«Toutes les accusations reprochant à mon fils des dépenses somptuaires sont fausses. Je l’affirme ».Ces propos nous ont été rapportés par le Journal « Marianne », suite à une interview que le Chef de l’Etat leur a accordée.
Les exemples sont devenus nombreux où le Président de la République s’empresse de porter sa robe d’avocat, et de plaider pour son fils, des lors qu’il fait l’objet de plainte ou d’accusation.
Il est vrai que quand un Homme de 80 ans, de surcroît Président d’une République, parle de son fils de 40 ans son cadet, il le fait avec amour, passion et beaucoup d’émotion. Normal ! Serait-on tenté de dire, tant il est vrai que chacun de nous est le fils d’un père, qui éprouve à bien des égards, les mêmes sentiments envers sa progéniture. Mais de la part d’un chef d’Etat, l’expression exagérée d’un tel sentiment peut facilement se confondre à une simple réduction des affaires de l’Etat à la dimension subjective d’une auto-défense des intérêts de la famille. A bien des égards, cela peut apparaître comme un mépris royal envers ses compatriotes, et surtout envers les enfants des autres pères. En affirmant « qu’il n’a pas encore vu dans son entourage quelqu’un qui maitrise mieux que lui le domaine de l’argent », il n’est pas sans rappeler ces propos du comte de Lille : « La meilleure manière de ne pas trouver ce que l’on cherche, c’est de le chercher là où on est sûr de ne pas le trouver ».
Nombreux sont les Sénégalais qui se demandent aujourd’hui, de quoi le Président de la République est encore capable, pour nous « vendre », et au besoin nous imposer « son produit phare » manufacturé après le 19 mars 2000, dont il ne manque aucune occasion pour améliorer le profil, et qui, dans son entendement, serait sans doute après lui, le meilleur des citoyens de ce pays. C’est peut-être l’explication à donner à ce plan de carrière aux allures d’un TGV qu’il lui a affectueusement confectionné. Il en a fait d’abord son conseiller spécial, ensuite Président du conseil de surveillance de l’ANOCI, et pour l’heure, Ministre d’Etat, Ministre de la coopération internationale, des Infrastructures des Transports aériens etc. (je ne garantis pas l’appellation officielle).
Combien de Sénégalais ont souri, éclaté de rires ou encore pire, exprimé leur rage (chacun a réagi selon son tempérament), devant les propos dithyrambiques du Chef de l’état à l’endroit de son fils, le consacrant comme « un des meilleurs experts, pas seulement au Sénégal, mais de toute l’Afrique » et lorsqu’il affirme aussi qu’il avait les mains propres, pour avoir bien géré l’ANOCI ? Il ne restait plus qu’à placer la cerise sur le gâteau, en demandant aux Sénégalais de prier pour qu’il soit leur prochain Président de la République. L’allusion au passage des deux Bush à la Maison Blanche, à Bongo et à Eyadema, n’est elle pas le clin d’œil qui rappelle qu’il « ne serait pas le premier Chef d’Etat à souhaiter que son fils devienne Président ? »
On se souvient que devant le Khalif Général des Mourides à Touba, il aurait laissé entendre, que son fils avait abandonné toutes « ses » affaires en Europe pour venir se consacrer au Sénégal. Certains se sont demandés, si le chef de l’Etat n’avait pas confondu son bien aimé petit garçon à José Manuel de Barros, l’actuel Président de la commission de l’Union Européenne, ou alors Xavier Solana, le Haut Représentant pour la politique étrangère de l’Union Européenne, ou peut être encore, M. Jean-Claude Trichet, le Président de la Banque Centrale Européenne. En tout état de cause, et au regard du sérieux de sa déclaration, le « messie » ne pouvait être dans le pire des cas, que de la lignée de ces illustres européens qui ont fait, ou qui continuent de faire l’histoire du vieux continent. En effet, tout porte à croire que « toutes les affaires » de celui la que personne ne connaissait ici au Sénégal, aussi bien sur le plan politique que dans le secteur économique, avant l’avènement de son père en l’an 2000, étaient si importantes et si florissantes, que sa venue au Sénégal pour répondre à l’appel de la Nation, aura provoqué un véritable tsunami dans le système économique et financier de l’Europe.
