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Politique

SOULEYMANE JULES DIOP sur son amitié avec Idrissa Seck « Peut-être que j'ai perdu un ami, mais je préfère continuer mon chemin avec la vérité.»

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SOULEYMANE JULES DIOP sur son amitié avec Idrissa Seck « Peut-être que j'ai perdu un ami, mais je préfère continuer mon chemin avec la vérité.»

Sur invitation de Res Publica, une société civile du Sénégal basée en France, Souleymane Jules Diop tenait une conférence publique, samedi, à l’Université Panthéon-Sorbonne, sur le thème «L’Etat de la démocratie au Sénégal». Comme dans ses chroniques sur l’Internet, le journaliste-politologue s’est livré à une vraie diatribe contre le régime libéral et son chef Abdoulaye Wade.

«Vous avez entendu (…) il y a quelques jours, que le président de la République, en même temps qu’il mettait en place des structures de surveillance dans l’attribution des marchés publics, l’information relative à l’achat d’un nouvel avion (…). Il y a cinq ans, nous avons été rattrapés par une affaire de ce genre. Nous avions entendu le président de la République, le 23 septembre 2003, dans Jeune Afrique, dire et expliquer comment il a pu payer la réfection de son avion à un montant qu’il a pu estimer à 17 milliards et que nous avions évalué à 30 milliards. Ce n’est pas cela qui est grave. Mais deux ans auparavant, (il) déclarait qu’il n’y avait pas un seul francs des Sénégalais investi dans la réfection de cet avion. (…). Aujourd’hui, dans la presse, on parle d’un avion Airbus qui, en réalité, sert déjà au déplacement du président de la République. Ce n’est pas un avion neuf. C’est un avion qui est pré-positionné à Casablanca en même temps qu’un avion Jet privé Kruman qui sert en réalité au déplacement de l’Anoci au Moyen Orient, que les Chinois ont offert à l’Etat du Sénégal. Aujourd’hui, il a été enregistré au nom d’une société de droit suisse et sert de transport à des privés. Où va cet argent ? On ne le sait pas. Cet avion est un cadeau de la Chine pour la reprise de nos relations diplomatiques. L’Airbus que le président de la République a acheté, (…) appartenait au Sultan de Brunei qui l’a utilisé, qui ne l’aimait plus et l’a vendu au fils de Mommar Kadhafi. Ce dernier l’a parqué ; il ne s’en servait plus et c’est lui qui l’a vendu à l’Etat du Sénégal. J’ai entendu 50 milliards, 60 milliards, dans la presse. Cet avion a été acheté à 30 milliards. Je ne dis pas qu’il y a eu une surfacturation parce que je n’ai pas entendu Me Abdoulaye Wade ou le ministre des Finances dire exactement à quel prix ils ont acheté cet avion. Mais cet avion nous a coûté 30 milliards. Alors le ministre des Finances nous dit depuis deux ans : «Oui, je veux acheter un avion.» Quand il disait cela, cet avion est déjà acheté. Il doit nous dire la date à laquelle l’avion a été acheté et à qui il a été acheté, par souci de transparence. C’est le moins que l’on puisse lui demander. Qu’on nous dise aussi où est la Pointe de Sangomar que nous avons réfectionné à 17 milliards et pourquoi un avion, selon les chiffres avancés par le président de la République, est tombé en panne deux années après, et nécessité qu’on le remette sur le marché. Il faut que nous ayons cette information parce que c’est cela une exigence de transparence. Et c’est le minimum que Abdoulaye Wade nous doit.»

