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Entretien avec l’ancien capitaine de l’Equipe nationale : Coly pointe les maux

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Entretien avec l’ancien capitaine de l’Equipe nationale : Coly pointe les maux

Sacré Ferdinand Coly ! Au moment où on essayait de le joindre, entre la France et l’Italie où il navigue souvent, pour qu’il donne son avis, l’ancien capitaine des Lions était «caché» ici à Dakar. C’est donc avec surprise qu’il nous a répondu au bout du fil sur un ton taquin : «Vous me cherchez alors que je suis à côté de vous.» Après nous avoir chambré, l’entretien pouvait débuter. Avec comme point focal : l’élimination du Sénégal de la Can-Mondial 2010, et ses conséquences. Visez la franchise du discours.

Comment avez-vous accueilli l’élimination des Lions de la Can et au Mondial 2010 ?
C’est une très grosse déception. On est tous déçu et triste. Le Sénégal qui ne jouera pas de Coupe d’Afrique et qui n’ira pas non plus à la Coupe du monde, c’est une déception et une surprise aussi.
Vous avez suivi le match Sénégal-Gambie (1-1) ?
Non ! Je ne l’ai pas suivi. Mais, l’écho que j’ai eu, c’est qu’on avait en face un adversaire gambien qui était vraiment en jambes et techniquement au-dessus du Sénégal. Il n’y a pas de secret. Peut-être qu’on a beaucoup couru à vide sur ce match, et à la fin, cela a été terrible pour les grands gabarits sénégalais face aux vifs et techniques Gambiens.
On a l’impression que c’est toujours le même scénario, avec des buts encaissés, à cha
que fois, en fin de partie, par les Lions.  
C’est vrai qu’il y a eu beaucoup de buts encaissés par l’équipe dans le dernier quart d’heure. Cela peut aussi être considéré comme la peur de ne pas perdre. Alors qu’en général, le Sénégal dominait ses adversaires. Par un manque de concentration, de rigueur ou de détermination, on se fait souvent remonter par des équipes qui sont beaucoup moins fortes que nous. C’est pour cela que dans le football, il ne faut rien sous-estimer. Tant que l’arbitre n’a pas sifflé la fin du match, rien n’est acquis. Malheureusement, on l’a payé dans de nombreuses reprises.
Y a-t-il d’autres raisons qui expliquent cette baisse de régime en fin de match ?
Quand vous arrivez à la fin d’un match, il y a la fatigue qui devient plus présente. Il y a aussi une question de concentration, de rigueur. Quand on a la qualification en poche et qu’on joue à domicile, c’est un peu difficile à expliquer. On doit tout faire pour maintenir ce résultat. Se faire rejoindre comme ça, c’est extrêmement dur à avaler. Quand on a une qualification, à quelques cinq, six minutes de la fin d’un match, on ne peut pas se permettre de rater cela. C’est une grosse déception. On a connu cela contre le Togo à Dakar (2-2). Et là, on a encore payé cash ces erreurs. 
Pensez-vous que l’équipe ait manqué d’un aboyeur, surtout au cours de ce match ?
C’est vrai qu’il faut des leaders dans le groupe. Des leaders qui soient capables d’ameuter la troupe, réveiller et secouer certains en cours de match. Quelque part, c’est peut-être cela qui a manqué.
Donc il y a un réel problème de leadership dans cette équipe ?
Je suis la Tanière de loin. Mais, je sais que quand je venais jouer, je parlais énormément sur le terrain. On ne peut pas rester muet sur le terrain. C’est cela qui manque aussi. On a toujours quelque chose à dire. Que ce soit en positif comme en négatif. Au moins, cela permet de garder la concentration. Même si certaines choses ne font pas plaisir à dire. Mais, il faut le dire. Cela permet de rester solide, d’être éveillé, ne pas s’endormir surtout en fin de match.
Il y a pourtant des joueurs qui ont ce profil de leader, comme Malickou, Diagne Faye ou El Hadji Diouf. Ce n’est pas votre avis ?
