LUTTE - Serigne Dia «Bombardier» face à la presse : «Cela fait mal que Tyson arrête la lutte»

«Bombardier» est formel : sa victoire contre «Tyson» ne souffre d’aucune contestation. Face à la presse hier, le chef de file de l’écurie de Mbour, tout en déplorant la décision de Mohamed Ndao de mettre fin à sa carrière, s’est dit prêt à lutter contre n’importe quel adversaire et à donner leurs chances aux jeunes.

Serigne Dia s’extirpe de l’ascenseur de l’hôtel Novotel décidé à combattre devant les journalistes. «Bombardier» cache ses muscles dans un boubou traditionnel «ganila» de couleur marron. Aucune joie démesurée sur son visage, sinon de la sérénité. Le «B52» s’avance lourdement, sert des mains et prend place sur la scène. Les photographes le mitraillent de flashs, il résiste et fait face. L’œil de la caméra ne le lâche pas du regard, «Bombardier» ne cède toujours pas, même s’il est quelque peu intimidé. Il croise les bras tout en jetant un regard furtif sur l’assistance qui le dévore des yeux. Mais, flanqué de son entraîneur Max Mbargane, Serigne Dia cherche à contenir son émotion. A faire face. Il essaie de se la jouer zen. Il sait qu’il risque de subir les Mbotti de certains journalistes et se braque d’emblée. «J’attends les questions si quelqu’un pose tranquillement des questions, je lui réponds en toute tranquillité», avertit-il. Des applaudissements fusent dans la salle, «Bombardier» croise les bras. Son visage porte encore les stigmates d’une nuit mouvementée, ses yeux sont noyés sur son visage abondant de chair, il est joufflu.

Mais, pour parler du combat de dimanche dernier, Serigne Dia fronce les sourcils, remue ses paupières et explique sa victoire. «Quand l’arbitre a donné le coup d’envoi du combat, j’ai tenté de marcher sur lui comme lors de notre première confrontation il a reculé. Quand il y a eu contact il a essayé de faire un hancher, j’ai bloqué sa main, alors il a voulu enchaîner en forçant la prise. J’ai compris qu’il voulait passer en force j’ai tenté le hancher à mon tour. Et lui, il sait très bien que sa tête a touché terre en premier. Parce que si sa tête n’avait pas touché terre, il n’allait pas rebondir», explique «Bombardier» avec force détails.

Son entraîneur acquiesce, ses supporters exultent dans la salle. Le lutteur convaincu de son fait passe à la vitesse supérieure pour plonger sa main dans les archives. «Quand Tyson luttait avec Mor Fadam en Gambie, ils ont tous les deux entrepris une action en hauteur et ils sont tombés à terre. L’arbitre leur avait dit de poursuivre l’action. Alors pourquoi en ce moment-là il n’a pas dit qu’il était vainqueur ? Je suis un musulman si l’arbitre avait déclaré que j’étais vaincu, j’aurai accepté son verdict. Tyson sait bel et bien que je l’ai battu. Et je confirme que je l’ai battu», jubile-t-il le sourire en coin, le regard compatissant face à la décision de «Tyson» d’arrêter la lutte.

«ÇA FAIT MAL QUE TYSON ARRETE»

Acculé par les journalistes au bout des «sacs» Bombardier lâche : «Un lutteur de ce niveau ne peut pas comme ça arrêter la lutte sans que ses supporters aient mal. Et je reconnais sincèrement que cela fait mal d’entendre que Tyson arrête la lutte. J’aurai préféré qu’il continue de couver ses jeunes frères de l’écurie Boul Falé.»

Désormais, le chef de l’écurie Mbour jette le regard lointain vers l’horizon pour scruter un nouveau «dieu» qui sortirait des flancs des écuries pour lui barrer la route. «Bombardier» ne se fait pas de fixation entre «Gris Bordeaux» et «Yawou Diaal». «Je ne vise aucun jeune en particulier, je suis prêt à lutter avec n’importe quel espoir. Car , ils pèsent tous 100 kilos ou plus. Yawou Diaal dit qu’il est prêt à m’affronter, qu’un promoteur vienne me dire que je vais organiser ton combat avec «Yawou Dial» je vais le préparer très sérieusement», se convainc Serigne Dia, pressé de sauver la mise chez les lourds. Car, avec la retraite anticipée de l’ex-chef de l’écurie Boul falé, difficile de trouver des plus de 130 kilos capables de faire l’évènement, de faire saliver le monde de la lutte. Pourtant, «Bombardier» ne se fait pas d’illusions et se met désormais à l’écoute des promoteurs. «Je n’ai pas de problème d’adversaires, je pense plutôt donner l’occasion aux jeunes lutteurs de m’affronter et je ne me fais pas de fixation sur aucun d’entre eux. A ce niveau je compte faire comme Tapha Guèye qui a donné la chance aux jeunes de l’affronter, je compte faire comme ça», rectifie-t-il.

Le temps passe, «Bombardier» gagne en assurance et hausse le ton face aux journalistes qui entrent dans sa garde pour en savoir plus sur ses préparations mystiques. «Bombardier est dangereux mystiquement et je dis Machallah, aucun journaliste ne peut me pousser à parler de mystique. Je garderai toujours le secret», freine-t-il.

Toutefois, Serigne Dia «Bombardier» a eu mal dimanche dernier. Quand debout au milieu de l’enceinte, ses yeux ont balayé l’arène de Léopold Senghor et que la voiture de «Tyson» roulait à vive allure pour quitter l’enceinte, le lutteur de Mbour a du mal à cacher son courroux et le fait savoir. «Ce qui m’a le plus fait mal, ce sont tous ces gens qui, depuis des mois, ont passé leur temps à discuter dans les grand’places, des gens qui sont venus au stade tôt le matin faisant des sacrifices monstres. J’ai senti dans l’enceinte que certains spectateurs étaient frustrés du spectacle fourni. Donc, le seul plaisir qu’on pouvait leur offrir c’est de leur donner du spectacle. Car c’est une faveur que de se faire aduler par des milliers de gens. Je pense que c’est une marque de grandeur de rester digne quelle que soit la décision de l’arbitre. Et puis, il faut qu’on donne du respect aux amateurs», déplore le chef de l’écurie Mbour sous les vivats de ses sympathisants.

Y aurait-il du «Bombardier dépendance» au sein de l’écurie Mbour ? Serigne Dia ne s’inscrit pas dans cette logique. Plutôt, des surdoués de la lutte se cacheraient sous sa musculature géante. «Notre écurie marche bien. Il y a plein de lutteurs, on prépare beaucoup de jeunes. Nous avons même un champion d’Afrique en la personne de Auguste alias «Bombardier Junior» qui est prêt à prendre ma relève», concède-t-il.

Après une heure à échanger de mots à peine musclés contre les journalistes, «Bombardier» se lève lourdement de sa chaise. Ses irréductibles se jettent sur lui pour le toucher et scander à vive-voix «Champion Champion !»