Yankhoba DIATTARA, Président national des Fidels : ‘Wade se joue de l'opposition’

Dans cette seconde et dernière partie de l'interview qu'il nous accordée, Yankhoba Diattara revient sur le silence d'Idrissa Seck. Selon le président national des Forces intégrées pour la démocratie et la liberté (Fidel), il n'y a pas urgence à ce que son mentor, qu'il appelle président, s'adresse aux Sénégalais. Parlant de l'oposition sénégalaise, Yankhoba Diattara juge qu'elle n'est pas assez forte pour faire face au président Wade qui les ‘mène en bateau’.

Wal fadjri : Depuis sa dernière visite à Kaolack, Idrissa Seck a disparu de la scène politique locale en observant un silence qui commence à charier des commentaires. Est-ce par stratégie ou par essoufflement ?

Yankhoba DIATTARA : J'ai lu récemment dans votre journal un article, je pense que c'est vous-même qui l'aviez signé, dans lequel on se demande si Idrissa Seck s'est essoufflé. Je tiens à préciser qu'Idrissa Seck est loin d'être au bout de ses forces. Ses mouvements de soutien fonctionnent bien, au niveau des Fidel on est plus que jamais engagé à ses côté, je ne vois pas qu'est-ce qui pourrait l'essouffler. La réalité, c'est qu'Idrissa Seck a été emprisonné pendant sept mois. Pendant ce temps, il a été isolé de sa famille qui s'est exilée en France. C'est tout à fait normal qu'il retrouve sa famille après avoir recouvré la liberté à la suite de non-lieu qui prouvent qu'il n'avait rien fait. Il n'a même pas fait deux mois à l'étranger que l'on veuille lui faire parler. Mais, il n'y a pas urgence à ce qu'il parle.

Wal fadjri : Mais, il y a des questions majeures qui se posent aux Sénégalais et sur lesquelles Idrissa Seck aurait pu donner son point de vue

Yankhoba DIATTARA : Ces questions sont prises en charge par la famille politique d'Idrissa Seck. Ses soutiens, de manière solidaire, expriment leur avis sur des questions d'actualité. Maintenant, c'est à lui d'apprécier le moment opportun pour s'adresser aux Sénégalais. Je tiens à rassurer les Sénégalais de l'engagement d'Idrissa Seck pour son projet de redressement national et du maintien de sa candidature à l'élection présidentielle de 2007. Il n'est pas envisageable qu'il retire sa candidature.

Wal fadjri : Pensez-vous que sa manière de faire de la politique par des déclarations sporadiques à travers des Cd ne soit tout juste une solution de facilité pour éviter les rigueurs d'une descente sur le terrain ?

Yankhoba DIATTARA : Idrissa Seck a une manière moderne et assez singulière de faire de la politique. De sorte que les gens ont du mal, parfois, à le suivre. On ne peut pas dire que cette méthode le détache des réalités sénégalaises. L'exemple le plus illustratif a été donné à Kaolack. Sa sortie spontanée à Kaolack a montré comment les Sénégalais sont attaché à lui, comment ils le portent dans leur cœur et en estime. Les Cd sont des formes modernes d'expression qui sont en phase avec l'évolution technologique dans le monde actuel. C'est une façon de partager l'information avec le plus grand nombre de personnes. Avec les Cd, il peut toucher les Sénégalais qui sont à l'intérieur du pays, mais aussi ceux de la diaspora. C'est une manière de communiuqer plus largement. Toutefois, le contact direct avec les populations est toujours important. J'ai parlé tantôt de ce qui s'est passé à Kaolack. Nous ne sommes pas encore en campagne électorale bien que le Pds y soit déjà. Nous apprécierons l'opportunité de continuer notre tournée à l'intérieur du pays.

Wal fadjri : On a constaté qu'après l'étape de Kaolack, la tournée nationale d'Idrissa Seck s'est brusquement arrêtée. Pourquoi ?