EXIGER LA TRANSPARENCE A WADE

«Qu’on appartienne au Pds, au Ps, à l’Afp, on appartient d’abord au Sénégal. Et c’est en tant que Sénégalais que nous devons nous soumettre à ces exigences de transparence. C’est tout ce que nous demandons depuis quelques années (…) J’interpelle les gens du Pds. Je connais des gens qui se sont sacrifiés pour le Pds, pour Wade. (…) Pour certains, vous avez été à l’Université Cheikh Anta Diop et vu à quel point nous avions souffert de Sada Ndiaye. Vous connaissez bien l’histoire avec la Sapco, avec Adama Sall, avec le Cices. Vous devez avoir la même exigence avec vos leaders et les gens qui nous gouvernent et leur dire comment ils peuvent être capables, en moins de dix ans, après tous ces faits-là, de prendre Sada Ndiaye et d’en faire un Pdg, de prendre Adama Sall et d’en faire un ministre. Aujourd’hui, il y a de l’argent qui a disparu des caisses pour les syndicats. On ne sait pas où est cet argent. Adama Sall a fait une sortie dans la presse pour dire des choses dont on n’a rien compris. Abdoulaye Babou a dit : «Quand je suis venu, j’ai vu que l’argent avait disparu.» Aujourd’hui, on ne peut pas savoir. J’ai des amis au Pds avec qui j’échange… : «Pour votre jeunesse, pour ce que vous êtes et pour ce que vous faites, vous devez jouer ce rôle dans votre parti parce que vous pouvez vous permettre ce que d’autres ne peuvent pas se le permettre, (…) en disant que nous Pds, il faut que nous sachions.»

Je me rappelle ces jeunes du Ps, Khalifa Sall, Sanou Dione, Babacar Mbaye ; il y avait une exigence éthique que ces gens avaient que peut-être certains adultes n’avaient pas. C’est ce qui fait que ces gens-là peuvent parler. C’est ce qui fait aussi, malgré l’alternance, ils ne sont pas tous partis se cacher derrière le Parti démocratique sénégalais et derrière Me Wade. Pourquoi vous ne vous demandez pas comment Abdoulaye Diack, alors que vous vous battiez de Kaolack, de partout pour qu’il y ait le changement, comment des gens comme celui-là peuvent se retrouver Pca de société et toucher un salaire d’un à deux millions alors que vous n’êtes pas capables d’avoir une bourse (…) ? Comment pouvez-vous admettre que ces gens reviennent aux affaires, malgré l’exigence de transparence, et aujourd’hui, l’exigence de résultat par rapport à l’espoir que vous avez fondé sur la personne de Abdoulaye Wade ? Comment pouvez-vous admettre cela ? (…) C’est une série de situations frustrantes que vous vivez, que je vis, que d’autres vivent, que peut-être moi je peux dire, que certains qui sont là-dedans ne peuvent pas dire pour des raisons que je comprends. Mais (…), il faut qu’il ait des gens qui fassent ce travail d’évaluation et, chaque jour, rappellent à Abdoulaye ses promesses et ses engagements.»

ACCORDS SUR L’IMMIGRATION

« (…) On signe des accords pour permettre à des gens de venir faire du travail saisonnier que les Français ne font plus. Et, dans ces accords, les discussions, les négociations, on oublie les Sénégalais qui sont-là depuis des années. Pourtant, ils sont, parfois, dans des conditions beaucoup plus contraignantes, plus difficile. En Amérique du Nord, la situation n’est pas la même pour les Sénégalais. Ils ont beaucoup plus de facilité dans l’obtention des papiers, dans l’obtention de la citoyenneté. Même au Canada ! La France nous doit quelque chose parce que nos grands-parents sont morts pour elle. Cette exigence, ce n’est pas à nous de la transmettre, c’est à nos autorités de le faire.

Quand on vient dans mon pays prendre des jeunes valides, braves, pour les amener dans les plantations au sud de l’Espagne pour travailler de façon saisonnière, cela me rappelle quelque chose. Cela me fait très mal parce qu’il n’y a aucun mérite dans cela. Si nous avions bien travaillé, si nous nous étions battus ces huit dernières années, les jeunes Sénégalais n’auraient jamais eu besoin de sortir pour aller travailler dans les plantations au sud de l’Espagne. Ils n’auraient pas eu besoin qu’on les enterre dans des fosses communes, dans les plages espagnoles. Ils n’auraient jamais eu besoin de descendre dans des pirogues par dizaines, par centaines, pour être parqués dans des camps qui rappellent, à plusieurs égards, les camps de concentration (…) C’est pour ces raisons que nous avons le devoir et la responsabilité, de quelque parti que l’on appartienne, pour quellle que raison que ce soit, de se tenir debout et de dire que nous avons le devoir de faire en sorte que nos enfants et nos petits-enfants soient fiers de ce que nous avons fait, que nous puissions les regarder les yeux dans les yeux en leur disant que nous avons portés notre pays, notre démocratie jusqu’ici, c’est à (eux) de faire le chemin qui reste à faire (…)»

