La lutte contre l’émigration clandestine, initiée par les autorités sénégalaises, semble vouée à l’échec. Si, la nouvelle du naufrage d’une embarcation à Sao Polo, au Brésil, en provenance du Sénégal, a semé une peur passagère dans les rangs des passeurs et autres candidats, le voyage à bord des pirogues à destination de l’Europe connaît un grand succès. Descendu sur la plage de Hann, un intermédiaire que nous avons rencontré nous a appris que «le prix de la traversée varie entre quatre cents et cinq cent mille francs». Soit, six cent dix (610 euros). Une fois cette somme encaissée, le convoyeur prend sur lui tous les frais liés au voyage. Ce voyage qui commence tantôt à Hann, à côté du Cercle des voiliers de Dakar, se termine le plus souvent aux larges des côtes espagnoles aux Iles Canaries. Chaque jour, depuis plus de quatre mois, ce sont des dizaines de jeunes gens qui empruntent ces embarcations de fortune pour rejoindre l’Occident. À en croire cet intermédiaire que nous avons rencontré, «au début, c’est 70 personnes qui embarquaient. Mais, maintenant, c’est une cinquantaine de personnes qui empruntent une pirogue». Après un périlleux voyage de 5 à 6 jours, les voyageurs qui arrivent en territoire espagnol aux Iles Canaries sont pris en charge par la Croix rouge espagnole. Une fois récupérées, ces personnes qui sont transférées sur la terre ferme en attendant leur expulsion disparaissent sans laisser de traces. Encourageant les autres, restés en Afrique à faire de même. «Depuis que les partants du mois de février ont appelé pour faire savoir qu’ils sont en Espagne, tout le monde a voulu partir», affirme notre interlocuteur. Pourtant, si ces personnes et celles qui sont parties en janvier ont donné des signes de vie, les voyageurs qui sont partis plus tard ne donnent aucun signe de vie. «C’est le cas de M. Diop. Ce gars, parti il y a deux mois, a laissé une femme et un petit bébé. Et, depuis son départ, il n’a jamais appelé. Et, elles sont nombreuses, les familles qui n’ont aucune nouvelle des leurs». Pour sa part, notre source affirme que c’est sa mère qui l’a dissuadée de partir. Après avoir pris le chargement et préparé un ravitaillement de six jours, le capitane, qui embarque, se fondra dans la masse une fois à bon port. Et l’embarcation est, le plus souvent, détruite par les Espagnols. Sur cette plage de Hann, cinquante mille francs sont offerts à chaque intermédiaire qui trouvera un candidat. Et, à celui qui trouvera cinq candidats, une place à bord de l’embarcation est assurée. «D’ailleurs, dira-t-il, un de mes amis est parti. C’est sa sœur qui a démarché cinq candidats». Pourtant ces candidats ne sont pas des jeunes désœuvrés. La plupart d’entre eux sont des commerçants qui ont des cantines à Sandaga.
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