas de vacance du pouvoir, assure l'intérim (...) Et nous étions, en ce moment, convaincus que les coalitions, bien qu'étant fortes par leur nom, ne pouvaient gagner individuellement Abdoulaye Wade. Le Front Siggil Sénégal, s'il était allé seul aux élections, je ne pense pas qu'il pouvait gagner la Coalition Sopi. De même que notre coalition. Si vous ajoutez à cela l'exigence des populations qui appelaient l'opposition à l'union pour faire face à la Coalition Sopi, c’était suffisant de comprendre que la Coalition de Benno était une impérative nationale. Chaque leader de l'opposition a eu à recevoir des pressions soit de la part de ses militants soit de simples citoyens, l'invitant à l'unité.

Le deuxième objectif de la coalition était d'apporter des équipes de rupture dans la gestion. C'est-à-dire une gestion qui profiterait exclusivement aux populations. Parce que nous savons que les populations souffrent de tous les maux et que les collectivités locales ont un rôle important à jouer dans la prise en charge de leurs préoccupations. On sait que neuf compétences ont été transférées aux collectivités locales et depuis cette décision, elles revêtent une autre importance.

Ce sont là les deux objectifs principaux qui motivaient cette union. Quand on a décidé de la mise sur pied de cette coalition, il ne nous restait pas beaucoup de temps pour aller aux élections. Nous sommes entrés tout de suite dans la phase des investitures. Et nous avons connu beaucoup de difficultés à ce niveau parce que, au niveau des différentes localités, il y avait une volonté affichée de la part de certains représentants de partis de Benno Siggil Senegaal, précisément du Ps et de l'Afp, de s'accaparer de tout. Les réunions étaient dirigées par eux et ils se permettaient même d'octroyer des quotas aux autres partis.

Wal Fadjri : Sans que cela ne soit discuté au préalable ?

Mbaye Niang : Oui. Sans aucune proposition préalable. C'est seulement en réunion que les autres partis membres apprennent qu'il y a des quotas affectés aux différents partis. Naturellement, les gens contestaient et cela avait créé des problèmes que nous avions essayé de régler. Il nous est même arrivé d'envoyer des émissaires dans certaines localités pour régler des problèmes. Parce que ces questions avaient créé, dès le début, des menaces de dislocation de Benno Siggil Senegaal. Ainsi, des membres ont claqué la porte à cause de ces quotas.

Un autre problème avait été soulevé et qui a été à l'origine du départ de certains : c'est celui de la désignation, a priori, des futurs maires sur les listes d'investitures. C'est-à-dire qu'il y avait des gens qui voulaient que les maires soient désignés avant même les élections. Mais au niveau de la conférence des leaders, une décision claire avait finalement été prise : il a été clairement dit qu’être tête de liste ne voulait pas dire être maire. Et qu'il appartient aux conseillers d'élire les maires. D'ailleurs, c'est à cause de ça que Talla Sylla a eu des problèmes.

Wal Fadjri : Des problèmes liés certainement aux investitures ?

Mbaye Niang : Talla Sylla n'a pas été soutenu par la Coalition Benno Siggil Senegaal à Thiès. Il a été victime, je ne peux pas dire d'ostracisme, mais il est parti seul à Thiès sans Benno. Et cette situation m'a déplu parce que c'est lui qui avait pris l'initiative de réunir les gens. C'est regrettable. Mais cela n'a pas empêché Benno de survivre. Il est vrai qu'on a connu beaucoup de problèmes, mais personne ne voulait que Benno soit disloqué et les gens étaient convaincus qu'il fallait aller ensemble pour battre le Pds. Mais, nous avons avalé beaucoup de couleuvres de la part des socialistes et de l'Afp. Par exemple à Ouakam, le responsable socialiste avait voulu imposer un quota à notre parti, le Mrds. Notre responsable à Ouakam a refusé parce qu'on est très représentatif dans cette localité. J'ai eu moi-même à intervenir auprès du responsable socialiste pour lui demander d'assouplir sa position pour qu'on aille ensemble. Mais il était intransigeant sur sa position. Finalement, nous sommes alliés avec la coalition de Mamadou Diop qui a gagné et Benno Siggil Senegaal a perdu. C'est juste pour dire que nous avons connu de sérieux problèmes que nous avons pu taire pour que Benno ne soit pas un mort-né. Voilà comment nous sommes partis aux élections : les socialistes se sont taillés la part du lion en termes de conseillers sur les listes, suivis de l'Afp, de la Ld.

