Vendredi 26 Avril, 2024 á Dakar
Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Societe

ENTRETIEN AVEC... Serigne Fallou DIENG, président du Cercle des intellectuels Soufi du Sénégal (Ciss) : « Il faut que Karim Wade clarifie ses relations avec les cercles mafieux »

Single Post
ENTRETIEN AVEC... Serigne Fallou DIENG, président du Cercle des intellectuels Soufi du Sénégal (Ciss) : « Il faut que Karim Wade clarifie ses relations avec les cercles mafieux »

Serigne Fallou Dieng, président du Cercle des intellectuels Soufi du Sénégal, ne veut pas entretenir des relations obscures avec la vérité. Sur les menaces contre Madiambal Diagne, administrateur du Groupe Avenir communication, sur les relations entre les hommes politiques et les chefs religieux, il assène ses vérités, sans détour.

Madiambal Diagne a été menacé de mort par des jeunes Mbacké-Mbacké suite à l’interview que Sophie Ndiaye Cissokho, (ex-)épouse de Serigne Bara a accordée au magazine Week-end. Qu’en pensez-vous ? (Ndrl : l’entretien a eu lieu quelques heures avant le dénouement de cette affaire)

Je voudrais, tout d’abord, condamner ces menaces. Certes, je suis un mouride ; Serigne Bara est mon marabout et je suis aussi petit-fils de Serigne Touba, mais je condamne ces menaces parce que le mouridisme, tel qu’ enseigné par son fondateur (Khadim Rassoul) ne connaît pas la vendetta. Que tout le monde sache qu’on est dans un Etat de droit. Par conséquent, nul n’a le droit de se faire justice soi-même. Donc, vouloir lyncher ou tuer des journalistes relève de l’intolérance. A mon avis, ce n’est pas un acte découlant de la foi.

Même si, en revanche, je condamne la publication des photos de Serigne Bara dans le magazine et l’évocation de sa vie privée. Car, Serigne représente une personnalité religieuse, très sacrée. Quand cette dame (Sophie Ndiaye Cissokho) s’est confiée au magazine, évidemment, ce magazine va publier ces confidences.

Par ailleurs, les épouses des guides religieux doivent être des modèles, c’est-à-dire avoir un comportement digne d’une femme musulmane. Puisque Dieu parle dans le Coran des sanctions qu’encoure la famille du Prophète Mohamed (Psl), en l’occurrence ses épouses, en ces termes : «Ô, vous qui êtes de la famille du Prophète, si vous commettez une quelconque ignominie, Dieu vous infligera un double châtiment !»

Alors, il y a un comportement que doit avoir l’épouse d’un guide religieux. Vraiment, j’avais mal lorsque j’ai lu (l’interview) de l’épouse de mon marabout dans le magazine. La faute n’incombe pas, au magazine, mais plutôt à la dame.

Maintenant, il revient à l’Etat, garant de la sécurité des citoyens, de protéger Madiambal Diagne qui est un citoyen à part entière. Même si je n’accorde aucun crédit à ces menaces. Ce n’est que du bluff. D’autant que Serigne Bara (le Khalife général des mourides) n’a donné l’ordre à personne pour lyncher qui ce se soit. C’est un homme de paix, un pieux.

Votre frère, Serigne Modou Bousso Dieng a eu, récemment, des démêlés judiciaires pour avoir été mêlé à une histoire de trafic de passeports diplomatiques. Qu’en pensez-vous?

Serigne Modou est mon frère cadet, de même père et de même mère. J’ai assisté à ses ennuis judiciaires. Mais, je souhaite ne pas trop m’épancher sur cette affaire. Je compatis à sa douleur parce que c’est mon jeune frère. Je suis une personne respectueuse des lois et règlements (du pays). Peut-être, qu’il s’agit d’un règlement de comptes entre lui et l’Etat comme il a eu à le déclarer. C’est une affaire qui est derrière nous.

Le pays traverse, depuis quelques temps, une crise sociale avec la hausse des prix de denrées de première nécessité. Des marches initiées dans ce sens par des organisations consuméristes ont été sévèrement réprimées. Quelle est votre appréciation ?

Cela prouve, simplement, qu’on est dans un Etat policier. Ce qui me fait le plus mal, c’est qu’au moment où les tenants du pouvoir se la coulent douce, les populations, elles, vivent dans la misère et le dénouement total. Les paysans vivent dans la disette. Les citoyens croulent sous le poids de la flambée des prix de denrées de première nécessité, à savoir le sucre, le lait, le riz, l’eau, l’électricité. Même si l’envolée du prix du riz s’explique par des raisons exogènes.

En tout cas, la politique d’ajustement structurel qu’avaient adoptée les socialistes avait abouti à un embellissement des indicateurs macro-économiques, un environnement des affaires propice. Certes, cette politique d’ajustement structurel a été assortie par des mesures d’austérité et une déflation dans les entreprises, mais, au bout du compte, cela s’est traduit par un environnement sain et une santé financière.