Ce n’est pas forcément ça. Il y a des joueurs qui, sur le terrain, parlent moins. D’autres qui parlent plus, comme Aliou Cissé (ancien capitaine des Lions) le faisait très bien. Malickou, il parle aussi. Mais, il y a des joueurs qui peuvent rester sur un terrain sans parler. Moi, quand je vois un adversaire qui est en difficulté, il y a toujours quelque chose à dire : “Attention, ça vient.” C’est pour prévenir son partenaire qui est à côté. Nous, en Italie, on nous dit de parler. C’est vrai qu’on parle dès fois trop. Mais au moins, on reste concentré.
Pourtant vous avez ce profil. Mais vous êtes revenu dans l’équipe pour aussitôt repartir. Pourquoi ?
C’est vrai que je ne voulais pas revenir, mais après j’ai accepté. J’ai fait un match amical contre le Ghana, puis contre le Burkina Faso. Après, j’ai préféré laisser ma place et continuer mon championnat comme je le faisais. Pour moi, c’était le moment de raccrocher. Pourtant, j’ai longtemps réfléchi parce que c’était extrêmement difficile de dire stop à quelque chose qu’on aime, où on s’est autant investi. Cela n’a pas été facile. Je me suis vraiment torturé. Maintenant, une fois que j’ai pris ma décision, avant la Coupe d’Afrique en plus, j’y vais jusqu’au bout.
Pour revenir à l’élimination des Lions. Vous vous attendiez à un tel scénario ?
Je ne m’attendais vraiment pas à cela. C’est vrai qu’on a eu quelques signes annonciateurs pendant la dernière Coupe d’Afrique des nations (Can) au Ghana. Malheureusement, on n’a pas su tirer les enseignements de cet avertissement. Et on paye très cher, aujourd’hui, l’élimination du Sénégal pour les prochaines compétitions au niveau international.
A quel niveau aviez-vous perçu des signes annonciateurs ?
C’est surtout le fait que les résultats de la dernière Can n’ont pas été pris en compte. L’équipe a très mal joué au Ghana. Il y avait un groupe qui était cassé. Il y avait un malaise qui était là. Et cela s’est ressenti pendant cette Can. On n’a pas su tirer ces enseignements. Malheureusement, le mal était tellement profond qu’il était difficile de le réparer.
Pourtant, on pensait repartir sur de nouvelles bases au lendemain de la Can 2008.
C’est vrai qu’on a essayé. Mais cela n’a pas marché. C’est aussi le sport. On ne peut réussir à tous les coups. On a su gagner pendant des années. Maintenant, il faut apprendre à perdre parce que c’est le football aussi. Il faut essayer de reconstruire pour l’avenir. Ce ne sera pas facile, mais on n’a pas le choix.
Que vous inspire les retours de Khalilou Fadiga et Salif Diao, deux cadres de la génération 2002 ?
Les retours font toujours plaisir. Mais, c’était à Fadiga et à Diao d’évaluer leur condition physique pour démontrer qu’ils ne reviennent pas pour le plaisir. Mais pour apporter quelque chose. Après, s’ils ont senti la force de le faire et qu’à la fin, ils se rendent compte qu’ils n’ont pas été à la hauteur, c’est une erreur. Du coup, leur retour ne servait à rien. Mais, je pense qu’ils sont venus avec leur volonté de bien faire. Malheureusement, le football se joue en équipe. Cela ne se joue pas sur une ou deux personnes.
Beaucoup d’observateurs pensent que c’est véritablement la fin de la génération 2002. Etes-vous de cet avis ?
Les médias aussi parlent souvent de la génération 2002. Si je regarde la feuille de match, je n’en vois pas beaucoup. Il y en a trois (Tony Sylva, El Hadji Diouf, Henri Camara). Si on ajoute les deux retours de Fadiga et Diao, cela fait cinq. C’est bien beau de tout mettre sur le dos de la génération 2002, mais, il faut dire aussi que la relève n’a pas été à la hauteur. Cette relève qu’on a tant réclamée, tant portée au-devant de la génération 2002 n’a pas joué son rôle aussi. Si la génération 2002 est encore là, cela veut dire que la relève n’était pas là.