GESTION DES RESSOURCES

«(…) Aujourd’hui, on ne sait pas s’il y aura une année blanche ou pas. J’ai vécu une année blanche et une année invalidée. Je sais ce que c’est de perdre deux années dans sa vie. Cela ne veut pas dire que nous n’avons pas de ressources dans notre pays. Nous avons porté les recettes du Sénégal de 460 milliards à 927 milliards en l’espace de cinq ans. Cela ne veut pas dire que Abdoulaye Wade est allé chercher de l’argent quelque part dans le ciel, (…) qu’on nous a donné plus d’argent ou quoi que ce soit. Non ! Cet argent, il l’a tiré des poches des Sénégalais. Ce sont des recettes fiscales. Cette année, les recettes douanières vont être doublées. Peut-être, à son mérite, nous allons avoir un budget colossal avec des moyens qui seront mis à la disposition du chef de l’Etat.

Ce que je reproche à Abdoulaye Wade, c’est de penser d’abord à lui-même avant de penser aux autres, aux jeunes qui se sont battus pour lui. Une gestion rationnelle des ressources eut voulu d’abord que l’on mette des garde-fous.»

KARIM ET L’ARGENT

«Quand le Président a décidé de mettre en avant son fils, j’étais allé le voir. Je lui ai dit «(…) Vous êtes en train de faire quelque chose que les Sénégalais ne connaissent pas. Nous avons eu Senghor pendant 20 ans, Abdou Diouf 20 ans ; il n’y a personne qui peut reconnaître le fils de Abdou Diouf dans la rue. Et pourtant, ces garçons avaient beaucoup de mérite.» Je lui ai dit que Karim est un Sénégalais comme tous les Sénégalais ; il a le droit lui aussi d’être nommé à des fonctions. Mais, je lui ai dit qu’à partir du moment où vous allez le nommer, il va être soumis au jugement et à la critique des Sénégalais. J’estime aujourd’hui, parce qu’il gère une agence, avec une mission, une feuille de route, nous devons avoir la même exigence de résultats. Je n’ai pas un problème avec Karim Wade. C’est une exigence dans le traitement égal de tous les Sénégalais (…) Il n’a pas plus de mérite que les gens qui se battent pour la «Génération du concret». D’ailleurs, il n’a pas de Cv ; les gens disent qu’il a fait Londres. Il n’a pas plus de mérite que vous, y compris ceux qui se battent pour la «Génération du concret». Il n’y a que du mauvais dans la Génération du concret. Certains des collaborateurs de Karim sont des gens que j’ai amenés chez lui. Je ne peux pas leur dire de quitter. Ce n’est pas cela le problème ; (mais) c’est la première fois dans notre histoire que nous avons pris autant d’argent pour le donner à un seul individu. Le seul précédent, c’est avec Babacar Bâ en 1977 avec le compte K2. Sinon, il n’y a pas de précédent. On n’a jamais pris un individu, un jeune, qui n’a eu que trois ans d’expériences dans les banques à Londres, pour lui donner autant d’argent qu’on lui demande de gérer. Et à la fin, il nous dit qu’il n’a été ni administrateur, ni ordonnateur. Cela veut dire que nous ne pouvons rien lui demander.