Wal Fadjri : Et vous avez laissé faire ?

Mbaye Niang : Mais nous avons été obligés par souci de préserver l'unité. Nous autres (à Benno waluu askan wi : Ndlr), la directive que nous avions donnée à nos militants était claire : accepter le sacrifice qui permet de préserver Benno Siggil Senegaal. Et cela nous a coûté cher.

Wal Fadjri : Comment expliquez-vous que le Ps et l'Afp aient pris les décisions au détriment des autres partis ?

Mbaye Niang : Le problème, c'est qu'ils étaient bien préparés. Ils étaient déjà prêts quand nous, on se préparait pour rejoindre la coalition déjà créée (Benno Siggil Senegaal). Ils avaient déjà huilé leur machine pour aller aux élections. Et c'est leur intransigeance et leur cohésion qui expliquent qu'ils (Ps et Afp) ont partout eu le plus grand nombre de conseillers. Avec eux, vous acceptez ou vous partez. Malgré les directives que les leaders donnaient. Parce que ces directives n'étaient jamais respectées à la base. Et cela concernait surtout le Parti socialiste. La question qui a été la plus évoquée au niveau de Benno quand il s'agissait de régler les problèmes, c'était celle du Ps. Les socialistes préparaient, déjà, leur coup, c'est ce que les gens ont compris. Parce qu’ils savaient que les maires seront élus par les conseillers. Par conséquent, celui qui y a plus de conseillers aura la majorité. Et nous avons laissé faire simplement parce que nous étions de bonne foi.

En fait, on ne pouvait pas, en ce moment, soupçonné qu'il y avait un plan ourdi, mis en place pour revenir au pouvoir, accaparer l'effort de tout le monde. On ne pouvait pas soupçonner ça. La preuve, à l'annonce des résultats, ce sont les socialistes qui sont sortis pour manifester leur contentement. L'exemple de la ville de Dakar en est une parfaite illustration. Après la proclamation des résultats, Khalifa Sall est sorti avec à ses côtés Tanor, pour fêter la victoire. Et il s'est, tout de suite, mis dans les habits d'un maire en commençant à dérouler son programme, alors que sa candidature n'avait pas été retenue d'avance. Et cela a frustré beaucoup de gens.

Wal Fadjri : Cette frustration ne s’est-elle pas accentuée avec la répartition des postes de responsabilités ?

Mbaye Niang : Quand il s'est agi, après la victoire, de répartir les responsabilités, tout le monde s'attendait à ce que cette répartition soit faite sur la base de la cartographie des communes d'arrondissement et des villes remportées par Benno Siggil Senegaal. Et ce sont les leaders qui devaient, d'abord, discuter de cette question parce que les maires devaient être élus par les conseillers. Mais ça n'a pas été finalement le cas. Les gens ont laissé les comités électoraux, où les socialistes et les progressistes sont les plus nombreux, régler les problèmes de candidatures aux postes de maires. Résultats : sur les 14 communes d'arrondissement que nous avons gagnées à Dakar, les 12 sont contrôlées par les socialistes. Alors qu'il y avait des possibilités pour d'autres d'être des maires. Mais comme ils avaient la force du nombre, ils se sont imposés.

Par exemple au niveau de Benno waluu askan wi, en tant coalition partenaire, nous avions exprimé le souhait de prendre certaines communes d'arrondissement où on était fort. C'est le cas à la Médina où Hawa Dia Thiam, ancien ministre et membre de Yonu Askan Wi, est populaire et très bien placée. Mais la manière dont on l'a écartée, ne me fait pas honneur en tant que politique. On l'a écartée pour mettre un Ps. Pourtant, nous avions demandé qu'on la soutienne. Le Mrds avait aussi un candidat à la mairie de Dieuppeul, Ibrahima Cissé qui était aussi très bien placé pour occuper la mairie. Mais le Ps et les autres se sont ligués pour l'écarter. Même chose aux Hlm où ils ont osé aller jusqu'au vote avec le candidat du Mouvement Tekki, Ali Diouf. Les socialistes et les autres partis n'ont pas voulu trouver un consensus autour de sa personne pour être candidat à la mairie. Ce sont les urnes qui les ont départagés. Et Ali Diouf est passé avec l'aide des conseillers d'autres partis politiques non-membres de Benno Siggil Senegaal.