Doit-on encore faire confiance à certains cadres dans cette quête d’un nouveau départ ?
N’ayant pas de compétitions officielles pendant deux ans, voire trois, l’état des lieux est vite fait. Il faut rebâtir avec du neuf, et préparer les qualifications pour la Can 2012 avec une nouvelle génération. C’est un projet à long terme. Cela va être long. Mais, il faut laisser les gens travailler.
Comment y parvenir ?
Il faut déjà commencer à recenser les Sénégalais de l’extérieur qui sont sélectionnables, organiser des stages de regroupements que ce soit à Dakar ou en Europe. Il y aura aussi les dates Fifa. Cela permettra à ces jeunes de vivre ensemble, de se connaître. Une meilleure manière de préparer l’équipe pendant trois ans. Il y a plein de choses à faire. Il ne faut surtout pas perdre de temps, non plus. Il faut choisir un sélectionneur qui peut avoir un projet sur trois, quatre ans, et former les jeunes rapidement.
Justement, quel doit être le profil de cet entraîneur ?
J’ai entendu dire qu’il ne fallait pas donner l’équipe à un Sénégalais. Je pense que c’est faux ! Que ce soit un Sénégal ou un étranger, il doit être assez fort pour imposer ses idées. C’est-à-dire ne pas forcément écouter les médias. Ne pas être influencé. S’il a une idée en tête, qu’il l’applique. C’est lui-même qui doit décider.
Pensez-vous que cela puisse se faire dans ce pays ?
Mais bien sûr. Je dis bien qu’un Sénégalais pourra faire l’affaire. Justement, il faut qu’il ait du caractère. Je crois qu’il y a des techniciens ici au Sénégal qui sont valables. Il ne faut pas les exclure. Moi, je pense que c’est comme une forme de racisme de dire : non aux entraîneurs Sénégalais. Pourquoi s’auto-dévaluer à chaque fois, alors qu’on a des gens qui sont capables et compétents chez nous ? C’est vrai que l’histoire a toujours voulu que ce soit un étranger qui vienne encadrer l’Equipe nationale. Mais l’essentiel, c’est que le résultat soit là, peu importe la nationalité de l’entraîneur. On a essayé avec Ablaye Sarr et Amara Traoré (Can 2006). Avec le recul, on constate qu’ils avaient fait du bon travail. C’était un choix logique, parce qu’ils connaissaient le groupe. Ils avaient vécu avec l’équipe. Amara a joué avec l’équipe. Ablaye a côtoyé pendant des années et des années, l’équipe. Donc, ils savent. Mais malheureusement, avec Laye Sarr et Amara, il y a un savoir qui a été cassé.
Vous regrettez le limogeage de Lamine Ndiaye ?
C’est quand même quasiment logique. Même si tout n’est pas entièrement de sa responsabilité. Malheureusement, Lamine paye les pots cassés. Il ne faut pas oublier qu’il y a eu une guerre assez longue entre la Fédération et l’Etat. Des dates Fifa ont été sautées. Je ne dis pas forcément que le résultat est lié à cela, c’est tout un ensemble. Après, il ne faut pas s’étonner que le Sénégal ne soit pas qualifié.
Pensez-vous que l’ancien coach des Lions ait failli dans le choix des hommes ?
De toutes les façons, quand il y a le vent de la défaite, tout est négatif. Ce qui est fait, est fait. Il faut regarder devant. C’est trop facile maintenant de parler. Et c’est dommage maintenant qu’on voit des déballages, des bêtises, de la méchanceté, du tout. Nous, on ne sait pas tout ce qui se passe dans l’équipe. Si Lamine (Ndiaye) a reçu ou pas des pressions. C’est extrêmement complexe. Après, il faut que le sélectionneur soit capable d’imposer ses idées. Il doit le faire par rapport à ses convictions. Voilà, c’est tout. C’est lui qui décide. Après, le jour où il n’y a pas de résultat, ce sera le premier à être viré. C’est ce qui s’est passé.