Il aura fallu donc que « l’expert » se sacrifiât pour venir montrer à ces Sénégalais incompétents et incapables comment bâtir trois ponts, construire et aménager quelques 20 km de route, réfectionner l’hôtel Méridien, le tout pour un montant estimé à plus de 300 milliards, dans la plus grande opacité, tel que révélé dans l’ouvrage de Abdou Latif Coulibaly.
Monsieur le Président de la République, avec tout le respect qui s’attache à votre âge et aux fonctions que vous assumez, permettez qu’il vous soit rappelé que vous n’êtes pas habilité à blanchir votre propre fils, encore moins à lui décerner ce titre d’expert, pour autant que nous traduisons ce mot dans le même sens. C’est le lieu de rappeler une fois encore, que si votre fils a obtenu le prix d’excellence de sa classe, il le doit au simple fait que son père est le Directeur de l’Etablissement. Votre fils ne pourra pas avoir les mains propres, simplement parce que vous l’aurez décrété, même si par des subterfuges, l’on a cherché à le « blanchir » par une parodie de passage au Parlement. Il le sera peut être, lorsque les dossiers pour lesquels aux yeux de tout le monde, il aura fait figure de principal pilote, auront fait l’objet d’un audit réellement indépendant. Certes, avec L’ANOCI, il est vrai qu’au fur et à mesure que le projet évoluait, de nombreuses modifications ont été notées dans les décrets successifs organisant la structure et qui visaient manifestement, et sans doute volontairement, à lui aménager un espace qui le mettrait à l’abri des conséquences de toute implication à d’éventuelles malversations ou fautes de gestion. En effet, l’analyse de ces décrets laisse apparaitre que l’on a fini par faire de l’ancien Directeur exécutif, le responsable principal de tout manquement par rapport à la gestion de ce projet. La déclaration du Chef de l’Etat à Washington confirme qu’une telle démarche était loin d’être innocente. Il a simplement demandé à ces compatriotes de suivre son regard. Monsieur le Président de la République, des lors que vous affirmez d’une part, que la tenue de l’OCI a été un succès, et que d’autre part, votre fils n’a rien géré comme vous le rappelez avec force, pourquoi ne pas accréditer alors tout ce résultat à celui qui a géré, et à tout le moins à toute son Equipe?
Il serait désolant que la rupture avec son peuple soit si profonde, que le Président de la République, ne se rendre pas compte du désir ardent de Justice et d’équité qui animent ses concitoyens aujourd’hui, et qui les pousse à rejeter toute forme de discrimination, en particulier lorsque cela se fait en faveur de son propre fils. La majorité de ses compatriotes, y compris dans son propre camp, se sent franchement agacée par cette précipitation et cette obsession qu’il manifeste en toute circonstance, à vouloir défendre son fils, face aux critiques et accusations qui lui sont adressées, ou à le porter au pinacle, cherchant à dévaloriser au passage tout ce que ce pays compte de personnes dignes et valables.
Les exercices de promotion du père en faveur du fils, auxquels on a assistés la semaine dernière dans la presse internationale et nationale, n’ont eu d’autres effets que de nous éloigner du cercle des pays démocratiques, en plus de nous avoir rendus vraiment tristes.
Il est vrai qu’au regard de ce à quoi nous sommes habitués depuis dix ans, il serait vain
d’espérer de sa part une reconversion qui ferait de lui le père de la Nation, c'est-à-dire le Président de tous les Sénégalais, et pas seulement de son enfant biologique.
Ce serait d’autant plus utopique d’y croire que depuis fort longtemps, notre Etat a cessé d’exister sur les fondements de l’équité, de la rationalité et des règles républicaines, pour se perdre dans les méandres de l’informel, du tâtonnement et de l’improvisation
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