La volonté politique du Sénégal, clairement affichée, de faire juger l'ancien président tchadien, Hissène Habré, en terre sénégalaise ne fait aucun doute. Le président Abdoulaye Wade l'a affirmé, après s'être vu refiler le bébé encombrant par ses pairs africains, lors du dernier sommet de l'Union africaine à Banjul. Ce qui est moins évident, cependant, c'est la traduction en acte concret de cette volonté politique. Non pas que le Sénégal réchignerait à juger Hissène Habré, ce qui serait ubuesque de sa part, mais parce que les moyens nécessaires pour un tel jugement sont colossaux. Et, nonobstant les efforts consentis par le régime dit de l'alternance, qui a fait passer le budget du ministère de la Justice de moins de 10 milliards Cfa à plus de 20 milliards Cfa, le système judiciaire sénégalais patauge encore dans des difficultés.
Le budget du ministère sénégalais de la Justice pourra-t-il supporter le coût du procès d'Hissène Habré ? C'est la question que se pose ce spécialiste du droit rompu aux arcances des questions liées aux droits humains et aux crimes internationaux. En effet, soutient-il, le juge en charge du dossier pourrait être amené à séjourner au Tchad pour les besoins de son enquête. Parce que, selon notre interlocuteur, l'instruction nécessite l'audition de toutes les parties concernées dans cette affaire. ‘Et la plupart des victimes se trouvent au Tchad’, fait-il remarquer. Dans ce cas de figure, il n'est pas à écarter le déplacement d'enquêteurs vers le Tchad pour assister le juge dans sa tâche. ‘Mais, encore faudrait-il les former aux techniques d'enquêtes sur les crimes internationaux’, souligne notre interlocuteur. Cela a aussi un coût, pardi.
Une autre possibilité consiste à déplacer les victimes au Sénégal. Cette contingence appelle, également, des moyens financiers conséquents. ‘Il faudra leur (les victimes : Ndlr) payer le billet, les loger et les nourrir tout le temps que durera l'instruction’, note notre interlocuteur. Ce qui est quasi impossible puisqu'on parle de milliers de victimes.
Toutes choses qui poussent le spécialiste du droit à lancer un appel à l'Union africaine (Ua) et à la communauté internationale pour qu'elles mettent la main à la pâte mais, surtout à la poche. ‘Même les Nations-unies, pour faire fonctionner les juridictions pénales internationales, font recours à la contribution des Etats membres’, argumente-t-il. ‘Le procès d'Hissène Habré n'est pas l'affaire du Sénégal seulement, mais celle de toute l'Afrique et du monde entier’, ajoute notre interlocuteur. D'autant que, poursuit-il, ‘la responsabilité est partagée’. ‘L'Union africaine tout comme la communauté internationale ont le devoir d'organiser un procès juste et équitable’, avertit notre interlocuteur. Pour ce faire, argue-t-il, ‘il faut réunir toutes les conditions nécessaires pouvant permettre au Sénégal de s'acquitter du travail à lui confié’.
1 Commentaires
Allons Y Molo
En Octobre, 2010 (18:36 PM)Participer à la Discussion