Yankhoba DIATTARA : L'étape de Kaolack a été motivée par deux choses. D'abord, Idrissa Seck voulait continuer sa tournée auprès des chefs religieux pour les remercier de leurs prières quand il était dans des difficultés. Et il ne s'était pas encore rendu à Kaolack. Ensuite, Idrissa Seck voulait remercier personnellement Serigne Mamoune qui est l'un des premiers à lui avoir manifesté son soutien aussi bien sur le plan affectif que politique. L'étape de Kaolack était donc motivée par ces deux points, mais elle était aussi l'occasion de mesurer et de constater l'adhésion des populations à son projet de redressement national et à sa personne. Il faut préciser que nous n'avions pas arrêter un calendrier de tournée à l'intérieur du pays. Mais, je pense que ce sera fait au moment opportun.

Wal fadjri : Nous présumons que vous êtes en contact permanent avec Idrissa Seck. Quelles sont ses activités en France ?

Yankhoba DIATTARA : Effectivement, nous nous appelons très souvent. Ces journées se résument à la gestion de sa famille, à ses audiences avec la communauté sénégalaise de la diaspora, à la réflexion et à la lecture. Idrissa Seck profite aussi de son séjour en France pour peaufiner son programme de redressement national qu'il a annoncé dans son projet de candidature. Pour tout dire, il a un calendrier bien défini. Comme vous le savez, Idrissa Seck est un homme méthodique.

Wal fadjri : Mais, qu'est ce qu'il vous dit quand vous l'appelez au téléphone ?

Yankhoba DIATTARA : Je l'appelle président par respect, mais aussi par rapport à sa position. Il a occupé toutes les stations au niveau de l'Etat, il ne lui reste que la présidence de la République.

Wal fadjri : Et lui vous appelle-t-il Premier ministre ?

Yankhoba DIATTARA : (Rires). Non, non, non ! Je suis encore jeune. Moi, je suis un jeune frère pour lui. Et puis, mon compagnonnage avec Idrissa Seck n'est pas basé sur des strapontins ou des positions auprès de lui. C'est plus que cela.

Wal fadjri : Vous lui avez donné le nom de votre fils

Yankhoba DIATTARA : Cela prouve que nos relations ne sont pas que politiques. C'est avant tout un grand frère pour moi. Quelle que soit la position qu'il occupera, Idrissa Seck bénéficiera de notre soutien. Je l'ai en référence et en estime.

Wal fadjri : En tant que leader de parti, quelle est votre lecture sur la situation politique du Sénégal ?

Yankhoba DIATTARA : Nous avons remarqué qu'il y a un doute permanent qui anime la classe politique sénégalaise. On doute par rapport à l'avenir du Sénégal. Mais, ce qui est grave, c'est que personne ne veut prendre ses responsabilités.

Wal fadjri : Que voulez-vous dire par là ?

Yankhoba DIATTARA : Les leaders de l'opposition sont dans l'expectative. Ils se laissent mener en bateau par Wade en fonction de ses intérêts ou de ses humeurs. Wade se joue de l'opposition et cette dernière ne prend pas l'initiative sur le terrain politique. Sur les grandes questions, l'opposition fait du suivisme. Or, par rapport à leurs expériences, pour la plupart, ils auraient dû prendre les devants.

Wal fadjri : Trouvez-vous que l'opposition sénégalaise et timorée ?

Yankhoba DIATTARA : Tout à fait. Parce que tout simplement, elle est constituée, en majeure partie, par des gens qui étaient dans le pouvoir. Ils ne sont donc pas habitués à la souffrance, comme l'a connu Wade dans l'opposition. Et ce dernier en est consicent et sait qu'ils n'iront jamais loin dans la confrontation. Wade n'a pas une opposition assez forte devant lui, c'est pourquoi il fait ce qu'il veut. Et c'est regrettable.

Wal fadjri : Que pensez-vous de la prorogation du mandat des députés ?

Yankhoba DIATTARA : C'est une question de principe, d'éthique et de moral. Si nous étions à l'Assemblée nationale nous allions quitté l'hémicycle le 30 juin. Wade a prolongé le mandat des députés de manière illégale. La loi qui a été votée à l'Assemblée nationale n'est pas dans la Constitution sénégalaise. Parce que, selon la Constitution, le mandat des députés dure cinq ans. Ni plus ni moins.