Toutefois, nous ne faisons pas la fine bouche par rapport aux réalisations de Me Wade qui sont visibles avec la stratégie de réduction de la pauvreté qui est providentielle. L’emploi des jeunes est perceptible, les conditions des travailleurs nettement améliorées avec l’augmentation des salaires, les infrastructures scolaires sont renforcées. Sans oublier les infrastructures que nous envie toute l’Afrique. Dakar a changé de visage avec ses ponts, ses tunnels dont l’Anoci est le maître d‘œuvre.

Toutes ces réalisations sont, cependant, entachées par des projets de promotion personnelle, des dépenses de prestige, une spéculation foncière, une mauvaise répartition des richesses.

On parle de l’achat d’un nouvel avion présidentiel. Qu’est-ce que cela vous inspire dans un contexte de morosité sociale ?

Cela traduit un manque de respect de Me Wade à l’égard du peuple sénégalais, dans la mesure où tout le monde ressent le coût élevé de la vie. Sans parler de la famine qui secoue le monde rural. Donc, l’urgence est ailleurs. Par exemple, le Sénégal a besoin d’emblaver 75 000 hectares de blé, pour combler son gap en céréales. L’importation annuelle en blé est de 300 000 tonnes pour le Sénégal. Et il suffit de 45 milliards pour financer 75 000 hectares de blé pour pouvoir assurer son autosuffisance alimentaire pour ce produit. Il en est de même pour le riz car, le Sénégal importe, annuellement, 600 000 tonnes (de riz). Ce qui lui coûte 100 milliards de francs Cfa par an. Si le gouvernement avait investi 5 milliards dans l’agriculture, le Sénégal pourra assurer son autosuffisance en riz.

Pourtant, lors de son adresse à la nation du 3 avril denier, le président Wade a émis le souhait de voir ce projet se réaliser d’ici 2015…

Ce ne sont que des vœux pieux. Me Wade prend des décisions sans lendemain, et le Sénégal continue d’être la proie des malversations à grande échelle. Si le train de vie de l’Etat continue sa courbe ascendante, le Sénégal n’atteindra jamais l‘autosuffisance alimentaire. Me Wade sait que, n’eût été la complicité de certains chefs religieux, il n’oserait pas se permettre de faire certaines choses qui frisent l’aberration. Le Sénégal a atteint l’âge d’or de l’hypocrisie religieuse. Au lieu d’attaquer les fléaux qui minent la société, tels que la délinquance sexuelle, le trafic de stupéfiants, l’homosexualité, l’exploitation humaine, beaucoup d’hommes religieux s’adonnent à un plaidoyer pour dédouaner les gouvernants. Ils s’érigent en basse-cour à la solde de l’Etat dans le but de faire avaler au peuple la pilule amère (…)

Donc, la complicité qu’entretiennent les chefs religieux et les hommes du pouvoir est à la base de la situation que nous vivons ?

Il y a une de mafia politico-religieuse qui a mis le Sénégal à genoux. A chaque fois que les autorités étatiques commettent une bourde, des exactions contre le peuple, c’est une certaine classe maraboutique qui se dresse en rempart pour prendre fait et cause pour l’Etat. C’est pourquoi les Sénégalais commencent à être importunés, voire ulcérés par ces dénouements d’attrape-nigaud que connaît tout différend financier. Toutes les crises découlant d’un détournement financier finissent toujours par se résorber à la faveur des médiations religieuses. L’Etat se réfugie derrière les missions de bons offices entreprises par des khalifes généraux pour noyer les scandales politiques. Me Wade utilise, maintenant, un subterfuge dans les scandales financiers. Il active les corps de contrôle de l’Etat qui épinglent quelqu’un, comme ce fut le cas avec Idrissa Seck. Mais, s’il veut l’acquitter, il prend prétexte de la médiation du khalife général des mourides pour mettre une croix dessus. C’est le cas avec Mbaye Jacques Diop qu’on accuse d’avoir détourné 300 millions. C’est Me Wade en personne qui a dit qu’il y a un trou de 300 millions au Craes (Conseil économique pour les affaires économiques et sociales). Quel est le sort des 300 millions qui appartiennent aux Sénégalais ? Est-ce que les gens ont accepté de rembourser les 300 millions lors de la médiation ? Au demeurant, je salue la médiation du khalife, mais elle ne devrait pas être utilisée comme un moyen de cacher la vérité aux Sénégalais, car il faut connaître la traçabilité de l’argent public.

Ceux qui complotent contre la nation en y impliquant une clientèle religieuse doivent faire gaffe car, il existe des poches de résistance plus vigilantes pour y faire face.

Il y a eu le mariage des homosexuels à Mbao qui avait défrayé la chronique. Quelle est votre position en tant qu’homme religieux ?

Lorsque les gens s’agitaient autour de cette affaire, en son temps, je ne me suis pas prononcé. Je l’ai toujours dit : il y a une certaine connexion malsaine entre le réseau des homosexuels et les pratiques bien de chez nous. Il y a des femmes de certains marabouts qui s’accompagnent avec des homosexuels dans les cérémonies. Les homosexuels sont aussi les auxiliaires des artistes-musiciens. Pour extirper ce mal, il faut s’attaquer aux pratiques, typiquement, sénégalaises.

