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ABDOU DIOUF PARLE DE SON DIFFEREND AVEC LE KHALIFE GENERAL DES MOURIDES: LE PAPE JEAN PAUL II, SERIGNE SALIOU ET MOI

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ABDOU DIOUF PARLE DE SON DIFFEREND AVEC LE KHALIFE GENERAL DES MOURIDES: LE PAPE JEAN PAUL II, SERIGNE SALIOU ET MOI

Abdou DIOUF, en librairie, avoue : ‘Il était plus facile pour moi de gouverner l’Etat que de diriger mon parti’

Probablement, c’est le premier à faire la biographie de l’ancien président du Sénégal, Abdou Diouf, par ailleurs secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie. L’auteur de cette biographie du président Diouf est un Sénégalais de 30 ans, Lamine Tiréra. Il prépare une thèse à l’Université Paris II où il a obtenu un Dea en Sciences Politiques, et un master 2 recherche en Droit public. Son livre, ‘Abdou Diouf : Biographie politique et style de gouvernement’, contient 312 pages et est divisé en trois parties. La première partie s’intéresse à l’entrée en politique et à la construction d’une stature nationale du président Diouf, la seconde parle d’héritage et de pouvoir du successeur du poète-président et la troisième partie s’intéresse au style de gouvernement du président Diouf. Dans cet ouvrage, Abdou Diouf avoue, sans fioritures, qu’il a été plus facile pour lui de gérer l’Etat que son parti. Il a aussi souligné que l’opposant Wade a souvent répondu, surtout aux moments des crises, à l’appel au dialogue. Le président Abdou n’a manqué de revenir sur ses rapports avec les confréries et de ce que doivent être ces mêmes rapports. L’auteur s’est aussi intéressé, entre autres, à la succession de 1981.

Wade et Diouf dans le dialogue

En parcourant ‘Abdou Diouf : Biographie politique et style de gouvernement’, son auteur Lamine Tiréra nous plonge dans l’actualité politique sénégalaise en cours. Avec l’appel au dialogue du président Wade aux leaders de l’opposition. On se rend compte qu’Abdou Diouf a aussi, tout au long de son magistère, tendu la main à ses opposants et particulièrement au président Wade, chef de l’opposition d’alors. Dans l’exercice du pouvoir, M. Lamine Tiréra estime que le président Diouf a rencontré ‘deux types de difficultés (…). D’abord dans le processus décisionnel, M. Diouf a rencontré une difficulté de taille au sein de son parti mais aussi avec les autres leaders des partis politiques’. Pour s’en sortir, l’actuel secrétaire général de l’Oif a fait appel au dialogue cher à son prédécesseur. Mais pour Abdou Diouf, ’il y a des consensus mous sur un terrain minimal, sur une solution minimale que je réprouve. Il y a des consensus forts qui permettent de dépasser des crises, que j’accepte’, souligne Tiréra qui cite l’entretien accordé par le président Abdou Diouf à Philippe Sainteny de Rfi. L’auteur utilise beaucoup cet entretien et l’ouvrage d’Abdou Latif Coulibaly sur ’Le Sénégal à l’épreuve de la démocratie. Enquête sur 50 ans de lutte et de complots au sein de l’élite socialiste’, moins connu du public. D’autres sources ont été également épluchées pour mieux cerner le personnage de Diouf et son action politique à la tête de l’Etat et du parti socialiste.