Concernant les 10 grandes villes que nous avons gagnées, les 6 sont tombées sous le contrôle des socialistes. Le reste (4), c'est Kaolack contrôlé par l'Afp, Saint-Louis par le Fsd/Bj et Fatick (Apr/Yakaar). C'est le Ps qui s'est taillé la part du lion. Le Parti socialiste nous a utilisés comme escaliers pour revenir au pouvoir. D'ailleurs, ils (les socialistes, Ndlr) considèrent que c'est une victoire du Ps et cela apparaît très clairement dans les propos de Khalifa Sall, après la victoire. Il a dit que la victoire de 2009 a effacé la défaite de 2000. Ce qui a frustré beaucoup de gens. Car en 2000, ce sont les socialistes qui ont été battus et non Benno Siggil Senegaal.

Aujourd'hui, la frustration est générale au sein de Benno Siggil Senegaal. Parce que c'est une victoire commune que d'autres ont accaparée. C'est la somme des efforts de tout le monde qui nous a permis d'avoir la victoire. Il y en a qui ont apporté leur crédibilité, certains leur argent, d'autres leur savoir... On a tout mis en place pour pouvoir gagner, mais au finish, la victoire a profité au Parti socialiste.

Wal Fadjri : Une commission avait été mise sur pied pour régler les conflits en cas de mésentente. Avez-vous eu à soumettre ces questions à ce comité ?

Mbaye Niang : Effectivement, un groupe de contact a été mis sur pied pour superviser la répartition des responsabilités. Mais, en réalité, ce groupe n'a jamais réglé un problème. Pourtant, les problèmes ont été portés à son niveau, mais pour rien malgré les injonctions de son président, Amath Dansokho. Ce dernier a trop insisté sur l'équilibre qu'il faut apporter dans la répartition pour préserver Benno, combattu devant moi l'accaparement et l'injustice. Malgré tout, les responsables de l'Afp, du Ps et de la Ld ont préféré laisser la base décider. Tout en sachant que la décision de la base n'arrange pas les autres partis que nous sommes. Par exemple, quand, au Mrds, nous avons senti une volonté de nous écarter et que cela pourrait créer des frustrations, nous avons adressé une lettre au président du groupe de contact, Amath Dansokho, le 8 avril. Dans cette lettre, nous avons évoqué des problèmes que nous vivons au niveau de la base. Lesquels se résumaient à une volonté de nous marginaliser, de nous exclure. Parce que nous voulons trouver une solution en interne, mais la lettre n'a pas eu de réponse jusqu'à nos jours. Pourtant Amath Dansokho l’a photocopié et remise à tous les leaders. Rien. J'ai moi-même posé par deux fois le problème au niveau de deux conférences des leaders, mais je n'ai pas eu de réponse (...)

Il y a eu aussi une circulaire rédigée par les responsables de Benno et qui devait donner l'orientation qu'il fallait suivre pour la répartition des responsabilités. Les critères avaient été définis dans cette circulaire et ils portaient essentiellement sur l'éthique et la compétence, mais ils n'ont jamais été respectés. Et les leaders n'ont jamais tenu compte des réclamations relatives à ces critères qui venaient de la base. La dernière réunion à laquelle j'ai assisté, j'ai vu un refus de la part de certains leaders, vis-à-vis de problèmes que l'on a posés. Un mépris total. Nous étions frustrés depuis le début face à ces comportements et la répartition des responsabilités a augmenté notre frustration. Et nous n'étions pas les seuls frustrés.

Wal Fadjri : A ce propros, l'Apr avait fait une sortie musclée pour dénoncer la même injustice que vous venez d'évoquer…

Mbaye Niang : (Il coupe) C'est le Mrds et l'Apr que vous avez entendus mais, à part le Ps et l'Afp et, dans une moindre mesure, la Ld, tous les autres sont frustrés. Parce que j'étais appuyé par les autres partis quand je posais les problèmes. Des gens qui se trouvaient dans la même situation que moi mais qui ne parlent pas. Je ne sais pas pourquoi, mais la frustration est générale. Et ça se comprend parce qu'on ne peut pas accepter après tout ce que nous avons fait ensemble que sur 14 communes d'arrondissement gagnées par Benno à Dakar, les 12 reviennent aux socialistes. Même pour les maires adjoints, les socialistes ont tout raflés. C'est par exemple le cas à Louga où, en plus du maire, ils ont les deux adjoints. (A suivre)



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