Quand vous parlez de bêtises, faites-vous allusion aux récentes sorties de Souleymane Diawara et El Hadji Diouf dans la presse ?
Justement ! Cela ne sert à rien de se tirer dessus. S’ils ont des choses à régler, qu’ils le règlent entre eux. Nous, la force de notre groupe, c’est que s’il y avait un problème entre nous, on avait le courage et la franchise de se le dire en face. On ne déballait pas notre linge en public.
L’histoire des clans n’a pas arrangé les choses...
Quand vingt ou vingt-deux joueurs vivent ensemble, il y a forcément des tensions. Mais tout doit se régler tranquillement, en parlant, en discutant, en disant les choses, sans forcément déballer tout cela en public. Et c’est pour cela que le groupe s’est fissuré. On a fait aussi preuve de prétention par rapport à ce qu’on a vécu. On s’est présenté en tant que le Sénégal de 2002. Ce n’est pas comme ça. Toutes les équipes travaillent physiquement, tactiquement. Cela devient de plus en plus difficile. Il ne suffit plus de se présenter juste avec son palmarès pour dire que le match est gagné. Les joueurs ont manqué d’humilité. Et cela ne pardonne pas. Je pense qu’on va revenir sur terre. On va s’atteler à reconstruire notre football.
Dans cette phase de reconstruction, êtes-vous prêt à apporter votre expérience ?
Je suis en train de voir si je dois continuer à jouer ou pas. Après, si on fait appel à moi, je ne dis pas que ce n’est pas impossible. Mais pour l’instant, ce n’est pas ma priorité. Si je m’investis, je le ferai à 100%. Ce sera pour essayer de mettre en scelle des recruteurs, des gens qui sont dans chaque pays, recenser tous les Sénégalais qui sont dans les centres de formations, fiche à l’appui. C’est le minimum. Il faut éviter d’appeler les gens et leur dire : “Tient, il y a un joueur là-bas, va le voir.” Il faut éviter le hasard. Tout doit être centralisé, répertorié. On doit savoir qui fait quoi et qui est qui. Quel joueur peut apporter quelque chose à l’équipe. Après, il faut mettre en place toute une organisation et se donner les moyens. Ce rôle, les anciens peuvent le jouer. C’est possible parce qu’on a joué dans les meilleurs championnat d’Europe. On sait ce que c’est  que l’organisation. On sait s’occuper d’un joueur, à la veille d’un match et avant le match. Il y a certaines choses qu’on a vécues et qu’on connaît.
Sur le plan personnel, vous êtes sans club. Etes-vous toujours à la recherche d’un autre point de chute ? 
Pour l’instant, je n’ai finalisé avec aucune équipe. Je réfléchis encore. En étant libre, je peux signer quand je veux. Si je rejoue, ce sera un coup de cœur. Comme, par exemple, retourner dans un de mes anciens clubs où j’ai joué. Que ce soit Perouse (Italie), Châteauroux (France). Et pourquoi pas aller dans un pays arabe. Ou alors carrément arrêter parce que je n’aurais pas trouvé de challenge. Pour l’instant, je réfléchis.
Et comment comptez-vous garder la forme, surtout que vous êtes présentement à Dakar ?
J’ai un programme extrêmement rigoureux à faire tous les matins, au point de vu physique. Je maintiens un rythme assez soutenu. Parfois trop (rire). Mais bon, c’est à ce prix là qu’on reste en condition. La compétition n’est pas là, donc il faut compenser par un programme qui a été fait sur mesure pour rester en forme. Après, tous les matins, je suis occupé. Je gère mes affaires. Là, je suis actuellement à Dakar pour quelques jours. Après, je repars aussitôt en Italie.



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