Le dialogue entre Diouf et Wade a démarré bien avant que le premier n’accède à la magistrature suprême. ‘Quand j’étais Premier ministre, tous les quinze jours, je recevais au petit palais - la résidence du Premier ministre - Fara Ndiaye, le numéros 2 de Wade. C’était un ami personnel. Il était au Pds, et moi au Ps. Il était numéro 2 de Wade, j’étais numéro 2 de Senghor. Avec un ancien du parti, M. Magatte Lô, notre discussion tournait autour d’un point : comment faire pour que la démocratie sénégalaise se consolide ? Nous ne voyions que les intérêts de notre nation. Il rendait compte à Me Wade, et je rendais compte à Senghor. Et cela a continué’, rapporte Abdou Diouf sous la plume ‘sourcée’ de Tiréra. La discussion ne s’est pas estompée même quand il est devenu président de la République en 1981. ‘Quand je suis devenu président, chaque fois qu’il y a eu des crises, je demandais à Wade de venir me voir. Il venait souvent ; mais il était aussi souvent absent. Je dois dire que nous nous sommes souvent vus. Je le répète, dans les moments de crises, quand je l’appelais, il faisait preuve de beaucoup de compréhension’. Cette compréhension se muait parfois en complicité au point d’imaginer que le président Wade a soutenu son prédécesseur dans les moments difficiles. ‘A ce moment, de façon subtile, et je dois dire très confidentielle, très secrète, je parlais avec mon principal opposant (Abdoulaye Wade, Ndlr). Dans un jeu de rôles… il venait, il me disait qu’il comprenait ma position, qu’il ne ferait rien pour mettre l’huile sur le feu, qu’il ne pouvait pas sortir dans la rue pour dire qu’il était d’accord avec moi ; mais que je pouvais compter sur lui pour que la rue ne bouge pas. Là il y avait un consensus fort, on avançait et on sortait de la crise’.

A entendre le président Abdou Diouf, le parti socialiste n’a pas été aussi disponible que Me Wade. ‘J’avais d’ailleurs l’habitude de dire qu’il était plus facile pour moi de gouverner l’Etat que de diriger mon parti’. Et Diouf de soutenir que son parti lui a posé toutes les difficultés quand il a voulu réaliser certaines avancées démocratiques. Comme le multipartisme intégral, comme l’installation de la commission de recensement au niveau de la Cour d’appel pour le recensement national, les magistrats au niveau des régions et des départements pour le recensement à ces différents niveaux et l’implication de la Cour suprême dans le jeu électoral etc. ‘J’ai dû dire : c’est ce que je veux, c’est qu’il faut faire (…)’, tape-t-il sur la table. Ces propos de Diouf font dire à Tiréra que le président Diouf est beaucoup plus intéressé par l’Etat dans le sens de ‘gouverner’, d’’administrer les affaires de la cité, que l’Etat l’intéresse beaucoup, mais le parti politique, un peu moins’. D’où ses difficultés à gérer le Ps contrairement au président Senghor. L’auteur estime que cette différence entre les deux hommes d’Etat se retrouve dans leur parcours politique, Senghor étant formé par les partis de la IVe République française, Abdou Diouf étant un technocrate.

Abdou Diouf et les confréries

Ses rapports avec la religion et les confréries ont été également soulignés. Ces rapports sont d’autant plus importants qu’ils ont beaucoup servi Senghor dans la gestion de l’Etat. Alors qu’Abdou Diouf s’est campé dans le cadre de la laïcité symbolisée par sa famille. ‘Ma famille est tidjane… moi je suis croyant, je suis musulman tout court. Je ne suis pas dans le système des confréries…’. Et Diouf de dire qu'une partie de ses enfants sont des musulmans, l’autre est chrétienne, que l’un de ses fils a épousé une juive.