Karim dit qu’il reste 205 millions d’euros dans les caisses. Mais dans quelles caisses ? Puisque le budget général a été voté ; on sait, pour chaque ministère, où se trouve et où passe l’argent, chapitre par chapitre ! Mais, je ne vois pas les 205 millions d’euros. L’Anoci est une agence de la Présidence de la République. On nous avait dit que le budget de la Présidence de la République est passé à 54 milliards, entre autres, parce qu’il y avait les agences. Mais, je ne vois pas cet argent. Et c’est aussi respecter Karim Wade, le peuple sénégalais, les gens qui sont là, que d’avoir une certaine exigence de résultats. Si tout le monde le fait, on ne peut qu’y gagner et demain, nous pourrons vivre dans un Sénégal prospère où Karim Wade pourra venir briguer le suffrage des Sénégalais. Et la première condition pour briguer ce suffrage, c’est ce que nous partions dans des conditions égales. Je n’ai pas un autre problème avec Karim. Je suis allé le voir le 7 avril 2001 au Point E. Nous avons discuté. Il m’a dit : «Tu sais, Jules, moi, la présidence merci. Je vais rester à Londres. Des fois, je viens donner des coups de main au vieux». Je lui ai dit : «Karim, c’est la meilleure chose à faire.» Je suis venu à Paris, j’y ai fait un an. Je suis parti. On m’a dit que Karim est à la Présidence de la République. (…) parce que son père veut voir sa petite fille. C’était le début d’une gestion familiale de l’Etat du Sénégal. Nous n’avons jamais eu cela.

Nous devons nous battre, à défaut de créer les conditions de base minimales pour vivre en démocratie et dans un Etat de droit et dans une totale transparence, quant à la façon de gérer le pays. Au moins, que l’on mette des barrières et des garde-fous. Que tous les jeunes Sénégalais, parce que c’est de notre avenir qu’il s’agit, soient tous des sentinelles de quelque parti qu’ils appartiennent. C’est une exigence pour nous, parce que l’avenir c’est nous ; ce n’est pas Karim Wade en réalité. (…)»

DIVORCE D’AVEC IDRISSA SECK

«Pour le cas de Idrissa Seck, j’ai été choqué et déçu au même titre que tous les gens qui parlent des Chantiers de Thiès, du protocole de Rebeuss. Un compagnonnage est long. Le temps possède et révèle en lui la vérité des choses et la vérité sur les gens et sur ce qu’ils sont aussi. (…). Idrissa Seck a des qualités ; j’ai travaillé avec lui. Nous l’avons raté ; il nous a ratés. Et c’est dommage. Il avait un rôle à jouer dans l’histoire de ce pays. Le Sénégal a une mémoire. Il y a des choses que les gens n’oublient jamais. Il y a des choses que l’on ne peut pas dire et des choses que l’on ne peut pas se permettre de se faire. Ce ne sont pas les faits en tant que tels qui me posent problème parce que les fonds politiques ont été gérés par Mamadou Diop sous Senghor, Moustapha Niasse aussi. Il y a toujours eu des couloirs, des passerelles de distribution. Mais ce que j’ai trouvé offensant, vraiment gênant et même inadmissible, est que Idrissa Seck puisse dire publiquement qu’il a pris de l’argent et, comme le Coran le recommande, il l’a distribué à ses proches. Je lui ai dit que ce n’est pas quelque chose que les Sénégalais vont te pardonner. Un ami, c’est à cela qu’il peut servir aussi (…). Peut-être qu’aujourd’hui, j’ai perdu un ami, mais je préfère continuer mon chemin avec la vérité.»

LES ASSISES DE L’OPPOSITION

«La plupart des leaders, y compris Abdoulaye Wade, sont là depuis les années 1950, et vivent avec le complexe du toubab. (…) Les Assises nationales, excusez-moi, c’est une grosse perte de temps. Abdoulaye Wade a raison. L’opposition veut faire gagner du temps à Wade en différant le combat. Il y a deux façon d’évaluer sa force quand on se bat en politique : quand on appelle les gens à manifester et quand on appelle à voter. Ces deux rendez-vous, l’opposition les a manqués (...) Aujourd’hui, il faut que les gens fassent leur évaluation critique. Je n’aime pas le mot Assises nationales. Le seul rendez-vous qui vaille et qu’il faut respecter, c’est le rendez-vous électoral.»



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