D’ailleurs, les arguments fournis par le gouvernement pour libérer les homosexuels ne sont pas fondés. Il a invoqué l’article 7 de la Constitution qui dit que tous les citoyens sont égaux. Et, par conséquent, ils (les homosexuels) sont libres de faire ce qu’ils veulent. C’est ce même article qui stipule que les hommes et les femmes sont égaux en droit. Pourquoi, alors, en matière de succession, l’homme a le double de la femme? Donc, si on suit cette logique, on peut en déduire que cette manière de procéder est une anomalie.

La classe politique épilogue sur la réussite ou non du 11e sommet de l’Oci. Quelle est votre position ?

Ce sommet a connu un franc succès, si on le compare au sommet qui s’est tenu en Arabie Saoudite et en Malaisie, puisqu’on a pu voter une nouvelle charte qui a remplacé l’ancienne. Mais, il y a aussi les engagements sur l’augmentation des échanges commerciaux, du volume des investissements, l’échange d’expertise. Ces acquis ont été obtenus grâce aux efforts soutenus et aux orientations concluantes du président Wade. Toutefois, il faut que l’on fasse la lumière sur la responsabilité de certains (opérateurs) privés comme Al Kharafi (entreprise Koweitienne : Ndlr), les promoteurs de l’hôtel six étoiles Sea Plaza. Il faut que l’on sache comment ils sont parvenus à avoir des licences sans pour autant héberger un seul hôte. Même si, dit-on, Karim Wade n’est ni ordonnateur des dépenses, encore moins administrateur des crédits, il en demeure pas moins que les 130 milliards empruntés du privé engagent l’Etat sénégalais. Et, c’est une dette que les populations vont rembourser. Même les 30 milliards sous forme de don qu’elles (les autorités de l’Anoci : Ndlr) ont décrochés, grâce à leur ingéniosité, devraient faire l’objet d’audit.

Mais, Me Wade semble blanchir l’Anoci lors de sa visite à Tivaouane…

Même si Karim n’est ni l’ordonnateur des dépenses, ni l’administrateur des crédits, on devrait les auditer dans la mesure où les 130 milliards engagés par l’Etat du Sénégal seront remboursés par les Sénégalais.

En outre, il faut que Karim Wade, que j’estime bien du reste, clarifie ses relations avec les cercles mafieux.

Quels sont ces cercles mafieux ?

C’est cette oligarchie dont j’ai parlé tantôt, les promoteurs hôteliers qui ont obtenu des permis et qui n’ont pas participé à l’hébergement des hôtes. Ce, au grand dam des promoteurs nationaux. C’est pourquoi, Karim doit clarifier ses relations avec les cercles mafieux. Il doit aussi clarifier ses relations avec Pierre Attias qui a gagné le marché de la communication du sommet de l’Oci.

Parce que Dieu dit dans le Coran que les juifs sont les ennemis jurés de l’Islam. Sur ce plan, Karim m’a déçu, car je fus un de ses fervents défenseurs.

Certains pensent qu’en confiant l’Anoci à son fils, Me Wade prépare sa succession. Qu’en pensez-vous ?

Personnellement, je ne crois pas, jusqu’à preuve du contraire, que Me Wade veuille préparer son fils pour sa succession. Ce n’est que de la diversion. Me Wade a deux Cheikhou Cherifou (le jeune «tanzanien dont le passage avait soulevé de vives polémiques : Ndlr) dans son sac. Le Cheikhou Chérifou, Karim Wade et Cheikhou Chérifou, Idrissa Seck. Il peut attirer l’attention sur Karim Wade, et, subitement, nous présenter Idrissa Seck. Il faut l’attendre sur les deux fronts pour ne pas être pris au dépourvu. 



0 Commentaires

Participer à la Discussion

  • Nous vous prions d'etre courtois.
  • N'envoyez pas de message ayant un ton agressif ou insultant.
  • N'envoyez pas de message inutile.
  • Pas de messages répétitifs, ou de hors sujéts.
  • Attaques personnelles. Vous pouvez critiquer une idée, mais pas d'attaques personnelles SVP. Ceci inclut tout message à contenu diffamatoire, vulgaire, violent, ne respectant pas la vie privée, sexuel ou en violation avec la loi. Ces messages seront supprimés.
  • Pas de publicité. Ce forum n'est pas un espace publicitaire gratuit.
  • Pas de majuscules. Tout message inscrit entièrement en majuscule sera supprimé.
Auteur: Commentaire : Poster mon commentaire

Repondre á un commentaire...

Auteur Commentaire : Poster ma reponse

ON EN PARLE

Banner 01

Seneweb Radio

  • RFM Radio
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • SUD FM
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • Zik-FM
    Ecoutez le meilleur de la radio

Newsletter Subscribe

Get the Latest Posts & Articles in Your Email