Ce positionnement de Diouf lui avait permis de garder une équidistance entre les différentes obédiences religieuses. Pour cela, le conseil de Senghor lui a été utile. ‘Le président Senghor m’avait donné une bonne clé quand j’étais Premier ministre. Il m’avait dit : ‘Tous les trois mois, tu vas rendre visite à l’un et à l’autre chef des deux principales confréries des mourides et des tidjanes.’ Je le faisais régulièrement ; mais je ne concédais rien sur le plan de la gestion de l’Etat’. Ce qui expliquera son refus opposé au khalife général des mourides qui ne voulait pas de la visite du Pape Jean Paul II au Sénégal en 1992. ‘Le khalife général s’y est opposé…, en tout cas, il n’a pas été enthousiaste. Mais j’ai dit : mon devoir est de vous informer ; alors je vous informe ! Il y a deux choses à cela. Premièrement, le Pape est un chef d’Etat, et je dois recevoir un chef d’Etat. Deuxièmement, nous avons une communauté chrétienne qui a besoin de voir son guide ; c’est ma responsabilité de la protéger et de lui offrir ce cadeau, de pouvoir accueillir le guide spirituel de la chrétienté’. Abdou Diouf explique cette fermeté par ‘la mystique de l’Etat’ qu’il a. Car il y a des choses qu’il dit ne pas accepter et des demandes auxquelles il ne peut répondre. Pour preuve, ‘je peux vous donner l’exemple de grands chefs religieux qui se sont déplacés la nuit pour venir chez moi et me demander de céder sur tel ou tel point… et sont partis fâchés, parce que je n’avais pas cédé’.

Senghor et Diouf : la succession

Abdou Diouf a opposé cette même attitude à Senghor lorsque celui-ci a demandé à tous les gouverneurs de signer un acte d’allégeance au nouveau pouvoir quand la crise de 1962 a éclaté et Mamadou Dia a été envoyé à la prison de Kédougou. ‘J’ai refusé de le faire parce qu’étant gouverneur, j’étais soumis aux institutions de la République… donc je n’avais pas à faire allégeance personnelle’. Conséquences : Abdou Diouf a été démis de ses fonctions. Même si comparaison n’est pas toujours raison, cet épisode fait penser aux paroles d’Idrissa Seck qui disait au commissaire de police du Point E, lorsque son véhicule a été immobilisé, que des ordres politiques ne peuvent qu’être désobéis. Sans avoir peur des représailles ? En tout cas, dans le cas du président Diouf, il paraît que ce n’était pas une sanction. ‘Senghor m’a reçu pour me dire que ce n’était pas une sanction’. Et la suite lui a donné raison puisqu’il est devenu son successeur à la tête de l’Etat. Pour Lamine Tiréra, cet acte de Diouf témoigne la fécondité de l’esprit du jeune technocrate qui fait la distinction entre ‘ce qui relève de l’administration et ce qui relève du politique’.

Mais la succession a été une âpre bataille entre plusieurs prétendants. Essentiellement, deux camps se sont affrontés sournoisement. Il s’agit de celui de Babacar Bâ qui lorgnait autant que Diouf le fauteuil présidentiel. Il avait de solides relations internationales. Ses alliés étaient Adrien Senghor, neveu de Senghor, Bara Diouf. De son côté, le président Diouf avait pour soutien Djibo Kâ, Moustapha Niasse et le défunt Jean Collin. Ces trois ténors socialistes vont jouer un rôle de premier plan dans la mise en place des stratégies d’accès et de consolidation du pouvoir de Diouf. On comprend un peu pourquoi la position privilégiée de Djibo Kâ, de Moustapha Niasse et de Jean Collin dans le gouvernement de Diouf. Et l’on peut comprendre également, en partie, pourquoi les deux premiers cités ont claqué la porte du Ps lorsque Ousmane Tanor a été choisi par Diouf pour diriger le Parti socialiste.

Tiréra est aussi revenu sur les causes de la défaite du Ps, après avoir analysé le style de gouvernement de Diouf avec son gouvernement de majorité présidentielle élargie. Dans un autre ouvrage, que l’on peut qualifier d’annexe et qui s’intitule ‘Abdou Diouf et l’Organisation internationale de la Francophonie’, Tiréra a rassemblé les discours, les allocutions et les conférences prononcés par le président Diouf en tant que secrétaire général de l’Oif. Un ouvrage qui peut être utile aux chercheurs et universitaires et aux politologues.

 



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